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Histoire
Deux missiles sol sol Français vont frapper la même cible en 1960 (Doc Matra 1962)
Christophe Colomb et le Spoutnik-1
Bâties sur le modèle de C.Ptolémé, l'organisation
du système solaire, ainsi que la place et la
géométrie de la Terre n'encourageaient pas aux
voyages maritimes audacieux. Du fait que les marins
étaient obligés de ne pas trop s'éloigner des côtes,
l'exploration du monde était restée dans un domaine
restreint, très conservateur, jusqu'à la fin du
15ème siècle.
Carte Portulans de 1559, Méditerranée Occidentale.
(Doc Bibliothèque Nationale, Paris)
Avec l'arrivée d'idées nouvelles comme celles,
révolutionnaires, de Nicolas Copernic (1473-1543)
concernant le système solaire et la théorie du
géoïde terrestre, une nouvelle ouverture d'esprit
allait permettre aux plus audacieux de repartir à
la conquête du monde.
Les Arabes nous donnèrent à cette époque la
boussole, et le savant astronome Johannes Mûller
dit Régiomontanus établit des éphémérides, issues
du comput, qui allaient, par la suite, nous
permettre d'évaluer (grossièrement) les longitudes.
Tous ces nouveaux arguments permirent, dans une
remarquable abstraction intellectuelle, de partir
explorer de nouvelles routes maritimes.
Représentattion de la Terre telle que la
connaissait Christophe Clomb en 1492.
(Doc Musée National de Nuremberg Allemagne)
Forts de ces nouvelles connaissances, Portugais,
Espagnols, vont lancer des expéditions maritimes.
Par exemple l'audacieux navigateur Génois Christophe
Colomb saura habilement convaincre la reine Isabelle
d'Espagne de lui financer sa flotte de caravelles
en 1492 pour ouvrir une route Ouest destinée à
atteindre l'Asie.
Spoutnik-1 une aventure du même ordre ?
Imaginez un peu l'état d'âme de Colomb dès que sa
flotte de caravelles eut quitté la terre de vue.
Il n'avait comme certitude que les toutes nouvelles
théories dont l'une des plus étonnantes : la Terre
était une sphère, elle tournait sur elle même et en
plus autour du Soleil ! Il devra attendre quatre
vingt dix longs jours de navigation, dans le doute,
pour enfin découvrir à l'horizon ce qu'il pense être
la côte des Indes. La théorie était donc juste !
Christophe Colomb qui le premier vérifia la
rotondité de la terre en effectuant une
recherche maritime par la route Ouest vers
l'Inde et découvrit les îles Caraïbes en
1492 après trois mois de navigation Atlantique.
Korolev c'est ce Russe qui en 1957 fabriqua
et lança le premier satellite artificiel de
la Terre, le Spoutnik-1. Premier véhicule
spatial à vérifier les lois de la balistique
orbitale. (Photo BSI 1989)
Pensez un peu à l'état d'âme de Korolev, le papa de
de la fusée de Spoutnik-1, attendant que s'écoulent
les quatre vingt dix minutes silencieuses du premier
tour de terre du satellite pour vérifier, à la
réapparition du signal radio satellitaire, que le
spoutnik avait atteint la première vitesse cosmique
et bien vérifié et confirmé les lois de la balistique
et de la fameuse mécanique céleste en orbite basse.
Voila en quoi les deux évènements sont de même
importance, mais séparés l'un de l'autre par 465 ans
(mais Korolev était resté au sol, lui).
C'est sur ce type de navire, la Santa Maria
que C.Colomb a tenté de rejoindre les Indes
par la route Atlantique Ouest en 1492 et
a découvert l'actuelle San salvador Lucayes.
Photo du Spoutnik-1 prise par l'auteur à
L'Exposition Internationale de Bruxelles
en 1958. C'est le premier objet artificiel
à avoir échappé à l'attraction terrestre
en orbitant plusieurs mois.
Ouvrons ensemble le livre (secret) de cette
récente histoire. Il ne s'agit pas ici d'annoner
une chronologie que tout un chacun peut faire
en naviguant sur la toile Internet; ici il
s'agit de vous communiquer, à la lecture de
cette chronologie les fortes émotions ressenties
à l'époque lors du déroulement de ces évènements
spatiaux du début de cette histoire et cela jusqu'
à nos jours.
C'est ce que ne nous ont pas conté les historiens
professionnels dans cette histoire où le rêve
s'est naît dans un réalisme des sciences les
plus dures.
Attention, le compte à rebours est terminé : maintenant.
{ Ce texte est dédié à Congrève, et Tsiolkovski }
Un préalable.
Cette histoire a été rédigée en temps réel tout au long des
années 1956 à 2005. Bien entendu les analyses de l'auteur sur
ces événements ne sont pas rendues avec un facteur d'émotivité
constant. La maturité de l'auteur s'est développée au fil du
temps, son appréciation de l'actualité spatiale aussi. L'auteur
n'a pas rédigé avec des facteurs de perception constants. C'est
pour cette raison que cette manière d'évoquer l'aventure spatiale
est originale et sans doute plus humaine, mais aussi moins
rigoureuse que l'histoire réelle.
Un début
Commencée en 1957 l'aventure humaine et technique de l'exploration
de l'espace cosmique débute le 4 octobre 1957, jour de l'annonce
du lancement du premier satellite artificiel de la terre.
Nonobstant cette date, bien des historiens spécialistes de l'astronautique
préfèrent préparer cet officiel début par une longue série d'événements
préliminaires, issus des réflexions humaines et des progrès techniques,
débutant dès la fin du XIX ème siècle. Les pères de cette aventure se
manifestent tout au long de ces prémices. On trouvera par exemple le
Russe Tsiolkovski, le Français Esnault-Pelterie, l'Américain Goddard,
l'Allemand Oberth, etc..
Pour fixer un début à l'exploration de l'espace cosmique il va
nous falloir définir l'altitude où commence cet espace par rapport
au sol de la Terre. Officiellement l'espace cosmique commence où
finit l'espace aérien contrôlable par la juridiction des Etats. A
la suite d'une laborieuse discussion entre Américains et
Russes, en pleine "guerre froide", les Américains arrachent à
ces derniers l'altitude du début de l'exosphère à 80 Km contre
100 Km demandés. Ces altitudes arbitraires ne se distinguent pas
par des signes physiques remarquables, ce n'est qu'une spéculation
stratégique qui pourrait permettre aux Américains de joindre à la
liste des premiers astronautes les noms des pilotes d'avions fusées
comme les X15 par exemple. On est même en droit de se demander
si les Américains n'espéraient pas, par cette pirouette, envoyer le
premier homme dans l'espace sur ce type d'avion (?)
Si on accepte la frontière des 80 Km on peut désormais se
demander si le missile Allemand V2 (V2= Vergetungswaffe-2: arme
de représailles numéro 2.) de l'ingénieur Wernher von Braun, ne servirait
pas d'origine à l'incursion humaine vers le proche cosmos ?
Cet engin balistique propulsé par fusée d'une portée de 300 à 350 Km
pouvait franchir cette frontière des 80 Km d'altitude sans problème.
Photo d'une V2 miltaire au décollage à Peenemüde
en 1943 (doc USIS 1956)
L'exploration du cosmos n'est pas qu'une possession de moyens
techniques, il faut être prêt intellectuellement pour cette aventure.
En 1945 les militaires allemands installeront des pilotes sur leurs
avions fusées (Caporal Lothar Sieberg en mars 1945 sur Bachem Natter.),
ils placeront même des pilotes aux commandes de l'avion robot
V1 à pulsoréacteur, uniquement pour sa mise au point ( par exemple
la pilote d'essai Hanna Reitsch), mais ils n'oseront pas l'imaginer pour
le missile V2.
Avant l'heure ce n'est pas l'heure.
Nous savons tous aujourd'hui pourquoi les Américains se
montreront moins empressés que les Russes à disposer
d'armes stratégiques balistiques du type missile. La très bonne
implantation des bases militaires de l'USAF tout autour de la
planète d'une part, et d'autre part le très haut niveau technique
de leurs avions bombardiers expliquent cela. Quant aux
Russes c'est le contraire, ils ne disposent pas de bases
aériennes à l'extérieur de leur Empire, et leurs avions n'ont pas
encore le même niveau technique que leur adversaire US. Ils
sont donc très motivés pour se doter de missiles intercontinentaux
au plus vite afin de rendre crédible leur force de frappe nucléaire
et surtout thermonucléaire.
Le décor est planté les acteurs vont entrer en action, très
inspirés par les résultats remarquables de la fusée de Wernher
von Braun, la V2. Américains, Européens, et Russes vont donc
commencer pour de simples raisons militaires à explorer notre
proche cosmos.
Wernher von Braun posant devant le projet lunaire américain
Novae, à comparer avec l'IRBM Jupiter du Redstone Arsenal.
(Photo NASA 1968).
La nouvelle frontière
Avec 80 Km d'atmosphère sur la tête, les terriens partent explorer
le proche cosmos. Hormis les tirs balistiques de la V2 Allemande
tous orientés vers un système d'arme et dans l'urgence guerrière
( engendrée par la barbarie Nazie ), ce sera aux Etats Unis d'Amérique
avec son montage de la V2 et de la Wac Corporal (le projet Bumper)
assemblées en un système à deux étages, que nous commencerons
à explorer notre proche cosmos. Un célèbre tir, le 24 février 1949,
du montage V2 W-Corporal emmènera une caméra de cinéma à
405 km de distance de la terre au-dessus de la Floride :
Photo de la terre prise à 212 km de distance du sol par une
fusée sonde Aerobee Hi en 1956 (doc USIS 1958)
Dès cette date nous savons déjà ce que pourrait voir un astronaute
en orbite terrestre. N'oublions pas aussi que déjà des pilotes d'avions
fusées expérimentaux ont constaté qu'à plus de 30000 mètres l'horizon
marque une rotondité prononcée. Nous citerons par exemple les vols
des avions fusées américains tels les Bell X1, X2, Skyrocket, et
NA X15, ou T-346 Russe. Il faut aussi se souvenir que tous ces pilotes
ont échappé à la pesanteur terrestre pendant près de 20 a 30 secondes
sans malaise significatif. Mais le pas décisif, le franchissement de la
première vraie frontière, passe par la mise en orbite terrestre, qui seule
offre une possibilité de voyage cosmique au sens populaire du terme.
Photo prise par l'auteur depuis 18500 mètres dans
le Concorde en vol vers les USA à Mach 2. Il faut
noter la couleur très sombre du ciel au zénith à
cette altitude.
Le voyage spatial
La motivation du voyage spatial est profondément encrée en
nous depuis l'origine des temps. Nous avons soif de conquérir
tout notre espace perceptible et même imperceptible, aussi
instinctivement que par exemple le fait le saumon qui recherche
ses origines à tous prix, remonte le cours d'eau pour se reproduire
et mourir là où il est né !
Notre génération rêve de cette "conquête d'espace " de la même
façon qu'ont dû la rêver les Magellan, Drake, et leurs grands
aînés Phéniciens. Lorsque la technique d'une part et la maturité
d'autre part se rencontrent, cette volonté se traduit par le
passage à l'acte, c'est l'exploit. Un exemple fameux restera pour
nous le voyage de Christophe Colomb 1492. Il ne découvrira pas
l'Amérique continentale, il ne lèguera même pas son nom à ce
continent, il ne bouclera pas le premier tour de terre maritime,
il sera simplement le premier à mettre intelligemment le cap à
l'Ouest, et bien entendu il sera le premier à rencontrer des
terres nouvelles. On laissera à son contemporain Amerigo
Vespucci le soin de donner son nom à l'Amérique, et à
Magellan d'initier le premier tour de terre complet par la seule
voie possible à cette époque, la mer.
Du rêve à la réalité.
Pour nous, le rêve c'est la route des étoiles. La littérature, et
l'iconographie populaire ne laissent pas de doute. Les histoires
depuis Jules Verne et son voyage vers la Lune 1870, ou A.Rubida
et son XX ème siècle 1884 nous montre l'objectif le plus simple, ce
sera la Lune. Mais bien plus audacieuses les bandes dessinées
des années 1950, venues pour la plupart des Etats-Unis d'Amérique
nous révèlent des aventures spatiales bien plus lointaines, Meteor,
Red Planet en sont de bons exemples, mais en résumé pour le
"bloc Occidental" la Lune est un bon candidat à l'exploration de
l'espace. Bon exemple du rêve spatial populaire : le célèbre
"Objectif Lune" histoire de la bande dessinée Tintin de Hergé (1953).
La revue de science fiction US, Red Planet
a fait rêver bien de jeunes américains en 1960
(Doc Bibliothèque Américaine de Marseille)
Même les Européens, quoique moins motivés par ce type de
rêve lunaire, produisent les films :" Le Voyage dans la Lune" de
Mellies, France, 1903, et "Une femme dans la Lune" de Fritz Lang,
Allemagne, 1929, (cette dernière réalisation est conseillée par H.Oberth ) .
Photo de la maquette de la fusée lunaire dessinée par Oberth
en 1928 pour le film de Fritz Lang : "Une femme dans la Lune".
(Doc Keystone 1959)
Pour les Russes aussi la Lune est le premier objectif que
l'on rencontre sur la route des étoiles, mais la station spatiale
reste le tremplin le plus commode à leur avis, comme l'écrit
Tsiokolvsky en 1870 ; c'est à partir de cette station que partiront
les explorations de la Lune et des autres planètes.
Mais pour le moment on rêve. Avec le vol réussi de la V2 Wac-
Corporal on rassemble les éléments technologiques qui vont nous
pousser vers la nouvelle frontière. Il va falloir maintenant faire passer
un homme au-dessus des 80 Km d'altitude avec un retour en toute
sécurité.
Photos du décollage d'une fusée Bumper depuis
White Sands aux USA le 24 fev 1949
Premier montage de fusée à étage (gigogne)
(Doc USIS 1956).
L'avion fusée
C'est avec ce moyen que les hommes vont explorer le segment
le plus important qu'est la vitesse pour prendre de la hauteur.
Photo du Bell X-1 prise par l'auteur au Smithosian
Museum Aerospace de Washigton, 1982. C'est sur
cet avion même que Chuck Yeager a passé le mur
du son le 14 oct 1947 au dessus de la base de Muroc.
Si les vols expérimentaux n'ont pas pour objectif de nous ouvrir
la route des étoiles, ils vont y contribuer un peu. C'est avec le
franchissement du mur du son en 1947 que le pilote C.Yeager, sur
avion fusée Bell X1, fait sauter un premier verrou. Pendant
l'année 1956, l'altitude de 38.5 Km est franchie grâce à l'avion
fusée Bell X-2. Elle est atteinte par le Capitaine Kincheloe, qui
sera à cette occasion nommé, bien abusivement, "Monsieur Espace"
par la presse américaine.
Un peu plus tard, en octobre de la même année, et malgré
l'accident mortel survenu, à la fin de son vol record, au pilote
Mel Apt sur Bell X-2, nous franchissons la barrière des plus
de 3200 Km/h.
Nous reviendrons plus loin sur ce sujet avec l'avion spatial.
Les Russes ne sont pas absents de cette étapes, mais ils
ne connaîtront pas les mêmes succès que les américains,
l'équivalent du Bell X-1 sera le T-346 mais un peu moins
rapide que lui, il ne franchira pas le mur du son.
On peu toujours rêver.
Chez les Soviétiques
Pour porter la charge militaire nucléaire et surtout
thermonucléaire les Russes rassemblent les hommes qui vont
leur ouvrir de façon inattendue la route vers la nouvelle frontière.
Nonobstant l'avion, les Soviétiques ouvrent le segment spatial avec
le missile balistique. Comme pour les Européens et les Américains,
ils s'aideront des travaux conduits par l'Allemagne, ceux accomplis
par Wernher von Braun, Donberger et Oberth avec la V2 entre
autres. Les géants russes s'appellent Korolev, Yangel, Tchélomeï,
Glushko, etc. Nous sommes au début de la décennie 1950.
De leurs travaux naîtra la célèbre Zémiorka descendante directe
du premier missile intercontinental ICBM expérimenté en août 1957
le R-7 testé sur un trajet de plus de 4000 Km. Cette fusée d'abord
militaire est construite autour d'un excellent moteur à carburant liquide
le RD-214, alimenté en acide nitrique et kérosène par des pompes.
Conçu avec quatre chambres de combustion en parallèle ce moteur
de 75 tonnes de poussée va servir à propulser une série de missiles
de portée intermédiaire IRBM et même de portée intercontinentale
ICBM (le R7) grâce à un moteur modernisé qui deviendra le célèbre
RD-107 de 90 tonnes de poussée brûlant de l'oxygène et du
kérosène. Assemblés en cinq fuseaux parallèles ils équiperont la
célèbre Zémiorka, qui sera encore en service au début du XXI ème
siècle. Certes elle a subi de nombreuses modifications depuis,
d'abord pour la qualifier vol humain, puis pour augmenter sa charge
marchande (Soyouz-Fregat, ou Breeze) et, grâce à cela, elle restera
pour nous la plus remarquable des fusées civiles, d'autant que sa
carrière militaire n'aura pas été très convaincante.
Photo de la fusée Zemiorka prise par F.Mitaine au L'ICBM R7
Salon du Bourget à Paris. C'est la toute première (Dessin de l'auteur)
apparition de ce lanceur en Occident.
On notera sur cette photo le groupe motopropulseur
original qui donne toute sa puissance à ce lanceur
dès plus historique : Spoutnik-1, Gagarine, Lunik-1
Luna-9, Venusik, Soyouz, etc.
Chez les Américains
A la même époque (1955) aux États Unis (enfin convaincus)
se met en place une industrie pour construire des missiles
destinés aux portées intermédiaires IRBM. La société Douglas
lance le projet Thor pour l'USAF :
Dessin de la fusée Thor de Douglas (IRBM).
(Doc USAF 1959)
L'US Army au Redstone Arsenal conduit par Wernher von Braun
se lance dans une super V2, la Redstone de courte portée, et dans
la Jupiter de portée intermédiaire. La Navy qui ne veut pas rester
sans rien va modifier une puissante fusée météorologique produite
par la société Martin Compagny, la Viking. C'est avec ces toutes
premières fusées que va débuter l'exploration du cosmos aux
Etats-Unis d'Amérique.
Dessin des fusées Redstone et Jupiter, documents reçus par
l'auteur depuis le Redstone Arsenal de Huntsville Al USA, 1959.
Photo de la fusée sonde de l'US-Navy Viking au décollage
(Doc USIS 1956)
Les motivations
Pour autant que les ingénieurs nous aient tout dit, nous pensons
qu'il y a plusieurs motivations à cette soudaine débauche de
moyens. Tout d'abord la guerre froide, qui commencait à peser lourd
dans les budgets nationaux, imposait pour les deux camps Est et
Ouest l'assurance d'une indiscutable dissuasion centrée sur la bombe
atomique. Le cauchemar d'Hiroshima et de Nagasaki de 1945 était
là pour l'alimenter. Il ne s'agissait même plus de porter le feu nucléaire
sur l'adversaire pour le neutraliser, mais de l'anéantir physiquement.
Dans la décennie 1960 les expérimentations d'armes de dévastation
de 50 Mégatonnes (50 millions de tonnes de TNT) en URSS et de plus de
30 Mégatonnes aux USA en sont la preuve (la bombe d'Hiroshima
équivalait déjà à 17 Kilotonnes de TNT) et tous les moyens seront bons pour
véhiculer de façon sûre, crédible la charge militaire (ICBM Titan et R-36).
Les hommes vont se donner pour mission de défendre leur nation
et leurs alliés par ces moyens. Ils vont s'atteler avec pugnacité à cette
tâche (nous sommes bien les enfants de la bombe ! ).
Photo d'une expérimentation nucléaire au polygone
de Kwajalein USA en 1960. (Photo US Nuclear Agency)
Mais en arrière-plan se dessinera le fait que les fusées
dédiées à cette mission seront aussi le vecteur possible pour
amener l'homme au-delà de la nouvelle frontière. Un homme
comme Wernher von Braun ne le cache pas, son rêve est bien
l'exploration du cosmos avec comme objectif la station orbitale
et la Lune. Pour Korolev il en va de même, le satellite artificiel
est un objectif à portée de ces premières fusées. Il va falloir
convaincre les décideurs politiques, mais cette fois-ci les
temps sont arrivés, les esprits sont prêts à affronter le voyage,
les tabous vont tomber. Bien entendu la dissuasion nucléaire
est un bon prétexte, d'ailleurs elle est bien réelle, mais le petit
feu qui brûle en nous n'attendait que ça.
Mise à feu.
1957 on y va
Au milieu de la décennie 1950, les premières fusées capables
de lancer un satellite sont en construction.
En URSS les prémices de la Zémiorka sont à l'essai, toute une
batterie de fusées sondes vont aussi les accompagner. Aux USA
la petite Redstone et la Viking seront suivies par la fusée Thor qui
n'est encore que sur le papier. Une cohorte US de fusées sondes
sera au répertoire également, comme en URSS.
Dans le cadre de l'année géophysique internationale 1957-1958
à venir, les USA envisagent de lancer ce premier fameux satellite
de la terre. L'URSS qui pour des raisons de propagande idéologique
n'entend pas rester en arrière, annonce que le projet l'intéresse
aussi et qu'elle va étudier cette possibilité.
Mais c'est avec le tir des premiers missiles intercontinentaux
Russes détectés par les réseaux radar Nord américains que
la rumeur se fait plus précise quant à la possibilité qu'a l'URSS de
réussir à lancer vraiment un satellite artificiel de la terre.
Aux USA la Navy a réussi à convaincre le Congrès qu'elle peut
arriver avant la fin de l'année 1958 à placer un satellite en orbite
terrestre. Pour ce faire elle va rééditer l'exploit du projet Bumper
(montage d'une V2 surmontée d'une Wac- Corporal). Elle place sa fusée
Martin Viking modifiée, pour pousser un second et un troisième
étage qui sont inspirés de la fusée US Aerobee (petite fusée
météorologique) sans grade, mais qui entrera dans l'histoire par la
suite. Le projet Vanguard était né.
Photo de la fusée Vanguard sur son pas de tir
au Cap Canaveral USA (Doc USIS 1957)
Nous sommes préparés psychologiquement à cette aventure
car en Occident des films Hollywoodiens nous ont fait réfléchir
sur le sujet (par exemple : Planète interdite, de FM.Wilcox, 1955), et des
articles de presse commencent à parler sérieusement du projet
de satellite artificiel de la terre.
Et contre toute attente, "Bébé Lune" se naît dans la nuit du 4
octobre 1957 en Russie.
Un des rares documents montrant la mise
à feu de la fusée (ICBM) R7 qui emporte le
premier satellite artificiel de la Terre Spoutnik-1.
(Photo Agence Tass BSI 1985)
Spoutnik 1
Très vite Korolev se rend compte des possibilités de la fusée qui
va donner la Zémiorka. La fiabilité de son groupe propulseur le
convainc qu'il tient là l'engin capable de pousser un satellite en
orbite terrestre. Il en est d'autant plus sûr, qu'il connaît assez
bien le projet de la Navy des USA et qu'il sait que sa fusée est
bien plus puissante (près de 450 tonnes de poussée contre 15
tonnes pour la Vanguard). Il réussit à convaincre le Président du
Soviet Suprême en arguant du fait que le programme satellite ne
ralentira pas la mise au point de l'ICBM, arme stratégique par
excellence. Son équipe reçoit l'autorisation, et rapidement il
conçoit une capsule technologique et en parallèle un petit
vaisseau spatial avec une cabine identique à celles qui
permettaient à des fusées sondes Russes de hisser vers
l'espace des mamifères comme des chiens. La capsule
technologique porte une balise radio émettant en HF et elle
sera alimentée par une batterie. Le tout est enfermé dans une
sphère remplie d'azote, quatre antennes fouet assurent la
diffusion radio électrique et Spoutnik (ce qui veut dire satellite) est
prêt à embarquer dans le cône de la fusée ICBM, à la place de
la charge militaire. Un petit séparateur mécanique libérera le
satellite dès la mise en orbite. La mission de Spoutnik 1 sera
dédiée à la géophysique de la terre, et pour se faire sa surface
sera polie de façon à pouvoir être observée optiquement si
possible. Il sera lancé le 4 octobre 1957 à la très grande surprise
du monde entier. Les observateurs attentifs auront, en plus de la
surprise, remarqué que la masse du satellite avoisine les 85 Kg
et ils auront le plus grand mal à imaginer son lanceur en faisant
la péréquation avec le projet Vanguard dont on connaît la masse
du satellite et la puissance de la fusée. L'URSS ne boudera pas
son plaisir, et la propagande fera aussi un grand pas en avant ;
mais c'est une autre histoire. En tout état de cause l'Homme a
franchi la nouvelle frontière avec la première vitesse cosmique.
De ce jour nous quittons une astronautique de science fiction
pour entrer dans les temps d'une astronautique scientifique.
Son premier cri fut: "bip, bip".
L'histoire est en marche.
Si l'on fait abstraction des vols balistiques de la fusée
militaire V2 de 1944 ou par exemple de ceux de la Viking qui, le
15 décembre 1952 culmine à 217 km tirée depuis White Sands
(c'est le vol numéro 9) au Nouveau Mexique USA, c'est bien avec
Spoutnik 1 que commence l'exploration de l'espace.
Il faut noter que Spoutnik 1 est bien le premier engin à s'affranchir
de l'attraction terrestre pour un temps ; il est bien celui qui atteindra
la première vitesse cosmique 7.5 km/sec et son orbite très elliptique
le fera tourner plusieurs mois dans l'espace alors même que sa
batterie fera fonctionner sa balise radio trois semaines. Il sera
visible à l'oeil nu pour tout le monde, le soir juste après le coucher
du soleil ou le matin juste avant son lever (en fait c'est plutôt le dernier
étage de la fusée qui sera visible, car il est placé en orbite lui aussi), nous
sommes en automne.
Trace visible à l'oeil nu du dernier étage de la fusée qui a
lancé Spoutnik-1. Les pointillés indiquent que ce dernier
étage tourne sur lui même. (Photo UNESCO 1958)
Pour les USA, passée la surprise (le terme est très modéré), les
premiers tirs pour la satellisation de Vanguard vont commencer.
Ils seront désastreux, car la fusée Viking qui sert de premier étage
a été trop modifiée pour être fiable. Elle porte pourtant en elle un
principe de pilotage des moteurs qui fera école par la suite aux
USA. Il s'agit du montage à la cardan de la tuyère, ce principe
étant destiné à diriger le jet de la réaction dans une direction
voulue afin d'orienter la course de la fusée. Pour parer au plus
pressé le Congrès et la Présidence autorisent l'Army et le
Redstone Arsenal à jouer sa carte Jupiter C. Wernher von Braun
avait concocté un montage simple et efficace sur le papier.
C'était une fusée Redstone surmontée d'un barillet de fusées
Recruit en deuxième, troisième et même quatrième étage.
Le montage Jupiter-C pour lancer le premier satellite artificiel
américain l'Explorer-1 de l'équipe Wernher von Braun (1958).
(Doc Redstone Arsenal 1959)
Le tout était prêt dès 1954-1955. Pour des raisons de propagande
le Congrès avait opté pour le projet Vanguard, arguant que la Viking
et l'Aerobee étaient des fusées civiles, alors que la fusée Redstone...
Cette fusée Redstone était une descendante directe de la V2.
Elle disposait d'un moteur à carburant liquide assez rustique, le A-7
de Rocketdyne à oxygène et alcool mais très sûr et son pilotage
se faisait par déviation du jet de gaz de la réaction grâce à des
gouvernails en graphite, le moteur restant fixe. En peu de mois
Wernher von Braun et son équipe d'Huntsville en Alabama
réussissent à construire la fusée baptisée Jupiter C, (à ne pas
confondre avec l'IRBM Jupiter en développement pour l'Army). Le satellite
du nom d'Explorer 1 était un cylindre doté de trois capteurs de
radiation, tarés par le physicien James Van Allen, suivant les
indications recueillies par les nombreuses fusées sondes.
Explorer 1, comme Spoutnik 1, était alimenté par batterie
chimique et il était même stabilisé sur un axe par rotation des
derniers étages de la fusée Jupiter C. Ce sera le 31 janvier 1958
que Wernher von Braun entrera dans la bonne légende avec la
réussite de la mise en orbite du satellite Explorer 1 de 14 kg.
(Wernher von Braun avait collaboré avec le parti Nazi).
Et les autres ?
Avec le départ des Américains pour la nouvelle frontière nous
pouvions penser que l'histoire initiale était jouée. Les deux
grandes puissances technologiques du moment, comme l'avaient
fait en leur temps Portugais et Espagnols au XV ème siècle, pour
se partager les nouveaux espaces maritimes, allaient se partager
les nouveaux espaces cosmiques proches de la terre. C'était sans
compter avec les Européens qui, certes émiettés politiquement,
rassemblaient tout de même, en théorie, une grande puissance
intellectuelle du même ordre de grandeur que leur adversaire
Russe ou leur allié Américain. Pour les mêmes motifs initiaux, à
savoir la mise au point de vecteurs crédibles pour porter l'arme
nucléaire dont s'étaient dotés Anglais et Français, leurs ingénieurs
ne pouvaient pas ne pas rêver non plus à la frontière de l'espace
en terme d'épopée en plus que de passage obligé pour les fusées
stratégiques IRBM et ICBM à venir.
La France procède au tir d'essai de sa
nouvelle fusée sonde Veronique-61M/86.
On aperçoit le guide initial par deux fils.
(Photo CNRS, exp FAUST 1975)
A l'autre bout de la planète une puissance naissante du point
de vue politique, la Chine, voyait poindre le même besoin
(comme les Européens) de posséder un ou des vecteurs fusées
pour porter leurs armes nucléaires. Les Chinois envisageaient
le missile stratégique ICBM comme les autres ; il ne serait pas
étonnant de les voir s'attaquer au problème du vol orbital.
Pour le reste de notre planète c'était une manifeste absence
d'intérêt pour ce nouvel espace, non pas par manque de
compétences mais plus probablement par manque de maturité.
Cela n'allait pas durer bien longtemps.
La fin des années cinquante.
Ce sera encore avec une énorme surprise que nous découvrirons
le nouveau satellite Russe Spoutnik 2, lancé le 3 novembre 1957
soit un mois après Spoutnik 1. La surprise aura deux origines :
une audacieuse, puisque ni plus ni moins qu'un mammifère bien
vivant se trouvera à bord, la chienne Laïka, et l'autre technologique
avec la masse du satellite annoncée de 510 Kg qu'immédiatement
nous comparerons aux masses de Vanguard 1 (dit aussi Pamplemousse)
avec ses 1.5 Kg et d'Explorer 1 avec ses 14 Kg !
Les cendres de la petite chienne retomberont le 14 avril 1958 sur la
Guyane Française.
Photo de gauche Spoutnik-2 (Doc de l'auteur). Photo de droite
habitacle de la chienne Laïka (Doc Agence Tass BSI 1958).
Voila bien l'exploration commencée, un mois après la surprise du
Spoutnik; voici qu'un être vivant, une chienne qui est déjà un
mammifère supérieur assez proche de notre physiologie, mis en
orbite, restera vivante pendant 24 heures avant de mourir par
arrêt du support vie du satellite, lui-même stoppé par épuisement
des batteries électriques. Mais l'information était passée, un être
pouvait vivre dans l'espace de façon encourageante. Une moins
bonne nouvelle allait nous arriver d'abord avec Spoutnik-II puis
d'Explorer 1, leurs capteurs de radiations s'étaient bloqués sur
une valeur maximale. Spoutnik 1, dont ce n'était pas la mission,
n'avait rien détecté de ce genre, par contre il nous avait permis
de tracer une géométrie de la Terre en observant ses dérives et
changements de plan d'orbite celasignifiait que la terre n'était
pas bien ronde et qu'elle avait même (en exagérant beaucoup) une
forme de poire. Spoutnik-2 était équipé de tels détecteurs, mais
les soviétiques se borneront à confirmer qu'il y avait bien un
niveau radiatif intense sur la route orbitale du satellite mais ils
resteront, d'une manière générale, discrets quant aux résultats
des mesures de ces radiations cosmiques.
Ce sera avec le succès du lancement du satellite Américain
Explorer 3 que nous aurons une réponse un peu plus sûre quant
aux niveau des radiations détectées par Explorer 1. Trois nouveaux
capteurs recalibrés par le Dr Van Allen vont bien détecter des zones
fortement ionisantes dans l'espace proche de la terre. L'imprécision
de l'orbite d'Explorateur-3 va lui permettre de sonder plus loin que
Spoutnik-2 l'espace cosmique et confirmer un haut niveau radiatif.
N'allions-nous pas pouvoir quitter notre planète et devoir assurer
l'exploration du cosmos par robots interposés ?
Deux mois plus tard le 15 mai 1958 l'énorme Spoutnik 3 soviétique
va permettre d'y voir plus clair, une surprise de taille sera aussi sa
masse de près de1400 kg (le poids d'une Cadillac dira-t-on) .
Ce premier satellite scientifique permettra de beaucoup mieux
comprendre ces zones de radiation, que l'on appellera plus tard,
peut-être un peu abusivement, ceinture de Van Allen, les Russes
pouvant aussi revendiquer la paternité de cette découverte lors
du vol de Spoutnik 2, et la précision des zones ionisées par
Spoutnik 3. Mais toutes ces mesures ne depassant pas les 2500
kilomètres nous laisse un doute quand à leur étendue.
Photo du premier satellite scientifique soviétique
Spoutnik-3 avec les panneaux solaires occultés.
(Doc de l'auteur, Bruxelles 1958)
Nous ne trancherons pas le débat puisque aussi bien les acteurs ne
sont plus là pour en témoigner, (Van Allen est mort en 2006) et les
documents sont certainement dispersés ou peut-être même détruits.
Nous dirons que d'une manière générale on écrit "ceintures de
radiation de Van Allen", mais dans les publications pointilleuses on
n'attribue pas de paternité aux ceintures radiatives. Ce sera la mission
d'Explorer 4 de continuer l'étude de ces zones qui s'étendent en gros,
de 700 à 10 000 km de la terre en plusieurs couches, dont certaines
sont invivables pour les humains s'ils devaient y rester plusieurs
semaines sans protection.
Mais avec une maîtrise de la communication médiatique
l'Amérique allait nous surprendre. Le 19 décembre de l'année
1958 nous apprenions que les USA avaient mis en orbite autour
de la terre un énorme satellite de 4 tonnes ! Comment avaient-ils
pu passer de 15 kg en moyenne par satellite à une telle masse
pour le satellite du nom de Score ?
En fait il y avait deux surprises dans ce satellite. En premier lieu
c'était la première fois que le délicat et tout nouveau ICBM Atlas,
produit par la firme Convair (renommée en General Dynamics), était
dédié à un lancement satellitaire.
Mais pour faire impression sur les opinions publiques quelque
peu inquiètes du soi-disant "missile gap" Américain, l'USAF avait
délibérément laissé la fusée accrochée au satellite et elle s'était
mise en orbite avec lui. La carcasse de la fusée vide représentait
99,5 % des 4 tonnes de la masse du satellite, qui lui, seconde
surprise, était constitué d'une sorte de répondeur téléphonique
qui diffusait un message du Président US Eisenhower enregistré
sur bande magnétique et qui démarrait sur ordre des contrôleurs
depuis la terre. C'était la première fois qu'une voix humaine nous
venait de l'espace. Cela prouvait au moins que l'on pouvait parler
par radio depuis l'espace et surtout que le satellite pouvait devenir
un relais radio très intéressant pour les communications terrestres.
Le lanceur ICBM Atlas de l'USAF modifié ici pour
emporter la charge SCORE le 19 décembre 1958.
L'ensemble fusée vide plus charge utile fait environ
4 tonnes. (Doc Convair et USAF 1959)
Au mois d'octobre 1958 le 11 exactement, l'Amérique allait nous
faire battre le coeur bien fort en jouant de notre fameux fantasme
lunaire. Elle nous surpris avec une savante construction de fusée,
dont le premier étage était une fusée Thor de la société Douglas,
et les second et troisième étages étaient les deux derniers étages
de la fusée Vanguard. La Thor Able allait nous faire rêver un
moment : elle partait pour la Lune !
Dotée d'une sonde spatiale (c'était la première fois que le terme était employé)
du nom de Pioneer 1, elle avait pour objectif de toucher la Lune.
Après un bon départ, il fallut se rendre à l'évidence, ses moteurs
n'avaient pas donné l'énergie nécessaire pour passer de l'attraction
terrestre à l'attraction lunaire, mais tout de même la sonde s'éloigna
de la terre jusqu'à près de 120 000 km avant de retomber sur notre
planète, 24 heures après le lancement. Si la sonde n'avait pas atteint
son objectif, ses détecteurs de radiation nous révélèrent des
discontinuités dans les niveaux radiatifs s'étendant à plus de 20.000 km
de la Terre !
Photo du lancement au Cap canaveral de la première fusée au monde en
partance pour la Lune :la Thor Able dont on voit les étages Able sur la
seconde photo ; ils sont issus des derniers étages de la fusée Vanguard.
Dessin de la Thor Able à droite (Doc USIS et reproduction d'un dessin
de Science et Vie de 1959)
Objectif Lune.
Les Russes n'allaient pas rester les bras croisés devant
cette belle mission Pioneer 1. Le 2 janvier 1959 une fusée lancée
d'URSS stupéfie encore le monde : Moscou annoncait qu'elle
partait pour le domaine lunaire et elle avait atteint la seconde
vitesse cosmique. Le second verrou pour le voyage dans le
cosmos vient discrètement de sauter. Enfin dernière surprise
la sonde du nom de Lunik 1 pèse en vol Lunaire près de 350 kg.
A la grande surprise de tous les connaisseurs la sonde ne sera
pas lancée en vol direct, mais en deux temps ce qui explique
sa grande précision. Elle ratera la Lune de peu, 6 300 km, ce qui
représente une grande précision lorsque l'on sait que la sonde
est inerte en vol, c'est à dire que c'est seulement son dernier
étage qui lui a donné la vitesse et la direction de sa route sans
correction possible après leur séparation. En fait le message
politique est clair : si nous Soviétiques ratons la Lune de 6 000 km,
imaginez un peu la précision de nos fusées stratégiques terrestres...
Passée trop vite, la sonde n'en réalise pas moins une grande
première ; en effet, elle devient le premier satellite artificiel du Soleil
(du nom de Metcha). Cela s'appelle une planète artificielle, elle s'inscrit
sur le plan de l'écliptique sur une orbite qui fait le tour du Soleil en
443 jours, c'est-à-dire entre la Terre et Mars !
Accessoirement elle confirme les discontuinités dans le domaine
radiatif entourant la Terre. La notion de ceinture de radiation va
faire son entrée dans notre vocabulaire. Le magnétomètre lui
ne donne pas d'info sur la présence de champs magnétique
lunaire à son passage au plus prés de l'astre sélène.
Sonde lunaire soviétique Lunik-1 dite "Metcha", elle a une masse
de 350 kg en vol lunaire. Après son passage près de la Lune elle
deviendra la première planète artificielle du système solaire en
janvier 1959. (Doc BSI, Agence Tass 1959).
En attendant mieux les USA, avec discrétion cette fois-ci, lancent
une nouvelle fusée dont le premier étage reste une Thor de Douglas
et le second étage est le nouveau moteur Agena de la société
Lockheed, il porte le satellite (officiellement) militaire Discovery. La
surprise est là aussi constituée par deux informations : la fusée
dispose pour la première fois d'un moteur réallumable en vol, et
elle est en orbite sur une route inclinée à 90 degrés sur l'équateur,
c'est-à- dire qu'elle survole les deux pôles de la terre à chaque tour
de la planète. Cela veut dire aussi que toute la surface de la terre
est survolée par le satellite, URSS comprise, et bien entendu c'est
là que se trouve le message politique Américain. Mais pour le
spécialiste le plus important c'est que l'on a pour la première fois
un satellite manoeuvrable en orbite. C'est une grande première
car jusque là les satellites étaient tous en vol libre sur orbite, seule
leur attitude, pour certains, pouvait être bougée mais pas l'orbite.
Dessin de la première version de la Thor Agena
lancée de Vandenberg AFB le 28 février 1959.
(Doc USAF 1960)
Le bilan et l'Histoire.
Entre l'idée populaire que l'on se fait de cette première
exploration du cosmos et la réalité technique, il n'y a pas un si
grand écart. Tout le monde a bien compris qu'avec le lancement de
Spoutnik 1 on a ouvert le livre des explorations cosmiques. Tout
le monde comprend la modestie de ce premier pas compte tenu des
progrès insoupçonnés qui suivent le premier bébé-lune, mais tout
le monde a compris l'importance de ce premier pas. Avec Spoutnik 2
on pense qu'un humain pourrait survivre dans l'espace. Avec les
Explorer on découvre que l'espace est très agressif pour la survie
à long terme d'un humain en orbite proche de la terre, à cause des
ceintures de radiations. Avec Pioneer 1 on découvre que la Lune
n'est pas si loin que ça de la terre, et qu'elle devient un
objectif possible. Avec les Lunik on apprend que le voyage
Terre-Lune-Terre peut se faire en moins de cinq jours. Avec le
satellite Score on devine qu'un relais radio dans l'espace peut
très bien servir aux communications terrestres de façon très
efficace. Enfin avec les satellites militaires Discovery on
entrevoit la possibilité de manoeuvrer un véhicule spatial et de
le faire changer d'orbite, ce qui est une des conditions
indispensables pour espérer faire un rendez-vous dans l'espace.
Que retiendra l'histoire, ou tout du moins qu'est ce qui entrera
dans la grande Histoire en ce qui concerne l'espace cosmique et
l'aventure humaine ?
Sans doute nos descendants célébreront les premiers tours de
terre de Spoutnik 1 comme le grand événement de cette aventure
au même titre que nous avons célébré dignement le 500ème
anniversaire du voyage de Christophe Colomb en 1992. Pourtant
le Spoutnik 2 est bien plus porteur d'avenir pour les humains, avec
la preuve que la vie peut se poursuivre en orbite terrestre. Oui mais
d'un autre côté avec l'audacieux lancement de Pioneer 1, les
hommes montrent que dès qu'une petite chance s'offre à eux ils
n'hésitent pas à s'engager et à naviguer au plus loin dans le cosmos.
Mais Spoutnik 1 pourrait être un bon candidat à la célébration
historique des débuts de l'exploration de l'espace cosmique.
Oui, mais souvenez-vous, au 20ème siècle nous avons déjà
oublié le vol de Pilâtre de Rosier et du Marquis d'Arlandes le
21 novembre 1783 sur un ballon de type Montgolfier, oublié aussi
celui des vols en planeur de Otto Lilienthal en 1890, oublié enfin
que Clément Ader fit effectivement voler Eole un plus lourd que
l'air en 1890 (mais Eole était-il un avion pilotable ? ).
Tout cela fut escamoté au profit des frères Wright à qui, le
17 décembre 1903, au matin, à Kitty Hawk, on attribua le
premier vol humain à l'aide d'une machine plus lourde que
l'air (c'est un peu comme si l'on attribuait le premier vol spatial à J.Young
sur la navette Colombia le 12 avril 1981 à a place de Y.Gagarine sur le
Vostok 1 le 12 avril 1961) !
L'Histoire retiendra bien ce qu'elle voudra en fonction des
idéologies du moment, elle est pour nous imprévisible dans ses
choix. Heureusement les faits, eux, restent têtus. Vous avez bien
remarqué que si le satellite artificiel de la terre ou même de la
planète artificielle du soleil est une aventure humaine, l'homme
n'a pas encore envisagé d'y aller voir lui même. Est-ce aussi
vrai que cela ?
Le 19 septembre 1959 dans la plus grande discrétion possible
aux USA l'avion fusée North Américan X-15 est largué d'un
bombardier B-52 modifié, avec son pilote Scott Crossfield,
l'avion accélérera jusqu'à 2 500 km/h à 15 000 mètres d'altitude
au-dessus du désert de Mojave. Scott, lui, avait bien les yeux
dans les étoiles ce jour là. Pourtant ce n'était qu'un petit saut
aérien, qu'un bon avion de chasse aurait pu faire.
Mais le pilote était aux commandes d'une vraie fusée spatiale...
Première présentation du NA-X-15 aux couleurs de l'USAF.
C'est sous ces couleurs que Scott Crosfield testera l'avion
avant de le passer à la NASA pour ses vols spatiaux 1963.
(Photo North American).
L'élan de la décennie 1960.
La compétition Est Ouest comme on le disait en son temps n'avait
pas que de bons aspects, bien des injustices étaient commises en
son nom, d'un coté comme de l'autre, et même plus d'un côté que de
l'autre dit-on. Mais ici nous nous attachons à regarder se dérouler
chronologiquement les événements qui servent directement ou
indirectement à l'exploration du cosmos par les humains. La
décennie 1960 va par ce côté nous étonner. Les USA ont lancé de
vastes programmes militaires, pour la plupart, destinés à construire
des fusées fiables et de plus en plus puissantes. De la fusée IRBM
Thor de la Douglas Compagny à sa soeur du Redstone Arsenal,
la Jupiter de Wernher von Braun, construite par Chrysler, nous
avons là deux engins propulsés par un moteur identique le
Rocketdyne S-3 de 72,5 tonnes de poussée brûlant comme comburant
de l'oxygène et comme carburant du pétrole. Mais nous découvrons
bien vite que les étages supérieurs vont jouer un rôle important
pour achever la mission spatiale. Avec le complexe Thor Able nous
avons l'ambition d'obtenir la seconde vitesse cosmique (on dit aussi
la vitesse parabolique ou de libération avec 11.5 km/sec), mais l'ensemble
est un peu limite pour obtenir cette vitesse nécessaires à échapper
définitivement à l'attraction terrestre. Aux USA Il faudra attendre
encore une production du Redstone Arsenal et de Wernher von
Braun pour voir cette vitesse enfin atteinte par le montage de la
fusée Jupiter de la société Chrysler associée à des barillets de
fusées (Recruit) comme étages supérieurs. L'ensemble portera
le nom de Juno et il propulsera la sonde Pioneer 4 sur orbite
solaire, après avoir raté la Lune, comme Lunik-1, le 3 mars
1959.
La fusée Juno, montage d'un jeu de fusées Recruit
(moteur de la fusée Sergeant) sur l'IRBM Jupiter.
C'est la fusée lunaire de W von Braun en 1959.
(Photo donnée à l'auteur par le Redstone Arsenal)
Le premier coup au but lunaire sera donné par la sonde soviétique
Lunik-2 le 12 septembre 1959, elle y déposera, trés brutalement,
des emblèmes (pieces métalliques) à l'effigie de l'URSS. Mais là
encore, radio Moscou nous donne une information dès le départ de
la fusée. Comme Lunik-1 le lancement se fait en deux temps, une
mise en orbite terrestre, puis une injection sur une route du domaine
lunaire et en plus cette fois ci les Russes confirment la Lune comme
étant leur objectif, en ajoutant que l'engin est autoguidé pour atteindre
le sol sélène !
Petite sphère recouverte de pièces de métal à l'éfigie
de l'URSS qui a été transportée sur le sol de la Lune
en 1959 par la sonde Lunik-2. L'impact de cet objet
a dû être de l'ordre de 10 000 km/h sur le sol.
(Photo BSI URSS 1960)
Mais c'est avec la grande fusée Atlas de Convair associée à
d'autres étages que les USA vont disposer d'un engin enfin
sérieux pour partir dans l'exploration du cosmos. Chose
curieuse l'ensemble Atlas Able ne sera jamais utilisé avec
succès.
Photo du décollage d'une fusée Atlas-Able dite Vega qui
part le 24 sept 1959 à destination de la Lune pour mettre
en orbite la sonde Pioneer. Comme tous les vols suivants
de ce montage, ce sera l'échec. (Doc USIS 1960).
L'Atlas est un missile de portée intercontinentale
ICBM commandé par l'USAF à la Société Convair (General
Dynamics). Pour le choix de l'architecture les techniciens
opteront pour une fusée a un étage et demi. Deux moteurs
latéraux de 68 tonnes de poussée chacun, alimentés par les
réservoirs uniques principaux, encadreront un moteur de 26
tonnes de poussée, qui lui, restera jusqu'au bout de la phase
propulsée, la vitesse étant ajustée par deux petits moteurs
latéraux de 458 kg de poussée chacun. Ce montage astucieux
restera longtemps le seul, il ne fera pas école aux USA mais
le vecteur soviétique UR-500 (UR-500= Proton) s'en inspirera un
peu. Les moteurs sont des Rocketdyne H1qui sont du type à
générateur de gaz pour entraîner les pompes de carburant et
comburant. Le missile Atlas va connaître une brillante carrière
d'exploration du cosmos au profit des militaires avec le fameux
moteur Agena déjà testé sur la fusée Thor Douglas.
Photo montrant un ICBM Atlas couché. Pour son transport
le missile, aux réservoirs vides, est gonflé à l'azote pour ne
pas s'effondrer sous son propre poids. Sur ce document
on notera les trois tuyères et le tube coudé destiné à
l'échappement des gaz de la turbine des pompes des
carburants. Sur le dessus au milieu du fuselage on notera
la présence d'un des deux moteurs fusée vernier destinés
à ajuster la vitesse du missile. (Doc General Dynamic 1964).
Mais avant ça, un lancement va marquer son temps car pour
la première fois on va pouvoir suivre une sonde pendant
plusieurs mois de voyage dans le cosmos sur une trajectoire
hyperbolique à la seconde vitesse cosmique.
Photo de la sonde Pioneer V lancée le 11 mars 1960 par
une fusée Thor Able 219. Pour une masse de 44 kg cette
sonde va voyager vers la planète Venus et la NASA JPL
gardera le contact avec elle sur 36 millions de kilomètres.
(Doc JPL 1961)
Le lancement de Pioneer 5, de 40 kg, par une Thor Able le
11 mars 1960, nous permet de sonder l'espace cosmique
solaire sur une distance de plus de 36 millions km de la terre.
Nous avons là un exemple très fort d'exploration. Il se bornera
en fait à évaluer les communications radio avec la sonde, mais
ce sera bien passionnant pour les spectateurs qui vont tous
apprendre à recevoir régulièrement des nouvelles d'un engin
qui s'éloigne de la terre jour après jour.
L'espace est vaste...
Et la décennie "soixante" s'écoule.
Tout lancement est une première pour l'histoire. Par exemple le
1er avril 1960 le satellite Tiros 1 lancé des USA par une fusée
Thor Able, transmet les premières images de la terre en
permanence, ce satellite permettra d'évaluer un système de
future plateforme météorologique spatiale.
Photo du haut : le satellite météorologique expérimental TIROS
en test de vibrations. Photo du bas : un technicien US enregistre
les premières photos qui vont ouvrir la voie à la météorologie
spatiale en orbite basse. (Doc NOAA 1970).
Quelques jours après une fusée Thor Ablestar lance un satellite
du nom de Transit 1B, il devrait voir son nom entrer dans la petite
histoire, encore que son rôle soit presque incompréhensible pour
une grande majorité des spectateurs à ce moment là. Il s'agit d'un
satellite de navigation qui nous donnera trente ans plus tard le
réseau Navstar-Glonass le très fameux GPS (Global Positionning
Satellite). Pendant ce temps avec obstination les USA lancent des
satellites Discovery avec la fusée Thor Agena en améliorant le
système de pilotage. Seules les tentatives de récupération d'une
petite capsule larguée en orbite pour revenir sur terre échouent.
Photo du lancement de Discovery-1 le 28 février 1959 depuis
la base US de Vandenberg AFB par une fusée Thor Agena A.
(Doc USAF 1960).
Ne croyons pas que les Soviétiques se sont endormis sur leurs
glorieuses premières. Le 15 mai 1960 à la stupéfaction générale
un énorme satellite est mis en orbite. Il pèse 4500 kg et porte le
nom de Spoutnik 4. Comme les Discovery il largue une capsule
qui s'émiette, un morceau retombe même accidentellement sur
les USA. On pense qu'il s'agit d'un satellite militaire du type de
Discovery mais lancé par une fusée gigantesque.
Il y a des jours bénis pour l'exploration de l'espace et le 12
août 1960 en fait partie, pour les USA. Enfin une capsule du
satellite Discovery 13 est récupérée sur terre. Ce n'est pas un
petit évènement, c'est un des verrous importants qui saute
pour envisager l'envoi d'un homme dans l'espace.
Photo d'un satellite Discovery de la première génération.
C'est le bout du nez noir qui est récupéré sur terre. En
fait c'est en l'air qu'est attrapé en vol par un avion cette
petite capsule de quelques kilogrammes.
(Doc USAF 1963).
Ce même jour une fusée US Thor améliorée, du nom de
Delta, lance un satellite remarquable, Echo 1. Il s'agit d'un
énorme ballon aluminisé qui est gonflé dans l'espace et
qui va servir de réflecteur passif pour les ondes radio.
Il fonctionnera de façon (acceptable) en établissant une
grande première, la liaison radio bilatérale USA France,
avec la station de Pleumeur Boudou. L'ère des télécom-
munications spatiales vient de commencer. Avec discrétion
ce même jour l'avion spatial X-15 piloté par Robert White
convertit sa vitesse de 2800 km/h en altitude et culmine à
41 km au dessus de la terre. Le pilote doit renoncer à
utiliser ces commandes aérodynamiques, il utilise pour la
première fois des commandes par micro-fusées comme
le font les satellites Discovery pour manoeuvrer dans
l'espace.
Photo de gauche : largage du X-15 pour son vol à 41 km
d'altitude. Photo de droite : la capsule de Discovery 13
récupérée sur terre. (Doc USAF 1960) .
Mais il y a des jours bénis pour l'URSS aussi et le 19 août
1960 soit six jours après la récupération de la petite
capsule de Discovery 13 sur terre (en fait elle est récupérée
en l'air), c'est au tour de Spoutnik 5 de réussir son retour
sur terre mais comme d'habitude on peut mesurer l'écart
de masse des satellites récupérés, la capsule de Discovery
pesait quelques kilos et pour Spoutnik 5 c'est plus de la
moitié de la masse du satellite qui retourne sur terre, soit
plus de deux tonnes. Mais là où la surprise est de taille
c'est que la capsule revient avec deux chiennes bien
vivantes Belka et Strelka. Voilà, comme pour les
Montgolfières qui firent leurs premiers vols avec des
animaux, ici nous avons un scénario identique. Premiers
êtres vivants à avoir voyagé dans le proche cosmos et
être revenus vivants. Elles sont pourtant moins célèbres
aujourd'hui que le chien Rintintin du feuilleton US télévisé
de la même époque...
Siège éjectable, sur lequel a été monté la cabine emportant
les deux chiens russes qui seront récupérés vivants sur terre
le 19 août 1960. C'est sur ce même siège que seront, par la
suite, installés les cosmonautes soviétiques.
(Photo BSI 1975).
Il est vrai que le grand public préférait apprécier un
feuilleton télévisé bien rassurant, plutôt que de savoir
que des chiens venaient de précéder de peu l'envoi de
l' homme dans l'espace grâce au missile, connu pour
sa vocation guerrière. Pourtant le 29 mai 1959 les USA
avaient lancé, à grand renfort de publicité, le missile
IRBM Jupiter qui emportait dans le cône de rentrée
atmosphérique (à la place de la bombe atomique) deux singes
qui avaient culminé à 480 km avant de retomber 2500 km
plus loin, vivants, dans l'Atlantique ; vous souvenez-vous de
leurs noms ? (Baker et June)
Les petits macaques sont embarqués dans la cabine
qui prendra place dans le nez du missile Jupiter pour
son bond balistique de 2500 km de long, culminant à
800 km au-dessus de l'Atlantique. (Doc USIS 1960).
Le temps passe, les projets éclosent, mais désormais
toute l'attention du public est tendue vers un seul objectif,
l'Homme dans l'espace. On connaît le programme Américain
Mercury et ses sept "héros", on devine celui des Soviétiques
avec un engin du genre Spoutnik 5, peu importe les différences
technologiques, peu importe les masses mises en oeuvre,
Soviétiques et Américains sont visiblement en course et très
prêt de réussir. Ils se sont déclarés de fait ; il y aura un premier
et puis rien d'autre pour l'Histoire, car là, on joue une place pour
la très grande Histoire. Mais avant ça les Soviétiques vont
encore réussir à nous passionner avec le lancement de
Spoutnik 8. Il s'agit encore d'un vaisseau spatial plus grand
plus lourd que tout ce que l'on pouvait imaginer. Il prend la route
orbitale terrestre le 12 mars 1961 avec une masse de 6500 kg.
Rien pendant deux jours, pas d'annonce fracassante, pourtant
les ténors de la propagande soviétique sont présents à radio
Moscou. Seulement deux jours après, la radio annonce que
de Spoutnik 8 vient d'être lancée une fusée qui a poussé la
sonde interplanétaire Venusik avec pour objectif la planète
Vénus !
Comme pour Pioneer 5 la sonde va voyager sur la bonne
route et émettre sur 7 millions de kilomètres. C'était encore
du rêve, mais à la fin du voyag on perdra son contact avant
l'arrivée vers la planète numéro deux de notre système
solaire ; c'est un demi échec. Mais ce mode de lancement
laisse songeur tous les spécialistes du monde. Il deviendra
pourtant le mode obligé dans les années à venir, pour
tous les engins devant quitter définitivement l'orbite terrestre.
L'Homme dans l'espace.
Le programme Mercury conduit par les USA est destiné à
rapidement envoyer un être humain dans l'espace. On se
posait la question de savoir qui embarquerait à bord :
un cobaye humain du genre condamné à mort gracié,
un acrobate de cirque, et autres voltigeurs aériens ? On
s'est finalement rabattu sur le pilote de chasse dont la
discipline est à toutes épreuves ce qui remet en question
l'image hollywoodienne de l'intrépide aventurier.
'Exit' donc les voltigeurs aériens "casse cou"...
Le célèbre film de 1983 L'étoffe des héros de Philip
Kaufman est un bon documentaire sur les problèmes de la
sélection. Nous saurons bien plus tard que l'Union Soviétique
a suivi le même chemin en sélectionnant le même profil de
candidat : bon soldat avant tout. Si à cette époque le
programme Russe nous est totalement inconnu, tant en ce
qui concerne les lanceurs que le véhicule spatial et la
planification, le programme Mercury américain fait l'objet
d'une propagande effrénée relayée par la télévision, le
cinéma, et les radio-diffusions. Avec surprise pour nous et
pour couper l'herbe sous les pieds de l'URSS, l'Amérique
décide de surseoir à la mise en orbite d'un astronaute dans
l'espace par une fusée Atlas encore trop capricieuse pour
être qualifiée vol humain. C'est encore à Wernher von Braun
que sera demandé ce lancement, grâce encore à sa bonne
vieille Redstone !
Dessin de la fusée Redstone Mercury de la NASA.
(Doc NASA)
Cette petite fusée ne sera pas capable de mettre en orbite
un astronaute, mais sur une courte trajectoire balistique elle
permettra à la petite capsule Mercury de faire un petit saut
dans l'espace, car ne l'oublions pas, l'Histoire ne s'arrête
pas à ce détail, et tout le monde le sait. Le montage
Redstone Mercury est très vite prêt, les tests de sécurité
seront par contre un peu longs, un peu trop même, car
le 25 mars 1961Spoutnik 10 prend la route de l'espace
pour rééditer avec succès les missions de Spoutnik 5, 6, 9.
Puisqu'il y a succès on pense que les Soviétiques sont
prêts pour le vol historique.
La NASA (la nouvelle agence américaine d'administration de l'activité
aérospatiale) prévoit le lancement de la Redstone pour la fin mars
début avril 1961, et pendant ce temps là, la sonde soviétique
Venusik est sur la bonne route après une correction de trajectoire
qui doit l'amener à passer à 100 000 km de la planète Vénus,
et le 30 mars 1961 l'avion fusée US X-15 piloté par Joe Walker
atteint l'altitude de 50 km (c'est la mésosphère) avec une vitesse de
4 700 km/h. Le 6 avril la Redstone, qui doit envoyer l'astronaute
US Alan B.Shepard, reçoit sa capsule Mercury au Cap Canaveral
en Floride. On peut donc penser que le lancement du premier
astronaute de la terre aura lieu vers la fin avril. Mais le 11 avril
les vedettes de la grande propagande soviétique sont en place
à radio Moscou. Le 12 avril à 08:40 l'agence Tass annonce
qu'un homme a pris place à bord du Spoutnik 11, alias Vostok 1
(Vostok veut dire Orient ou Est en russe), il s'appelle Youri Gagarine
(c'est un ancien pilote de chasse). Il est cosmonaute de l'URSS, il a
été mis en orbite pour un tour de terre et a été récupéré vivant
sur le territoire de l'URSS. La grande Histoire est finie, elle a
son Christophe Colomb cosmique pour l'ouverture des routes
spatiales, l'exploration de notre cosmos peut enfin commencer
avec les hommes et elle ira très vite au début.
Photo officielle En haut de l'échelle qui mène à l'ascenseur ,Youri
(Doc BSI) Gagarine en scaphandre salue les techniciens.
Derière lui on aperçoit Sergeïv Korolev qui va
l'accompagner jusqu'à son vaisseau (12 avr 1961).
(Doc BSI et Pravda 1964).
Le 5 mai Alan Shepard à bord de la capsule "Liberté 7" lancée
par la Redstone MR3 fait son bond balistique avec succès,
Alan Barett Shepard installé dans la cabine Mercury
juste avant la fermeture de l'écoutille le 5 mai 1961.
(Doc NASA)
mais en fait c'est surtout l'énorme propagande des média
américains qui fera l'étonnement des observateurs.
Pendant ce temps le 19 mai on perdra le contact avec la
sonde soviétique Venusik à 7 millions de kilomètres de la
terre. Le 26 mai un bombardier américain B-58 traversera
l'Atlantique en 3 heures 30 minutes.
En première page des journaux on commence à
envisager le vol commercial supersonique (1961).
(Doc USAF- journal Le Provencal).
La technologie reprend ses droits
On a besoin de technologie.
Le 29 juin 1961 les USA lancent une fusée Thor Ablestar qui
place pour la première fois 3 satellites en orbite : un satellite
de navigation Transit, et deux satellites d'étude scientifique
Greb et Injub. Pour la première fois le satellite de navigation
est alimenté en énergie électrique par un générateur nucléaire
de type SNAP. Pendant ce temps les vols balistiques Mercury
Redstone se poursuivent avec quelques avatars. Ce sera le
6 août 1961 qu'un évènement va réveiller l'attention du grand
public. Les Soviétiques mettent en orbite un Vostok 2 avec un
cosmonaute, German Titov, dont l'originalité sera de passer
sa première journée dans l'espace. Ce qui choquera le plus
l'opinion publique sera un communiqué de radio Moscou
annonçant que Vostok 2 est silencieux parce que le
cosmonaute dort. Mais pour les spécialistes ce sera surtout
la découverte d'un mal qui va affecter plus ou moins tous les
voyageurs cosmiques en vol sans pesanteur, le mal de
l'espace.
Sur ce document on peut voir comment les soviétiques
entretenaient le mystère sur leur technologie spatiale.
En fait ils ne présentent pas ici le vaisseau lui même,
mais la coiffe qui le protège au lancement. Sur ce
document on voit celle du vaisseau Vostok-2 qui va
emporter le cosmonaute Titov pour son vol orbital de
25 heures autour de la terre.
(Doc BSI, Journal Le Provencal du 7 août 1961)
German Titov après son retour sur terre téléphone à Moscou.
Il est encore en tenue de vol après son saut en parachute.
(Photo X)
Titov en souffrira et ce sera une surprise pour tout le
monde. Le cosmonaute restera en vol sans pesanteur
pendant 25 heures et 18 minutes. La NASA, pendant ce
temps, annonce qu'elle est en train de mettre au point un
moteur révolutionnaire le Pratt et Whiteney RL-10
consommant de l'oxygène et de l'hydrogène. Ce n'est pas
un mélange hypergolique (auto allumable) qui doit donner le
meilleur rendement possible. Sa mise au point sera
laborieuse, mais elle sera indispensable pour des missions
spatiales plus complexes. Le 14 août le Président des USA
engage son pays sur un défit technologique impressionnant :
un américain doit faire le voyage Terre Lune Terre et en
revenir vivant, et cela avant la fin de la décennie !
Les Soviétiques ne relèvent pas ce défit car il leur
semble impensable à réussir techniquement en un si
court laps de temps, même pour eux. Toutefois il faut
noter que deux objectifs se présentaient aux explorateurs :
d'une part la Lune qui n'est pas loin et qui est facilement
accessible depuis la terre, et pour laquelle trois jours
suffisent sur une sage trajectoire ; d'autre part, faire vivre
des hommes en permanence dans l'espace pour des
durées nécessaires aux vols vers les planètes. Les
militaires soviétiques sont convaincus que cette dernière
option est la plus importante pour la défense du pays.
Les américains se sentent piqués au vif par les succès
historiques des soviétiques, ils ne leur restent que la Lune
comme objectif clair et possible pour essayer de nous
faire oublier les exploits Russes, d'autant que leur défense
nationale (militaire) US est de qualité et pléthorique.
La lune est proche certes, mais l'Amérique en est loin.
La station orbitale c'est très bien aussi, mais la technologie
Russe va devoir faire des progrès sérieux pour assurer
aux cosmonautes une chance de vivre correctement dans
un véhicule fiable. Il nous faut donc partir à la conquête de la
technologie. Une vigoureuse économie libérale déployée
dans un pays qui n'a pas souffert du choc de la seconde
guerre mondiale ; les USA d'un coté, et une sévère économie
de guerre de l'autre dans un pays dévasté et désorganisé
du fait en grande partie des effets de la seconde guerre
mondiale ; l'URSS, vont nous aider a tenir ces objectifs.
En tous cas deux hommes sont ravis de ces projets. Aux
USA Wernher von Braun se trouve placé aux plus hautes
responsabilités pour concevoir la fusée lunaire, un rêve
qui se réalise pour lui. Pour son homologue Soviétique
Korolev, l'homme de l'ombre, c'est exactement le même
raisonnement encore que la Lune ne puisse pas être
son objectif prioritaire du fait de l'influence des militaires
sur les instances politiques ; mais l'exploration du cosmos
oui, bien entendu il va s'y exprimer.
Et pendant ce temps là, le 1er septembre 1961 l'avion
fusée X-15 fait son premier vol avec le moteur définitif qui
doit l'envoyer dans l'espace.
Photo de l'auteur (Smithosian Aerospace Muséeum de Washington, 1982)
Le North American X-15 dans une de ses multiples livrée ; ici celle pour
la NASA.
Son pilote Forest Peterson poussera l'avion à 3 800 km/h pour
commencer. On pense qu'avec ce moteur, le Pioneer XLR 99
de 30 tonnes de poussée réglable, l'avion fusée peut atteindre
des vitesses de l'ordre de 6 500 km/h et qu'avec cette vitesse
il peut atteindre une distance de la terre de plus de 100 km.
C'est à cette époque que sur terre va se dérouler une série
d'expériences et de tests nucléaires atmosphériques hallucinants.
Parfois même on arrivera à compter plusieurs tirs de bombes
atomiques, nucléaires et thermonucléaires, par jour en totalisant
tous les acteurs de la dissuasion atomique (c'est d'ailleurs presque
une guerre nucléaire qui se jouera là). Avec cette dissuasion de la
terreur l'activité spatiale militaire va prendre de l'ampleur,
satellites d'espionnage optique, satellites d'écoute électronique,
satellites anti-missiles, satellites de surveillance des tirs nucléaires,
vont permettre de domestiquer la technologie spatiale de façon
rapide. Les ordinateurs vont prendre du grade pour assurer le
contrôle en temps réel des manoeuvres spatiales.
Etrange document montrant une fusée Atlas-D lançant 3 satellites
d'observation militaire OV-1, dont l' un est accroché sur le flanc
droit de la fusée alors que les deux autres sont côte à côte dans
une coiffe très large (1967). Notez la forte activité du moteur
vernier sur le côté de la fusée qui participe à l'ajustage de la
vitesse du vecteur. (Doc USAF 1995).
L'optoélectronique ne sera pas en reste pour guider les missiles
ou orienter les satellites. Les retombées civiles en Occident
seront spectaculaires, mais beaucoup moins en Union Soviétique
ou tout progrès reste confiné au seul profit de la défense. Pendant
ce temps, l'avion fusée X-15 atteint l'altitude de 65 km à 5 600 km/h
le 11 octobre 1961 (il n'est plus qu'à 15 km de la frontière), et
les USA lancent le programme Ranger pour photographier le
sol lunaire à bout portant.
Les Américains partent à la conquête de la Lune.
Entre le 27 octobre 1961 et le 21 juillet 1969 les Américains
vont développer, au pas de charge, toute la panoplie des
technologies nécessaires à envoyer un homme sur la Lune.
L'Union Soviétique va suivre sans s'engager officiellement
dans le défi Américain à l'inverse de ce que furent les
programmes :Satellite artificiel et Homme dans l'espace
(ils ne croyaient pas que les USA en seraient capables d'une part, et
ils n'y voyaient pas pour eux une quelconque urgence). Ils vont opter,
dans une cacophonie remarquable, pour plusieurs
programmes dont la station orbitale sera leur objectif principal,
mais sans écarter la Lune de leurs programmes immédiats.
Les USA vont construire des usines, des laboratoires de
recherches, ce qui va mobiliser une partie importante du budget
US, et faire augmenter les impôts, sans critiques excessives du
Congrès. Même après la mort du Président JF. Kennedy (1963)
le programme se poursuivra comme se poursuit une action de
commando, même après la disparition du chef. On va voir
apparaître une quantité remarquable de nouveaux matériaux,
de nouveaux procédés d'usinage, des progrès dans la micro-
électronique, des avancées en chimie, et d'une manière
générale des progrès intellectuels importants. Certes
l'Amérique ne sera pas la seule à bénéficier de ces retombées,
tous les pays alliés des USA connaîtront ces progrès de façon
plus où moins accentuée, même leurs adversaires Soviétiques
qui étaient organisés en dictature de type militaire allaient
aussi connaître le progrès. Mais très certainement le
programme lunaire US surnommé programme Apollo en
était un catalyseur et même un des moteurs significatifs.
On dit que près d'un Américain sur cent a travaillé de près
ou de loin pour ce programme (?). La guerre du Vietnam
n'entamera même pas cet élan, malgré son coût financier,
et son choc psychologique négatif sur les jeunes générations.
Le 29 novembre 1961 les USA mettent en orbite la capsule
Mercury, grâce à la fusée Atlas. Elle porte un singe du nom
de Hammos (Ham). Malgré quelques problèmes, la capsule
est récupérée en mer et le singe est sauf.
Le singe Ham qui va tester, avec succès, le
vol orbital de la cabine Mercury le 29 nov 1961
sur une Atlas-Mercury.
(Doc NASA, journal Le Provencal).
Le 12 décembre de la même année le satellite Discovery 36
(oui déjà) est mis en orbite mais cette fois-ci il est accompagné
par un petit compagnon, le satellite Oscar 1 réalisé et construit
par des amateurs. Il sera mis à la disposition des radio amateurs
du monde entier, sa balise restera célèbre car elle émettait le
signal HI en code Morse (" ti ti ti ti " " ti ti".} ce qui veut dire
"Salut" en Anglais. Pendant ce temps les USA continueront
à exploiter le proche espace au profit de ses satellites militaires
MIDAS pour l'alerte missile, et SAMOS pour l'espionnage
optique des territoires Russes. C'est grâce à eux que sera
découverte, enfin, la base Soviétique de Baïkonour dans le
Kazakhstan, d'où sont partis tous ces vols extraordinaires.
C'est sans doute en partie grâce à eux que sera connue la
fusée de tous les premiers succès, la Zémiorka. Le 27 janvier
1962 la nouvelle fusée Atlas Agena est mise à feu avec succès
pour envoyer la sonde lunaire Ranger 3.
Lancement de la fusée Atlas Agena
qui porte la première sonde lunaire
Ranger-3, le 27 janv 1962.
(Doc NASA)
Les rallumages du moteur permettront de manoeuvrer la sonde,
mais mal ajustée, la vitesse trop grande lui fera rater la Lune.
Après une longue série de reports, le 20 février 1962 le Major
J.Gleen embarqué sur la capsule (désormais on doit dire : Le vaisseau
spatial) Mercury Friendship 7 (sept comme les sept premiers astronautes
sélectionnés) fait trois tours de terre en orbite, et avec quelques
soucis il revient se poser en mer sain et sauf. Le triomphe de
J.Gleen sera célébré en Amérique avec le même élan que celui
de Y.Gagarine en Russie.
Le 16 mars 1962 l'URSS place en orbite un satellite de recherche
du nom de Cosmos 1, il faudra voir dans cette dénomination le
début d'une très longue série de satellites que la Russie veut
garder secrets. On y trouvera bien entendu des satellites militaires
équivalents à ceux des USA, mais aussi des satellites aux missions
avortées ou des satellites de recherche technologique voire parfois
scientifique.
Sur ce document l'URSS nous présente un
des tous premiers satellites scientifiques
Cosmos. (Doc BSI 1978).
Le "rush" spatial.
Cette décennie ne va pas être calme. Aussi bien sur terre que
dans l'air ou dans l'espace, chaque jour va apporter des
nouvelles de progrès techniques exaltants, inquiétants,
monstrueux pour certains, porteurs de tous les espoirs pour
d'autres. La médecine, la chimie, la biologie commencent à
bénéficier des retombées de la physique, de l'astrophysique
et de la physique de l'élémentaire (physique des particules), cela
va entre autre chose placer la micro-électronique en pointe
dans les bouleversements que nous vivons aujourd'hui. Les
transports aériens de masse bouleversent notre conception
du voyage (mise en service du Jumbo Jet Boeing 747 en février 1969),
le transport du pétrole par des tankers de plus de 300 mètres
de long, l'exploration des grands fonds marins par robots ou
par des hommes (Société Comex) vont permettre d'exploiter
des ressources pétrolières nouvelles (plate-formes off shore
Eco Fisk en Norvège), les moyens de communications par radio
télévision, téléphone, télécopie de type fac-similé sont
considérablement élargis grâce aux relais par satellites.
Les ouvrages de génie civil vont se développer avec audace
(aéroport du Kansaï au Japon 1994). La médecine avec ses greffes
d'organes audacieuses (le Cap, Afrique du Sud, Pr Barnard et la
première greffe du coeur) va nous troubler en 1968. Tous ces
développements ne seront exploitables qu'avec une nouvelle
liberté de les consommer, et l'on va voir fleurir des mouvements
d'opinion qui vont dans ce sens dans tous les pays de la planète
engagés dans cette conquête technologique.
Le 26 avril 1962 les USA lancent une nouvelle fusée (on parle
désormais de vecteur), la Scout qui fonctionne avec un carburant
solide et qui va nous permettre d'inaugurer le vol spatial en
coopération internationale.
Lancement d'une fusée économique, Scout.
C'est un vecteur à carburant solide.
(Doc USIS)
Dans ce cas ce seront les Anglais qui s'associeront aux USA
pour construire et lancer le satellite Ariel -1 de 16 Kg destiné
à l'étude de l'ionosphère terrestre sur une orbite elliptique de
1213-389 km. Le 10 juillet 1962 est mis en orbite par les USA
le premier satellite opérationnel de télécommunications actives
Telstar 1 de 80 Kg, sur une orbite LEO (Low Earth Orbite, orbite
terrestre basse). On y verra la première retransmission de
télévision entre les USA et l'Europe en direct.
La recherche et l'exploration du cosmos n'a pas perdu ses
droits. Le 11 août 1962 Vostok 3 avec le cosmonaute Nikolaïev
est mis en orbite pour un vol au long cours de 95 heures soit le
temps d'un aller, Terre Lune Terre, rapide. Le 12 août à la grande
surprise de tout le monde un second Vostok le numéro 4 est mis
en orbite sur une piste identique. Le moment judicieusement choisi
du lancement amène le cosmonaute Pavel Popovitch à croiser
Nikolaïev à moins de cinq kilomètres de distance, les deux
cosmonautes s'apercevront même par leurs hublots (?).
Le vaisseau spatial Vostok attaché au dernier
étage de la fusée porteuse tel qu'a pu le voir
Nilolaïev le 12 août 1962. (Photo X).
Si ce n'est pas un vrai rendez-vous en orbite stricto sensus,
cela nous amène à en prendre tous conscience. Le journal
Français "France Soir" titre : "Bientôt escadrilles de vaisseaux
Cosmiques", dans sa 7ème édition du 14 août 1962.
Enfin un grand jour pour l'exploration du cosmos solaire arrive.
Le 27 août 1962 la sonde US Mariner 2 est lancée par le
vecteur Atlas Agena et elle prend la route de Venus. Par
malheur le système de télémétrie est rendu défaillant et au
passage au plus près de la planète (36 000 km), trois mois
après son lancement la sonde envoie des données totalement
incompréhensibles pour nous à plus de 90 millions de km
de la terre. Elle annonce une température au sol de l'astre
de plus de 400° Celsius !
Sonde Mariner-2 avant Dessin de l'auteur de la sonde Mariner-2
son intégration dans la en vol spatial vers la planète Venus (1962).
coiffe de la fusée Atlas
Agena (Doc JPL 1963).
Les techniciens US pensent alors à confier au service du chiffre
Américain le soin de tenter de décoder cette nouvelle télémètrie.
Avec stupéfaction on apprendra que le sol de Vénus est porté
à une température de 400° à 450° Celsius à cause d'une
pression atmosphérique énorme associée à un effet de serre
considérable. Venus lève un de ses voiles.
Pour ne pas rester en arrière les Russes lancent la sonde Mars 1
à la poursuite de la planète rouge. Malgré une panne la sonde
transmettra à plus de 108 millions de km de la terre, établissant
un nouveau record de distance radio électrique.
L'assaut lunaire Soviétique.
Les Russes quoique non engagés par le défi Américain sur
la Lune n'en continuent pas moins imperturbablement leur quête
du Cosmos. Le 2 avril 1963 la sonde Luna 4 prend la route lunaire
qu'elle ratera de 8500 Km, mais avec une masse de 1500 Kg
cette nouvelle sonde fait rêver bien des observateurs. Le 15 mai
de la même année les Américains mettent un terme au fameux
programme Mercury. Plus aucun astronaute US ne devrait voler
seul (dans un vaisseau monoplace) en orbite terrestre.
Le programme Lunaire Américain doit maintenant s'orienter vers
les techniques indispensables à cet objectif. Le rendez-vous de
deux vaisseaux spatiaux est un passage obligé et compliqué à
réaliser. Jusqu'ici Russes comme Américains n'ont mis en
orbite que des vaisseaux spatiaux qui ne pouvaient pas modifier
les orbites. Seule leur attitude était ajustable afin d'orienter le
vaisseau correctement pour la rentrée atmosphérique. Avec le
très efficace programme Gemini les Américains vont roder toutes
les techniques des rendez-vous, de l'arrimage (docking) et de
la navigation pour explorer les voies les plus sures du complexe
Apollo. Même la technique de sortie d'un astronaute dans
l'espace sera au programme (EVA : Extra Vehicular Activity).
Une nouvelle fois les Soviétiques nous mettent en alerte. Le
lancement de Vostok 5 avec Valéri Bikovsky sur une orbite
elliptique de 222-272 km nous tient en haleine le 14 juin 1963.
Mais ce sera le lendemain que la surprise de taille nous
stupéfiera encore. Le lancement de Vostok 6 sur la même
piste avec rapprochement des deux vaisseaux nous révélera
le nom du cosmonaute : Valentina Téretchkova (la Mouette sera
son nom de mission) ! Une femme en orbite, c'est un choc pour
l'opinion publique mondiale.
Valentina Teretchkova au moment de son départ pour
le premier voyage spatial d'une femme, 15 juin 1963.
(Photo BSI, Pravda, 1963).
Un succès bien orchestré médiatiquement par radio Moscou,
l'Agence Tass, la Pravda, l' Izvestia et bien entendu les
'apparatchik' du pouvoir Soviétique. Là encore nous ne
considérerons pas le rapprochement de ces deux satellites
comme un rendez-vous spatial actif, mais simplement une
approche balistique (ce qui est remarquable techniquement).
Un petit détail qui semble anodin mais qui du point de vue
technologique aura un grand avenir est contenu dans le lancement
de la fusée américaine Atlas Centaur le 27 novembre 1963 et qui
au passage permet à l'Amérique de lancer des charges enfin
satellisables de plus de 4500 Kg ce qui commence a être du
même ordre de grandeur que les charges Soviétiques satellisables
(6500 kg). En fait dans ce lancement les observateurs sont
admiratifs pour ce nouveau moteur qui pousse l'étage Centaur;
ce sont les fameux moteurs cryogéniques (brûlant de l'hydrogène
comme carburant et de l'oxygène comme comburant) si difficiles à mettre
au point et dont nous parlions dès le 8 août 1961.
Très grand moment de technologie, la mise au point du moteur
RL-10 qui va propulser l'étage Centaur Américain en nov 1963.
Ce moteur a été développé par la firme : Pratt and Whitney.
(Doc USIS 1963).
Wernher von Braun ne restera pas insensible à ce succès, car
il sait que c'est avec cette technique que sa fusée lunaire, dont
il est le grand patron, pourra gagner l'orbite de notre satellite
naturel à 360000 Km de là.
Le passage à l'acte spectaculaire aura lieu, pour le USA, le 29
janvier 1964. Ce jour là sera lancé la maquette de la fusée Saturn
qui doit éclipser le projet Américain lunaire Nova trop ambitieux,
par le programme Apollo. La fusée Saturn SA-5 placera une charge
inerte (dumy load) de 17100 Kg en orbite LEO. C'est avec grande
fierté que les Américains ravissent à l'URSS le record de charge
satellisable en orbite basse. La poussée des moteurs du premier
étage est de près de 600 tonnes. Pour la première fois il nous est
donné de voir le complexe Apollo dans son ensemble :
Première vision du complexe Apollo lancé par une
fusée Saturn-1B de 600 tonnes de poussée.
(Photo, NASA 1964).
Troisième étage plus coiffe et enfin le vaisseau spatial lunaire,
la célèbre cabine Apollo surmontée de son système d'éjection de
secours. Le programme Apollo est bien sur ses rails. Pendant ce
temps les satellites Soviétiques Cosmos succèdent aux satellites
Cosmos à un rythme impressionnant.
Les échecs sont aussi impossibles à escamoter désormais ;
le 2 avril 1964 la nouvelle sonde Soviétique Zond 1 prend la route
de l'espace avec une vitesse hyperbolique, mais tombe en panne
de transmission dès son injection en orbite planétaire. Impossible
de le cacher ! Le Cap Canaveral en Floride est rebaptisé Cap
Kennedy, il voit décoller un nouveau vecteur qualifié vol humain
la Titan II avec le vaisseau spatial Gemini pour un vol test sans
pilote a bord. C'est le 8 avril 1964 qu'a lieu cette expérience
réussie.
Lancement de la première Titan II Gemini
en vol automatique sans équipage. Nous
sommes le 8 avril 1964 au Cap Canveral.
(Doc NASA 1964).
Dans les complexes manoeuvres spatiales il semblait que l'URSS
avait pris du retard sur l'Amérique. Mais le 12 avril 1964 le satellite
Soviétique Polyot 2 est mis en orbite pour effectuer des
changements de plans d'orbites comme le faisaient, depuis
un moment déjà, les Américains avec les satellites militaires
Discovery.
Le 28 juillet 1964 Le satellite Ranger 7 arrive enfin a boucler sa
mission, simplifiée depuis (il devait au début larguer comme Lunik 2
une capsule sur le sol de la Lune), il approche la Lune en chute libre
et arrive à transmettre, par télévision, avant l'écrasement lunaire,
des photographies à haute résolution. La dernière transmise le
sera depuis une altitude de 300 mètres du sol de notre satellite
naturel.
On n'ira pas sur la Lune seul. Les manoeuvres délicates vont
nécessiter la présence d'un équipage aussi bien en URSS
qu'en Amérique. Le vaisseau spatial Gemini en est la preuve il
sera piloté par deux astronautes (d'où son nom).
Ce sera le 12 avril 1964 qu'avec surprise l'URSS va mettre en
orbite un nouveau véhicule spatial habité, le Voskhod-1 (Voskhod
veut dire Aurore) d'une masse de 5321 Kg il est déjà plus important
que la capsule Gemini de 3175 Kg, mais la surprise, comme il
se doit, n'est pas dans sa remarquable masse mais dans le fait
qu'il y a pour la première fois, un équipage à bord. De plus c'est
un équipage de trois cosmonautes et ils ne sont même pas en
scaphandre étanche ; ils volent en simple combinaison de vol.
Le Commandant de bord sera Vladimir Komarov, accompagné
de l'ingénieur de bord K. Feoktistov, et le troisième personnage
sera, avec étonnement encore, un médecin B. Yegorov.
Le premier équipage en orbite spatiale sur Voskod-1
Le cdt en est Komarov, le médecin est Yegorov.
(Photo officielle, BSI 1964)
La popularité de ce vol sera très forte dans le monde. Mais, là aussi,
le mal de l'espace va affecter profondément l'équipage. Il rentrera
sain et sauf en URSS après la 16ème révolution autour de la terre.
A l'issue de cette mission il ne restera plus qu'un voyage spatial à
faire au pilote d'essai Komarov.
L'espace planétaire ne sera pas oublié pour autant. Le 28
novembre 1964 une sonde spatiale américaine lancée par une
fusée Atlas Agena enverra avec une vitesse parabolique sur une
route Martienne l'engin Mariner 4. La sonde nous renverra avec
succès et pour la première fois, des images prises au passage
au plus près de l'astre à 12500 Km, avant de s'inscrire sur une
orbite solaire comme planète artificielle. Le sol de Mars possède
des cratères comme la Lune mais en moins grand nombre. Les
premiers documents seront très émouvants pour les terriens.
Cette première photo du sol martien a surpris le
monde entier en août 1965. (Photo JPL / NASA).
La science pure non plus n'est pas en reste. Le 16 février 1965
lors d'un essai de la fusée Saturn 1 (maquette de la grande Saturn du
programme Apollo) un satellite de 10350 Kg est mis en orbite LEO.
C'est un record de charge utile dans ce domaine, le satellite
s'appelle Pegazus. A cette occasion la fusée Saturn 1 est enfin
qualifiée.
Pouvons nous être encore stupéfaits par un évènement spatial ?
Voyons un peu le 18 mars 1965. L'URSS lance le Voskhod 2 avec
seulement deux cosmonautes ; un Commandant, P.Belaïev et un
ingénieur de bord Alexi Léonov. Son nom va entrer dans la grande
Histoire de l'exploration du cosmos sans que l'on ait vraiment
attendu l'évènement avec impatience. Par l'intermédiaire d'un sas
ouvert sur le vide spatial le cosmonaute A. Leonov, en scaphandre,
effectue la première sortie dans l'espace libre accroché au
véhicule spatial par un simple cordon (EVA).
Sur ce surprenant document photo on Première photo d'Alexi Leonov lors de
voit l'équipage de Voskod-2 avec le de la première sortie libre dans l'espace
cosmonaute Leonov au fond près du relié au vaisseau par un cordon élastique
sas de sortie. (Photo BSI) (Photo X)
Pour la première fois la télévision Soviétique retransmet des images
presque en temps réel de l'exploit. On voit très bien le cosmonaute
flotter à côté du sas dans l'espace cosmique. L'évènement fait grand
bruit sur tous les média du monde. Mais le retour sur terre sera plus
laborieux, et comme pour la mission Mercury MA-7 du 24 mai 1962,
il faudra du temps pour retrouver l'équipage posé à plus de 300 Km
du point de posé initialement prévu.
Quant au programme Gemini, il prend enfin la route de l'espace ;
son premier équipage d'essai sera constitué avec le vétéran
V.Grissom et son copilote sera J.Young, au passage on notera que
c'est la première fois qu'un astronaute retourne dans l'espace.
Malheureusement pour lui ce sera la dernière.
Sur ce document on peut comparer la taille de la
cabine Mercury à gauche (monoplace) à la taille
de la cabine Gemini (biplace, sièges éjectables).
(Photo NASA)
On note qu'en Union Soviétique il n'y avait pas d'empressement à
améliorer les communications radio et téléphoniques. Pourtant le
23 avril 1965 l'URSS lance le satellite de télécommunications
Molnya.
Photo du satellite de télécommunication soviétique Molnya
(Doc BSI)
Il faut rappeler que le 6 avril précédant les USA avaient lancé,
dans le même esprit le premier satellite de télécommunications privé
le Early Bird, mais lui, très audacieux, s'était inscrit sur cette orbite
singulière que l'on appelle géosynchrone. C'est-à-dire sur la piste
équatoriale, vers l'Est, à 36000 Km du sol pour apparaître comme
un relais fixe dans l'espace (à cette distance de la terre il en fait le tour
en 24 heures). Mais Molnya lui, n'empruntera pas cette orbite singulière
imaginée par l'ingénieur A.C.Clark ( l'auteur du livre 2001 Odyssée de
l'espace), Il prendra la route Nord Est sur une orbite très elliptique
d'apogée à 40000 km et faible périgée pour pouvoir illuminer radio
électriquement les zones industrielles Russes du Nord inaccessibles
aux satellites en GEO (GEO= Geosynchronous Earth Orbite). Pour ce faire
le satellite sera lancé avec une inclinaison d'orbite de 65 degrés sur
le plan équatorial terrestre.
Et la Lune alors ?
La démonstration continue. Le 9 mai 1965 l'URSS envoie une
sonde Lunaire dont l'objectif n'est rien moins que le posé en
douceur sur notre satellite naturel ! Luna 5, 1476 Kg ratera ce
premier alunissage, et elle s'écrasera sur le sol sélène.
Photo du modèle de vol de la sonde lunaire Luna-5
qui va commencer à mettre au point le protocole de
l'alunissage. Pour cette sonde ce sera l'échec.
(Photo BSI 1985)
Le 3 juin 1965 les USA effectuent leur première EVA avec
l'astronaute E. White qui sort de la cabine Gemini entièrement
dépressurisée. Un nouveau problème apparaît lors de cette
EVA, l'astronaute, malgré un pistolet fusée qui l'aide à s'orienter
a du mal à manoeuvrer seul dans l'espace.
Photo d'Edward White en scaphandre hors de la cabine
Gemini totalement dépressurisée (il n'y a pas de sas).
L'astronaute est relié au vaisseau par un tuyeau flexible
d'alimentation en air. (Photo NASA).
Cela ne sera peut-être pas si simple d'intervenir dans l'espace
en EVA, et pour le voyage lunaire il est indispensable de
maîtriser aussi cet aspect des choses. En tout cas, pour
E.White, ce sera son dernier voyage dans l'espace.
Le programme Gemini va se dérouler sans fausse note ;
Il va permettre à l'Amérique d'aborder tous les aspects et
les mises en oeuvre des technologies indispensables au
vol Lunaire. Pendant ce temps là, la Russie nous étonne
encore en battant le record de charge utile mise en orbite
dans l'espace et le même record pour un satellite scientifique.
Le 16 juillet 1965 grâce à un tout nouveau vecteur fusée un
satellite scientifique de 12200 Kg est mis en orbite LEO.
Du nom de Proton il est en fait constitué d'un énorme bouclier
métallique qui protège des instruments de mesure pour évaluer
les vents solaires. L'originalité de ce vol est que ce satellite
donnera par la suite son nom à cette nouvelle fusée. Comme
pour l'étage Américain Centaur les Soviétiques font preuve
d'audace sur les moteurs du premier étage de cette fusée.
Point de moteur à carburant cryogénique, mais plutôt un
moteur à "postcombustion" et carburants classiques. Tout
aussi astucieux que le Centaur, tout aussi efficace, il
restera longtemps très confidentiel et on apprendra par la
suite qu'originellement il s'agissait d'un missile ICBM destiné
à porter une arme thermonucléaire de 150 Mtonnes !
Il faudra attendre bien longtemps avant de voir le mariage
de ces deux techniques dans un seul moteur (enfait on l'attendra
près de 30 ans pour le voir sur les navettes US). Mais pendant ce
temps là la Lune attend ses conquérants. Pour avancer dans
la domestication des techniques, après les Soviétiques, les
USA lancent avec la fameuse Atlas Centaur la maquette
de la sonde lunaire qui doit réussir le premier alunissage en
douceur, Surveyor; cette fusée fonctionnera avec succès le
11 août 1965.
Photo de la nouvelle fusée US, Atlas Centaur sur
son pas de tir au Cap Canaveral, elle lancera vers
la Lune la série des sondes Surveyor.
(Photo AGIP, Cohen).
Le 21 août 1965 les USA frappent fortement l'opinion publique
avec le lancement de Gemini 5 avec G.Cooper, un vétéran et
C. Conrad. Cette mission doit permettre de tester un élément
indispensable à la conquête lunaire, la pile à combustible pour
fournir beaucoup d'énergie électrique pendant quelques jours.
Pour ce vol ce sera un échec, mais ce principe de générateur
sera obstinément testé jusqu'au succès. Un autre élément celui
qui étonnera sera la durée de la mission : 8 jours, c'est-à-dire
la durée normale d'une mission Apollo. La vie dans la petite
capsule va faire ressortir bien des problèmes physiologiques
qui vont assombrir le projet Soviétique de station orbitale qu'ils
convoitent avant le vol lunaire. Pendant ce temps avec échec
sur échec l'URSS tente obstinément de gagner cette importante
grande première qu'est l'alunissage en douceur.
La moisson Gemini.
C'est en ces termes que tous les observateurs du monde
commentent ce programme Américain. Le 4 décembre 1965
avec le lancement de Gemini 7 la première tentative de
rendez-vous et d'arrimage avec une cible satellisée est un
échec. Qu'à cela ne tienne les astronautes partent dans un
vol marathon de 15 jours dont ils reviendront très éprouvés.
La pile à combustible tiendra assez bien son rôle jusqu'à la
fin de la mission. Le Commandant de Gemini 7 sera
Frank. Borman dont on reparlera de façon spectaculaire plus
tard, et le copilote sera Jim. Lowell. Mais où est passée la
mission Gemini 6 ?
Après une remise en vol à cause d'un échec de mise à feu
c'est la mission Gemini 7 dont on vient de parler qui est partie.
Mais la mission Gemini 6 aura lieu pendant le vol marathon de
Borman et Lowell. Le vaisseau spatial Gemini 6 avec le
Commandant W. Shirra et le copilote T. Stafford va exécuter un
rendez-vous avec Gemini 7 pendant son vol au long cours.
A la fin de la 4ème orbite les deux véhicules spatiaux seront
nez à nez. Le premier rendez-vous spatial actif de l'histoire
sera consommé, un autre verrou important pour le vol cosmique
viendra de sauter.
Un des très beau document de l'exploration de l'espace,
le rendez-vous actif entre Gemini-6 et 7. (Photo NASA)
Le bel échange de succès Est Ouest sur fond de guerre froide,
qui bat son plein pendant ce temps, semble bien ordonné.
Un franc tireur va venir bousculer le bel ordre. Pour les mêmes
motivations que les autres, la France qui veut que sa force de
dissuasion nucléaire soit crédible et indépendante a misé d'une
part sur le vecteur aérien, avec l'exceptionnel Mirage IV, et le
vecteur spatial qu'il soit lancé de base fixe et encore mieux de
sous-marins. Pour se faire, depuis la base d'Hammaguir en
Algérie, une base louée par les Français à l'Algérie, un
lancement de fusée, de la classe de la Thor Able américaine,
la fusée Diamant, place en orbite LEO une charge technologie
A1 d'une masse de 42 Kg le 26 novembre 1965. Le moteur à
carburant liquide de cette fusée développe près de 20 tonnes
de poussée et place avec l'aide d'un second étage, de grande
qualité, le satellite sur une orbite elliptique avec la première
vitesse cosmique à 1769 Km d'apogée et 528 Km de périgée.
Photo de la fusée française Diamant-A qui va
placer la France sur le podium des gagnants
pour les débuts de l'exploration de l'espace.
(Doc SEPR).
Ce programme pourrait initier un plus important programme
Européen a venir (?). Dans le monde on note un succès
d'estime, voilé par l'embarras Américain et Soviétique qui
minimisent l'évènement dans leurs média respectifs. La
France devient la troisième puissance spatiale du monde.
Revenons à la Lune ; le 31 janvier 1966 enfin le succès. La
sonde lunaire Luna 9 (conçue par Gueorgui Babakine) de 1580 kg
réussit enfin la très délicate manoeuvre de l'alunissage en
douceur tant convoité aux USA. Pour la première fois nonobstant
Lunik 2 le drapeau Soviétique "flotte" sur la Lune.
Premières photos du sol lunaire transmises par Luna-9
(Celles ci ont été piratées par le radio télescope de
Jodrelbank du Royaume Unis et communiquées au
monde avant les soviétiques) ! (Doc X)
Maquette de vol de la première sonde ayant réussi le
fameux (et complexe) posé en douceur sur la Lune.
Luna 9 le 31 janvier 1966. (Photo de l'auteur, Foire
exposition Internationale de Seville).
Il ne fait pas de doute, dans l'opinion publique, que l'URSS est
dans la course à la Lune même si elle ne l'avoue pas
officiellement. Aux USA le programme Gemini se poursuit
inlassablement. Un astronaute, issu des vols sur le X15
(1960 1962), où il atteint l'altitude de 64 km pour le compte de
la NASA, sera désigné comme le Commandant de la mission
Gemini 8; il va réussir le premier arrimage dans l'espace, encore
une condition indispensable pour le programme Apollo. Son nom
est inconnu: Neil Armstrong, de lui aussi on reparlera ! Mais dans
cette mission on va risquer de le perdre avec son copilote David.
Scott, à la suite d'un grave accident. Après l'arrimage lors d'un
essai de stabilité du couple Gemini et de sa cible Agena, une
fusée de pilotage du vaisseau reste bloquée en marche. Gemini,
désemparée va revenir en catastrophe sur terre en amerrissant
n'importe où dans le Pacifique, alors que la zone de récupération
est dans l'Atlantique.
L'équipage de Gemini 8 une fois posé dans le Pacifique.
Neil Armstrong est sur la droite et Scott sur la gauche de
la photo. La zone de récupération était dans l'Atlantique !
(Photo NASA)
L'équipage sera récupéré malgré tout sain et sauf après quelques
heures de recherche.
Une autre grande première manque à la panoplie des manoeuvres
indispensables à la conquête lunaire, qu'elle le soit par robots
interposés ou par envoi d'équipages humains. La mise en orbite
Lunaire est indispensable, et les Russes vont nous donner cette
dernière importante manoeuvre que devront maîtriser les Américains
dans le cadre du programme Apollo. Le 31 mars 1966 l'URSS lance
la sonde Luna 10 qui se met en orbite lunaire entre 350 et 1000 Km
du sol de notre satellite naturel.
Le premier satellite artificiel de la Lune, Lunik-10
mis en orbite le 2 avril 1966 par l'URSS.
(Photo BSI 1966)
Pour ne pas rester en arrière trop longtemps les Américains
réussissent l'alunissage à leur tour grâce a la sonde Surveyor 1,
lancée par l'Atlas Centaur. Il faut noter le progrès accompli par les
USA qui réussissent au premier essai cette délicate manoeuvre.
Les observateurs noteront le très haut niveau technique de ce
véhicule spatial doté de cellules solaires pour alimenter ses
systèmes électriques alors que les Soviétiques n'avaient utilisé
que des batteries chimiques pour faire fonctionner Luna 9 sur la
Lune. Pour naviguer sur la Lune et identifier un point de posé
précis il faudra des cartes. La cartographie lunaire depuis la terre
est un peu trop juste. Un programme Américain de cartographie
par satellite en orbite lunaire débute le 10 août 1966 avec le
lancement par une fusée Atlas Agena de la sonde Lunar
Orbiter fabriquée par Boeing et Kodak. Ce programme sera un
très grand succès et il nous vaudra des photographies sélènes
exceptionnelles et émouvantes. Les observateurs noteront
que ce satellite est manoeuvrable et il lui arrivera de survoler
la Lune à quelques dizaines de kilomètres du sol !
Des nuages noirs à l'horizon !
Le prix à payer.
Les budgets sont conséquents pour le billet vers la Lune. Le
programme Apollo dont on connaît tous les détails en est un bon
exemple. Mais ce n'est pas de ce prix là dont on parle ici. Avec
la fin du programme Gemini le 11 novembre 1966 il ne fait pas de
doute que les EVA resteront une aventure délicate. Les vaisseaux
spatiaux devront être équipés de points d'accrochage pour que les
astronautes puissent travailler de façon efficace dans l'espace.
La mécanique dans l'espace sans pesanteur est un casse tête pour
le cerveau d'un humain, il faudra en tenir compte pour le programme
Apollo et aussi pour le programme Russe.
Le 9 novembre 1966 tous les observatoires du monde enregistrent
sur leurs sismographes le décollage de la première Saturn 5 depuis
le PAD 39 à Merritt Island au Cap Kennedy (on dit MILA). Le vol
AS 501 sera un succès total car il permettra de qualifier la fusée de
Wernher von Braun pour les vols humains lunaires, et en plus de
qualifier la cabine Apollo pour les rentrées atmosphériques à la
vitesse parabolique de 41500 Km/h (à la seconde vitesse cosmique).
Premier décollage de la fusée Saturn-V pour
son vol d'essai sans pilote, le 9 novembre 1966.
(Photo NASA)
Le 27 janvier 1967 le vol de la première cabine Apollo est enfin
prêt, l'équipage constitué du Commandant V.Grissom, le vétéran
des vols suborbitaux Mercury (il part pour sa troisième mission, sur trois
véhicules spatiaux différents ! ), le copilote E. White (il avait effectué la
première EVA américaine sur Gemini 4) seconde mission spatiale pour
lui, et R. Chaffee un bleu, comme on a coutume de le dire désormais.
Lors du dernier test avant le jour du lancement, l'équipage meurt
dans l'incendie explosif du vaisseau Apollo, encore sur son pas
de tir. L'incendie est dû à un court-circuit électrique survenu sous
le siège du Commandant dans la cabine (on parle alors de "Command
Module") pressurisée à l'oxygène. La fermeture de l'écoutille d'accès
ne possède pas d'ouverture d'urgence, l'équipage mourra en quelques
dizaines de secondes. Consternation dans le monde, même en Russie...
R.Chaffee, Ed.White, cdt V.G.Grissom :
dernière conférence avant le dernier test au sol
qui leur sera fatal le 27 janvier 1967
(Photo NASA)
La dramatique enquête qui s'en suit va mettre en relief bien des
imperfections dans le vaisseau spatial, et même dans le reste du
complexe propulseur. (Stoppé, le programme Apollo ! ).
Le 23 avril 1967 les Soviétiques lancent un nouveau véhicule
spatial que tout le monde identifie comme étant l'équivalent de la
cabine Apollo. L'énorme engin, certains avancent la masse de 15
tonnes (il a en fait une masse de 6.5 tonnes), est mis en orbite sous le
nom de Soyouz (ce qui veut dire Union en Russe). Son pilote d'essai
est seul dans le vaisseau, c'est aussi un vétéran : Vladimir Komarov.
Manifestement en vol orbital le cosmonaute rencontre le même
genre de mésaventure que N.Armstrong sur Gemini 8. Avec
grandes difficultés il rentre sur terre, mais comble de malchance
son parachute se met en torche et Soyouz s'écrase au sol tuant
son pilote.
Le cosmonaute Vladimir Komarov trouve la mort
dans l'écrasement de son vaisseau spatial à
l'atterrissage en URSS le 23 avril 1967.
(Photo BSI Pravda 1967)
Consternation dans le monde, même aux USA...
(Stoppé le mystérieux programme Soviétique).
Le Major Mike Adams sera le premier astronaute mort
dans l'espace même, pendant la rentrée atmosphérique
du X-15 (81 km) le 15 novembre 1967.
(Doc AAAF, Y.Candal)
On pourrait penser que voilà les premiers astronautes morts en
service commandé, surtout Komarov lors de l'atterrissage de
son Soyouz, et bien non ; pour avoir arraché laborieusement
aux Soviétiques la frontière des 80 Km comme seuil de
l'espace cosmique, les Américains vont avoir le triste privilège
d'enregistrer le premier accident mortel dans l'espace même.
Le 15 novembre 1967 le Major Michael J Adams meurt dans
son avion spatial X15 lors d'une rentrée atmosphérique (le
pilote ne voit pas que son avion a perdu sa bonne attitude avant la rentrée
atmosphérique. Il rentrera par le travers et se désintégrera en vol) amorcée
depuis une distance à la terre de 81 Km. Les journalistes
occidentaux resteront extrêmement discrets sur ce triste
évènement.
La Loi, c'est la loi.
Continuons cette histoire
Avec ces terribles coup d'arrêt pour les vols humains, beaucoup
de personnes se demandant d'ailleurs si finalement le programme
Américain d'envoi d'un homme sur la Lune se fera dans cette
décennie (?) ; pour les Soviétiques par contre le manque
d'information sur le programme lunaire laisse planer un doute
sur les échéances, mais enfin le doute est de rigueur partout.
Modestement les USA lancent depuis une base Italienne offshore
au large du Kenya à l'aide d'une fusée Scout (à carburant solide)
un satellite Italien de 129 Kg le San Marco 2, le 26 avril 1967.
La base portera par la suite le nom de San Marco. C'est une
base légère construite sur une ancienne plate-forme pétrolière
dont la particularité est d'être sur l'équateur. En lançant un
satellite vers l'Est depuis ce point on est sûr de bénéficier au
maximum du bonus que nous donne la vitesse de rotation de la
Terre sur elle même (1800 Km/h). Ceci explique la bonne
performance de cette petite fusée. La leçon sera retenue plus
tard par les Européens.
Le 27 octobre 1967 les Russes tentent et réussissent une
manoeuvre extrêmement audacieuse que les Américains
n'auront jamais à leur programme: Le rendez-vous et l'arrimage
automatique entre deux véhicules spatiaux non habités.
Cosmos 188 et Cosmos 186 vont se rejoindre après une
course poursuite et s'accrocher l'un à l'autre automatiquement.
Le 2 novembre les deux vaisseaux se séparent et reviennent
se poser en URSS.
Le sondage de l'espace solaire continue. Un joli succès
Soviétique vient le prouver avec le lancement, le 12 juin 1967,
de la sonde Vénusik 4 qui avec 1100 Kg atteindra après 3 mois
de voyage la seconde planète du système solaire et larguera
dans son atmosphère brûlante une petite capsule d'investigation
qui sera détruite mais elle aura eu le temps de donner des
informations. Il est à noter que c'est la première fois que les
hommes envoient un engin destiné à se poser sur une autre
planète du système solaire. On vous rappelle à cette occasion
que la Lune est un satellite de la Terre et non une planète, les
vitesses et les distances pour joindre ces astres ne sont pas
du même ordre de grandeur.
Pour ne pas rester absent de l'exploration du cosmos les USA
lancent le 14 juin (deux jours après Venusik 4) la sonde spatiale
Mariner 5 qui part aussi à destination de la planète Vénus.
La sonde du JPL (NASA) Mariner-5 en route vers
Vénus le 14 juin 1967. (Dessin de l'auteur)
Avec 2449 Kg dont 300 Kg de charge utile cette sonde
survolera Vénus à 10000 Km de distance de son sol et elle
confirmera les données reçues de Venusik 4.
Lune, l'assaut final.
Nous sommes prêt. Les USA sont a nouveau prêts à partir
pour la Lune, ils engageant un programme hors du
commun, et qui restera un modèle d'organisation pour
toutes les entreprises de hautes technologies à venir.
La cabine Apollo (CM), le véhicule d'alunissage (LM) sont
entièrement reconstruits et prêts aux essais en vol.
Quant aux Soviétiques on ne sait rien de leur programme,
mais par atavisme nous pensons (à tort) que le programme
lunaire Russe est identique à celui des USA.
Aussi ce n'est pas avec surprise que nous apprenons que
le 14 septembre 1968 les Soviétiques envoient en direction
de la Lune une sonde spatiale dont le nom nous est connu,
mais pas la finalité, Zond 5 fonce vers la Lune.
En fait le véhicule spatial Zond-V est un vaisseau
spatial Soyouz sans son module d'habitation, il
est doté d'un bouclier thermique pouvant absorber
l'énergie de la seconde vitesse cosmique. Le
support vie du vaisseau est en marche ce qui
permet d'abriter des animaux pendant les vols
lunaires de 1968-1969-1970.
(Dessin Anatoli Zak)
Dans la capsule se trouvent des échantillons d'insectes
vivants ce qui nous confirme qu'un support de vie terrestre
est à bord de la sonde. C'est avec stupéfaction que nous
découvrons que l'engin contourne la Lune, et reprend la
direction de la Terre. Après un freinage très brutal la sonde
vient se poser dans l'océan Indien !
Pour la première fois un véhicule spatial a fait le grand trajet
Terre-Lune-Terre et a été récupéré. En fait cet exploit passera
inaperçu tant la foce de la propagande américaine TV, radio
monopolisera tous les média autour du programme Apollo.
Aux USA, faute de plus d'informations les experts constatent
que Zond 5 est revenue sur terre avec un angle de pénétration
tel que toute vie humaine n'aurait pas résisté à la décélération
(mais les insectes, oui).
Le voyage Terre-Lune-Terre, pour des raisons de mécanique
céleste, se présente de façon optimisée lors de certaines
fenêtres qui relèvent des éphémérides sélènes, elles sont
périodiques et prévisibles. La fenêtre suivante s'ouvre en
octobre 1968, et cette fois-ci c'est le choc pour les experts
américains, mais pas pour l'opinion publique subjuguée par
la propagande d'outre Atlantique concernant Apollo. Le
lancement de Zond 6 se fait d'URSS dans l'indifférence
générale, à destination de la Lune. Comme la première fois
la sonde Russe qui transporte comme Zond 5 des insectes
et même des reptiles comme des tortues, contourne la Lune
et revient vers la terre. Mais grâce à un subtil choix d'orbite la
sonde revient avec une décélération acceptable pour un
humain, et de plus se pose sur le territoire de l'URSS.
Pour parfaire l'évènement un "bruit de couloir" laisse entendre
(à juste titre) que Zond 6 n'est autre qu'un véhicule Soyouz sans
son module orbital et dôté d'un fort bouclier thermique testé
à la seconde vitesse cosmique sur Zond-5 ! Cette fois ci c'est
un mouvement de panique chez les experts de la NASA aux
USA où la perspective de voir un Russe remplacer la tortue
pour un vol circum lunaire laisse sans voix. L'Histoire n'attend
pas, et le vol circum Lunaire comme en son temps le vol
suborbital pour la terre importe peu, il n'y a qu'un premier et
l'Amérique ne veut pas rater sa dernière chance qu'elle a de
rentrer aussi dans la grande Histoire. En toute hâte les
Américains qui ont un contre temps dans la mise au point du
LM (Lunar Module) décident de faire comme les Russes. Ils
commandent de diriger au plus vite la cabine Apollo pour
un vol en orbite lunaire, c'est à dire pour la fenêtre de fin
décembre 1968. L'équipage est désigné et s'entraîne
rapidement. Le Commandant sera Franck Borman,
accompagné de Jim. Lowell, et de T. Anders. Mais la
fenêtre de novembre va s'ouvrir, et comme la précédente
on pense que les Soviétiques alertés par la réaction publique
américaine, vont tenter le grand saut. La fenêtre de novembre
s'ouvre et un temps plus tard se referme sans lancement de
Zond ou Soyouz !
Les Soviétiques viennent de perdre cette manche importante
pour la conquête du cosmos, la course à la Lune.
Le vaisseau Apollo-8 en route pour sa
mise en orbite lunaire de Noël 1968.
(Photo NASA 1969)
Le 21 décembre le véhicule Apollo 8 avec l'équipage
Borman, Lowell, et Anders part pour la Lune. Il se place en
orbite sélène et passe Noël 1968 au loin de nous, en orbite
au tour d'un autre astre du ciel. Une page se tourne, les USA
ont gagné leur course à la Lune, d'autant que la fenêtre de
décembre ne sera pas non plus utilisée par les Soviétiques !
Nous ne saurons jamais pourquoi les Russes ont laissé
passer ces deux fenêtres, ni même pourquoi ils n'ont pas
essayé plus tard. Tous les décideurs ont disparu aujourd'hui,
seuls des intermédiaires comme A.Leonov nous diront qu'ils
pensent que l'État Soviétique a renoncé par crainte de voir
un accident survenir comme pour Soyouz 1 ; peut-être...
Les experts Américains agréablement surpris par ce succès
inespéré ne bouderont pas leur plaisir, l'exploit sera
retentissant dans le monde entier, les télévisions nationales
nous abreuveront de documents sur le programme Apollo.
L'émotion bien naturelle sera ressentie par tous, seule
l'URSS et la Chine garderont discret le succès Américain.
Frank Borman était le commandant qui conduisait la mission
Gemini 7 pour ce vol de 8 jours agrémenté du premier
rendez-vous dans l'espace entre deux véhicules spatiaux
habités avec Gemini 6, en décembre 1965. En trois ans
les Américains avaient vaincu tous les obstacles
technologiques qui les séparaient du premier rendez-vous
en orbite terrestre d'une mise en orbite au tour de la Lune
avec un retour sans problème sur terre.
Et maintenant place à Neil Amstrong.
Le 3 mars 1969 Apollo 9 commandée par M. Divitt, avec
D.Scott, et Sweackart, se mettra en orbite terrestre et
testera toutes les manoeuvres possibles avec le Lunar
Module et le Command Module.
Le 18 mai 1969 Apollo 10 avec pour Commandant T. Stafford
accompagné de E. Cernan pilote du LM et J.Young pilote
du CM se mettra en orbite au tour de la Lune ; toutes les
manoeuvres seront conduites comme pour un alunissage.
Le LM descendra jusqu'à 18000 mètres du sol et remettra
ses moteurs en marche pour rejoindre le CM resté en orbite
lunaire. Ce sera un succès. Rien n'aurait empêché le LM de
se poser sur la Lune si l'équipage en avait reçu l'ordre ou si
le besoin s'en était fait sentir, mais, le programme était le
programme (vous voyez bien qu'un pilote de chasse est discipliné).
Le 16 juillet 1969 l'ensemble Apollo 11 est dirigé sans
incident vers la Lune avec comme objectif le posé.
L'équipage de la mission Apollo-11 avec de gauche
à droite : Armstrong, Collins, Aldrin qui vont cloturer
le rêve de l'homme sur la Lune en juillet 1969.
(Photo NASA 1969)
Le Commandant de bord n'est autre que Neil Armstrong,
avec B.Aldrin comme pilote du LM et M.Collins comme
pilote du CM.
Neil Armstrong à la base de la Tranquilité sur la Lune
le 21 juillet 1969. (Photo NASA 1969)
Le 21 juillet en un direct exceptionnel à la radio et à la
télévision l'Amérique donnera le spectacle tant attendu du
petit pas pour un homme et d'un pas de géant pour l'Humanité
quelque part dans la Mer de la Tranquillité ou sera posé Eagle.
Fin du rêve lunaire...
Le bilan.
Avec la V2, la Wac Corporal, Spoutnik 1, lunik 2, Discoverer 13,
Pioneer 5, le X15, Vostok 1, Saturn C1, Vostok 6, Voskhod 2,
Gemini 8, Luna-9, Apollo 6, Zond-6, Apollo 11, l'assaut lunaire se
sera conduit en moins de 25 ans et si l'on comptabilise à partir
de Spoutnik 1 alors on réduit le temps à moins de 12 années.
La guerre froide y est pour beaucoup, ne l'oublions jamais dans
nos comparaisons futures. Le prestige, la propagande auront
été les nerfs moteur de cet effort accepté par tous comme une
fatalité.
Certains diront même que Spoutnik 1 ou Apollo 11 se sont nés
de toute façon, comme la bombe atomique. Personne n'a jamais
voté pour la bombe, dans aucun pays (démocratique ou pas) ; un
jour elle était là comme l'a été Spoutnik 1 et même Apollo 11.
Quand c'est le moment, c'est le moment, impossible de l'empêcher
(pas plus qu'aucun comité d'éthique n'empêchera les manipulations génétiques
du type clonage sur l'homme au 21 siècle).
L'exploration du cosmos en fin de décennie des années soixante
est extraordinaire. Elle aura marqué notre génération de façon
profonde. Elle aura aussi participé à développer notre maturité.
Bien entendu les propagandes d'un côté et de l'autre des deux
principaux camps aura quelque peu brouillé notre jugement. Mais
avec le recul au début du nouveau millénaire et donc du nouveau
siècle nous pouvons un peu juger. Ne nous faisons pas trop
d'illusions dans cinq cents ans d'ici le regard de nos successeurs
seront bien différents du nôtre. Que leur restera-t-ils pour
écrire l'Histoire de cette aventure ?
Les faits rien que les faits. Mais parmi tous ces faits quels sont
ceux que l'on retiendra pour les inscrire dans un raccourci
acceptable avec l'histoire de tous les jours ?
La course pour l'exploration de l'espace n'est pas terminée bien
entendu. Un premier équipage se posera sur Mars, puis un autre
sur Mercure, et encore un autre sur un satellite de Jupiter, et
même encore plus loin sur un caillou de la ceinture qui entoure
Saturne. Pensez un peu a ceux qui se poseront sur Charon aux
confins de notre système solaire (on parle même d'une dixième
planète au delà de Pluton à la fin de ce siècle (Xenon)), sans compter ceux
qui marcheront dans l'enfer de Vénus ! Que sera à ce moment là
la perception que l'on aura de Spoutnik 1, Gagarine, Armstrong ?
Sans doute apparaîtront-ils en italique dans les livres d'histoire
de nos découvertes du cosmos comme nous le faisons déjà
avec les frères Montgolfier et autre C. Ader en ce qui concerne
les livres sur l'histoire de l'aviation.
Bien sûr que cela sera ça et rien d'autre, ce qui n'est pas si
mal. Voyez par exemple Cyrano de Bergerac qui ouvre tous
nos livres sur le vol spatial, c'est déjà très bien pour un buveur
de rosée (c'est avec des fioles de rosée du matin que l'on s'élevait dans
l'espace, pensait-on à cette époque)...
Cyrano de Bergerac s'envole vers la Lune à
l'aide de fioles de rosée en guise de ceinture
Certes, mais tout de même on attribue à Magellan la découverte
du monde, et pourtant il n'a pas fait le tour du monde lui. Se
souvient-on du nom de celui qui l'a bouclé réellement (Del Cano
1520) ? Les historiens bien entendu le savent, mais nous non.
Christophe Colomb a bien traversé l'Atlantique mais n'a pas
découvert le nouveau continent, ce seront ses lieutenants qui le
feront. Il n'empêche que nous retiendrons son nom comme le
découvreur de l'Amérique, sans trop chercher à comprendre
comment il se fait que l'Amérique ne s'appelle pas la Colombie !
Quant à Amérigo Vespucci il en va de même, c'est grâce à un
obscur cartographe français qui attribue le nom de Amérigo à
ses cartes sur le nouveau monde qu'on le fera entrer dans la
grand Histoire (Amérique vient de son nom: Amérigo). Pour
l'exploration du cosmos nous ne saurons jamais ce que
l'histoire lointaine en retiendra. Tout nous paraît important,
mais malheureusement notre idéologie encore trop marquée
par nos rapports conflictuels entre Est et Ouest biaise notre
jugement. Personne ne peut dire dans quel ordre Youri Gagarine
ou Neil Armstrong entreront dans ce genre de grande Histoire.
Peu nous importe donc, d'autant que l'exploration du cosmos
ne s'arrête pas, et il y a même tout intérêt si l'on veut qu'un
cosmonaute ou astronaute foule sous ses pieds le sol de
Charon avant la fin du XXI ème Siècle ou du suivant !
La Lune vue par les Soviétiques.
Si le programme Américain a mobilisé a juste titre toute notre
attention, les Russes n'en sont pas moins restés inactifs. Tout
d'abord contentons-nous d'énumérer chronologiquement ce que
nous percevons officiellement de cette exploration lunaire Russe.
Nous savons que nous ne saurons jamais pourquoi l'URSS n'a
jamais tenté le coup du vol circum lunaire qu'ils maîtrisaient, 'Exit'
donc les programmes Zond dont on entendra peu parler par la
suite. Par contre en parallèle avec les missions Apollo les
Soviétiques vont étonner les observateurs et experts occidentaux
par l'excellence de leur seconde voie lunaire.
Le temps des robots est arrivé. Les Luna vont reprendre du
service. Par exemple avec le Luna 15 l'URSS tente-t-elle de
ravir aux américains l'exploit de ramener en premier des
échantillons de roches lunaires. Lancée le 23 juillet 1969 la
sonde a 24 heures de retard sur le complexe Apollo d'Armstrong,
mais elle utilise une route plus directe du fait qu'il n'y a pas d'être
vivant à bord. Elle se place en orbite lunaire pour viser un point
de posé en même temps que le LM Américain.
La sonde automatique Luna-15 tente en vain de
damer le pion aux USA pour rapporter sur terre
des échantillons de sol lunaire le 20 juillet 1969.
(Dessin d'artiste inconnu)
Puis enfin elle commence son approche avec un peu d'avance
sur le LM, mais elle rate son alunissage et s'écrase au sol.
S'en est fini du maigre espoir de ravir cette première aux
Américains, mais avant la fin du programme Apollo les
Russes arriveront a récupérer des échantillons de petites
carottes de sol lunaire ramenées sur terre par un automate
prodigieux, lors de la mission Luna 16 le 8 septembre 1970.
La voie lunaire soviétique : Luna-16
va ramener sur terre une petite
carotte de sol sélène
(Dessin d'artiste inconnu)
Une autre expérience de robotique le 17 novembre 1970
sera appréciée par la communauté scientifique ; le robot
lunaire Lunokhod (756 kg), petite voiture (de la taille d'une
Renault 8), téléguidée depuis la terre, qui parcourra des
dizaines de kilomètres et survivra à plusieurs nuits lunaires
(pendant les nuits des températures de -200 degrés sont atteintes
pendant 14 jours !)
Le Lunokod-1 petit véhicule électrique soviétique, téléguidé
qui survivra à plusieurs nuits lunaires, et parcoura plusieurs
dizaine de kilomètres sur le sol de la Lune en novembre 1970.
(Photo agence de presse Novosti URSS)
pour reprendre ses déplacements le jour suivant ; quant
à Lunokhod 2 ce sera avec le même succés qu'il explorera
le cratère Le Monier en janvier 1973.
(n'oublions pas que les Américains aussi, dans le cadre du programme
Apollo feront déposer six mois plus tard par le LM un véhicule pour permettre
aux astronautes d'explorer leur zone d'alunissage).
Le Lunar Rover américain qui permettra aux astronautes US
du programme Apollo d'allonger leur rayon de prospection
sur la Lune. Ce véhicule a sensiblement la même taille que
le Lunokod soviétique. Il ne survit pas à la nuit lunaire.
(Photo NASA juillet 1971)
Le vaste programme Luna soviétique se déroulera du
12 juillet 1969 avec Luna 15 à sa fin avec le lancement de
Luna 24 le 9 août 1976. On y trouvera toutes sortes
d'automates depuis les retours d'échantillons de sol lunaire
sur le territoire Russe, en passant par les deux Lunokhod
qui parcourront de grandes distances sur le sol lunaire, sans
compter les satellites en orbite lunaire pour étudier de haut
l'astre des nuits.
Traces laissées sur la Lune par le Lunokhod Russe 1970
Doc BSI 1980
Traces laissées par le Lunar-Rover / Apollo USA 1971
(Doc NASA, 1971)
Nous avions appris, par quelques indiscrétions à l'origine
incertaine, que l'URSS avait tout de même mis en chantier un
programme lunaire avec pour objectif le posé d'un cosmonaute
sur son sol. Ce programme, sans nom, était basé sur la
construction d'une grande fusée, du même ordre de grandeur
que la Saturn 5 américaine (dont le papa semble avoir été le célèbre
Korolev (?)), mais qui se voulait plus simple et bien entendu moins
chère, la N1. Cette fusée fut testée à quatre reprises sans succès
à cause d'un incendie sur le premier étage lors du premier
lancement, et une extinction moteur sur le second étage lors du
deuxième test, etc. Il y a peut-être eu d'autres tests mais nous
n'en savons pas grand chose avec certitude, toujours est-il que
cette mission lunaire fut bel et bien annulée et sortie du
répertoire Soviétique avant la mission américaine Apollo-8 !
Dans le cadre d'un programme de vol lunaire
habité, les soviétiques commencent à lancer
en test en vol une grande fusée : la N1, le 21
février 1969. Ce programme sera arrêté sans
que l'on en connaîsse exactement la cause.
(Photo X)
On ne saura que bien plus tard les raisons de cet
arrêt à la course homme sur la lune ; mais l'absence
Russe dans cette course va étonner bien du monde.
Comment pouvaient-ils être absents d'un évènement
aussi important alors qu'ils n'avaient pas baissé les
bras dans la course à l'homme dans l'espace ?
La course soviétique dans l'espace était bien une
affaire qui confortait les militaires dans leur envie
d'assurer par tous les moyens une dissuasion envers
les USA. Mais pour eux l'homme sur la Lune était avant
tout synonyme de gaspillage de moyens techniques,
financiers, et surtout humains. Ils ont fait un fort lobbying
sur les politiques pour saborder le programme.
Comme par hazard les politiques n'étaient pas trés
convaincus de l'utilité de cette course eux même,
exceptés les indistriels qui eux poussaient dans
l'ensemble à cette aventure. Les politiciens du moment
ne surrent pas trancher en faveur des uns et des autres.
La touche finale à cet imbroglio a sans doute été la
guerre intestine entre les industriels pour prendre la
succession de Sergeï Korolev, décédé entre temps.
Il faut dire aussi que la mentalité Slave n'a rien à voir
avec celle des Américains. L'objectif scientifique Lune
était atteint grâce aux Lunik et Luna, les Russes avaient
montré qu'il maîtrisaient toutes les technologies pour
aller à la Lune et en revenir, pas besoin dans ces
conditions d'être les seconds dans un vol destiné à
marquer l'Histoire et jouer sur la corde de la propagande
(côté propagande ils n'avaient pas de leçon à recevoir des USA).
Pas la peine en plus de laisser tourner le compteur du
"Lune gap" en faveur des Américains pour un tel bilan
final. Peut-être à leur avis l'absence de cosmonautes
Russes au tour de la Lune ou sur la Lune serait plus
marquante qu'une médiocre présence. Et puis l'histoire
de l'exploration de l'espace allait continuer, et elle nous
réserverait encore bien des surprises.
Les Russes vont tout de même garder cette excellente
place de "leader" qu'ils avaient en partage avec leurs
adversaires Américains.
Un astronaute US sur la Lune comparé à la sonde Russe Luna-16
(Composition de l'auteur 2003)
Le train train des années soixante dix.
La suite et la fin du programme Apollo seront peu populaires à
l'exception de la mission avorté d'Apollo 13 dont le sauvetage de
l'équipage, à bord du CM Odyssey, attirera l'attention de tout le
monde pour un grand suspense médiatique qui finira bien. Nous
n'étions pas passés loin du drame absolu ; échaudés, les
Américains ne termineront même pas le programme, il sera
stoppé après la mission Apollo 17 où tout de même ils feront
une brillante démonstration de la maîtrise de ces missions
sur le sol de la Lune.
Fin des missions Apollo. Ici Apollo 17 en orbite lunaire
va reprendre le chemin de la Terre avec succès. Cernan
et Schimdt sont encore dans le LM, au moment de faire
l'arrimage avec le CM en décembre 1972.
(Photo NASA 1973)
Adieu la Lune et pour longtemps...
En plein déroulement du programme Apollo, le 19 avril 1971
la Russie lance discrètement un nouveau véhicule spatial du
nom de Saliout 1 (ce qui veut dire salut) Il s'agit d'un satellite en
orbite LEO de près de 18 tonnes, de 4.5 mètres de diamètre,
non habité, il a été lancé de la base habituelle de Baïkonour
par une fusée lance Proton SL-12. L'URSS dévoila la mission
de Saliout 1, c'était la première station orbitale. Leur grand
fantasme Slave allait enfin s'assouvir et Tsiolkovski pousser
un soupir de satisfaction dans sa tombe. Aucun défi n'a été
émis pour aboutir à une présence humaine permanente dans
l'espace, mais on sait bien que l'URSS en rêvait depuis le
début de l'aventure.
Dessin d'artiste du complexe Saliout-1 Soyouz
après l'arrimage du 23 avril 1971. (Doc X)
De leur côté les Américains n'ont pas semblé enthousiastes
sur ce sujet. Bien entendu ils savaient que la station spatiale
était le verrou final pour partir explorer le vaste cosmos
planétaire, mais ils savaient aussi que ce programme serait
long, cher, plein de remises en question, (catastrophe des navettes
Challenger et Colombia 1986 et 2003) et ils ne pensaient surtout pas
que les Russes soient capables de tenir un projet à long terme.
On avait donc le temps de ce côté-ci de l'Atlantique.
Avec Saliout en orbite, le 23 avril 1971 le Soyouz 10 est envoyé
en rendez-vous et réussit l'arrimage Commandé par V.Chatalov,
avec A.Elisseiv des vétérans, accompagné de N.Roukavitchnikov
un bleu, spécialiste de la station Saliout. Les trois hommes ne
pénétreront pas dans Saliout, mais ils se consacreront à des
manoeuvres avec le complexe Saliout-Soyouz.
Il faudra attendre la mission Soyouz 11 le 6 juin 1971 pour voir
un équipage pénétrer à bord de Saliout pour un premier séjour
de 24 jours. L'équipage est constitué du Commandant G.
Dobrovolski, avec V. Volkov et V. Patsaïev, ils vont équiper et
activer tous les éléments de la station orbitale, ils se livreront
à des tests médicaux et à des observations de la terre (avec
une arrière pensée militaire). Le 29 juin ils quittent Saliout 1 et
Vaisseau spatial Soyouz en orbite. C'est en largant le
module d'habitation qui est à l'avant du vaisseau qu'une
fuite d'air se manifestera et finira par tuer l'équipage
sans scaphandre du Soyouz-11 le 29 juin 1971.
(Photo SEP A-Colin 1994)
ils regagneront la terre le 30 juin où on les récupérera sans
problème, mais inanimés ! Tous les massages cardiaques
et autres bouche à bouche ne les ramèneront pas à la vie.
Les cosmonautes sont morts après la séparation du CM
Soyouz et du module orbital qui est toujours abandonné avant
la rentrée atmosphérique.
Au moment de la séparation une valve est restée ouverte ce
qui a fini par dépressuriser la capsule, et comme l'équipage
n'était pas équipé de scaphandre...
Voilà, au passage, le second drame de l'aventure spatiale
Soviétique.
De leur côté les USA découvrent enfin la faramineuse facture
à payer du programme Apollo. La NASA qui en est le chef
d'orchestre va essayer de sauver son crédit, mais le Congrès,
indifférent aux 'lobbies', va commencer a faire des coupes très
dures dans le budget consacré à l'exploration de l'espace civil.
Il reste deux fusées Saturn 5 en état de vol dans le VAB (Vertical
Assembly Building) de Cap Kennedy. La NASA reçoit l'autorisation
de convertir un des lanceurs pour placer en orbite son troisième
étage modifié à la hâte en station orbitale. Le projet Skylab est
né. Le 14 mai 1973, un mois après la mise en orbite de Saliout 2
(dont la durée de vie sera très brève) par les Soviétiques, Skylab est
mis en orbite. Après quelques avatars la station est opérationnelle
et compte tenu de ses imposantes dimensions elle va réussir à
faire vivre 3 équipages Américains de trois astronautes pour des
durées croissantes de un mois jusqu'à trois mois.
La seule station orbitale américaine opérationnelle
après sa réparation en vol en 1973. Ce sera la seule
expérience post Apollo directe. (Photo NASA 1974)
Les équipages seront amenés par une cabine Apollo CM
lancée par une fusée Saturn 1B (maquette de la Saturn 5). Cette
dernière fusée utilisera tous les éléments nécessaires à la
Saturn 5, compris même sa tour de lancement (le PAD 36).
La moisson Skylab sera très médiatisée et on découvrira que,
malgré un aménagement somptueux en comparaison du Saliout ,
les équipages vont rencontrer des problèmes nouveaux, même
impensables jusque là, tels que des crises de nerf imputables à
une mésentente entre les contrôleurs au sol et les astronautes.
La première grève d'un équipage se manifestera sur Skylab en
hiver 1973 1974 avec l'équipage M.Carr, R.Pogue, et G.Gibson
(une grève d'un jour). La station orbitale Skylab sera dotée d'un
module scientifique dédié à la magnétosphère solaire, il nous
donnera des images superbes de la couronne et de l'atmosphère
de notre étoile. Plusieurs EVA seront d'une part nécessaires à la
re-mise en état de la station, et aussi pour des expériences dans
le vide spatial. La encore, la difficulté de se mouvoir dans
l'espace fera faire des progrès à leurs adversaires Soviétiques,
qui vont reprendre la tête de l'exploration humaine du cosmos,
avec le programme de station orbitale.
La moisson Soviétique.
Avec le programme de station orbitale lancé dès 1968 les
Soviétiques vont découvrir l'incroyable difficulté a adapter
les humains aux vols au long cours en orbite terrestre. Les
EVA de Leonov d'une part et surtout des Américains sur
Gemini les avaient alertés sur l'adaptation délicate de
l'homme pour le travail physique en apesanteur. Les
missions Soyouz du 20 octobre 1968 avec Beregovoï
sur Soyouz 3 et Soyouz 2 (vide), puis la mission de
Chatalov sur le Soyouz 4 du 14 janvier 1969 suivit du
Soyouz 5 de Volinov, Elisseiv, Krounov le lendemain nous
permet d'assister lors d'une EVA à un échange d'équipage
éprouvant.
Un rendez-vous avec arrimage entre deux vaisseaux
soviétiques Soyouz le 16 janvier 1969. (Dessin X)
La mission Soyouz 6 et 7 de septembre 1969 avec six
cosmonautes dans l'espace, présagera encore une
spectaculaire opération. Mais certainement des difficultés
abrégeront la mission des deux vaisseaux spatiaux. Ce
sera donc avec les réelles stations orbitales des missions
Saliout que les Soviétiques vont découvrir l'ampleur du
problème.
Pour autant pas plus Russes qu'Américains ne vont
totalement abandonner l'exploration du cosmos planétaire.
Déjà évoqué le programme Luna Russe va s'étendre
jusqu'en 1976 de façon régulière. Il va permettre une
contribution importante de l'URSS à la connaissance de
la Lune. Il faut noter au passage que les 350 kg de roches
lunaires rapportées par les astronautes US et le petit kilo
de carottes de terre lunaire rapportée par les Luna d'URSS
dorment toujours dans des placards des USA et de la
Russie en attendant encore au début du 21ème siècle
des chercheurs très intéressés !
Mais le grand moment des explorations lointaines arrive
enfin. Les progrès technologiques en matière de contrôle
des vaisseaux spatiaux, les moyens de communications des
réseaux de surveillance de l'espace lointain dont le célèbre
DSN (Deep Space Network, réseau de surveillance lointaine américain)
Parabole de Godstone. Elle apartient au réseau US
Deep Space Network (DNS). C'est avec ces antennes
que les USA vont accumuler de brillants succès planétaires
en ramenant sur terre les images du système solaire.
(Photo USIS 1979)
vont permettre d'envisager de donner l'assaut à toutes les
planète du système solaire. Mercure toujours délicate à viser
car très proche du soleil, Vénus et sa mystérieuse fournaise,
Mars la lointaine petite Terre, Jupiter la géante molle et ses
satellites telluriques, Saturne et son mystérieux anneau et ses
satellites, Uranus, Neptune lointaines et presque inconnues
de nos astronomes, enfin aux confins du système solaire :
Pluton et son satellite Charon qui sont à la limite de la
seconde frontière, celle ou fini notre système solaire, celle
où commence notre espace galactique, celui des étoiles
qui illuminent notre ciel d'été de façon si dense que l'on
croit voir une bande de lumière (que l'on ne voit plus à l'oeil nu
que dans les campagnes isolées des grandes agglomérations, à la
pollution lumineuse trop forte) dans le ciel.
Aussi bien en URSS qu'aux USA nous allons voir se
développer de grands programmes d'exploration de ces
planètes dans une apparente association, consistant à se
partager quelques expériences (?). Tout d'abord honneur
aux Russes avec l'assaut sur Vénus, suivit des Américains
avec l'assaut Martien, dès 1960.
Chez nous c'est grand.
OVNI sur Mars et Vénus.
Vous souvenez-vous de cette mystérieuse épidémie d'observation
de phénomènes lumineux dans les espaces aériens de bien des
pays industrialisés dans les années cinquante ? Aux USA des
rapports d'enquête (le célèbre rapport Condon sur ce sujet restera comme
un modèle de bêtise) "bidon" réussirent même à rendre ces
phénomènes plus crédibles que jamais. Qu'auraient alors pensés
des Martiens observant le ciel en ces jours de juin 1976 et voyant
atterrir un bizarre engin soufflant des gaz et une fois au sol animant
des bras inquiétants pour gratter la terre ? Heureusement il n'y avait
pas de Martien pour accueillir les landers des deux sondes Viking
américaines posées en douceur sur le sol Martien.
La sonde martienne Viking sur le sol de la planète rouge (juin 1976).
(Photo de l'auteur, Foire Exposition de Seville)
Ce n'était pas la première fois qu'un engin terrestre se posait en
douceur sur la planète rouge. Lancée le 28 mai 1971 la sonde
Soviétique Mars 3 se posa en douceur sur le sol Martien 9 mois
plus tard. Elle commença à émettre une image TV lorsque la
transmission fut interrompue et on entendit plus jamais le son de
ses émetteurs !
La sonde Mars-3 en vol vers Mars Une fois posée sur le sol martien, la
lancée en mai 1971. sonde a cessée d'émettre rapidement.
(Dessin auteur inconnu 2000) Panne électronique ou météorologie ?
Certes un vent violent souffalit se jour là, c'était une monstrueuse
tempête. Pourtant il a peu de chance que Mars-3 ait succombé
directement pour cette raison. Sans doute un puissant phénomène
électromagnétique en est plus surement la cause (électricité statique)
effectivement générée par ce vent violent et sec (?).
Les Soviétiques rééditèrent ce vol avec Mars 6, lancé le 5 août
1973 mais qui échoua dans les mêmes conditions que Mars 3.
L'engin s'est posé sur le flanc d'une profonde vallée (Vallée Samara),
peutêtre a-t-il dévallé la pente (?).
C'est avec Mariner 9 lancé par les USA que l'on compris
combien le vent pouvait être violent sur Mars (près de 400 km/h) et
imprévisible. Mariner 9 lancé le 30 mai 1971 fut mis en orbite
Martienne pour ausculter la surface de la planète et dresser une
bonne cartographie de la planète afin d'étudier des sites pour les
sondes futures qui devraient se poser comme les Viking dont on
parlait déjà. Si la panne de Mars 3 est très probablement due à
un effet Corona, il n'en va pas de même pour Mars 6 dont on ne
s'explique pas le silence une fois posé sur le sol Martien. Peut
être l'engin s'est-il posé sur un plan trop incliné de la vallée Samara
ou sur un gros caillou et a bêtement basculé aussi, ou alors plus
simplement après l'atterrissage un des composants électroniques
a laché et ce fut la panne (?).
Toujours est-il que la leçon a porté et les USA vont s'entourer de
précautions pour les deux missions Viking lancées respectivement
le 20 août et le 9 septembre 1975, elles voyageront 9 mois avant
de rejoindre la planète 4 du système solaire. Mais tout d'abord
Mariner 9 qui avait cartographié le sol avait permis de sélectionner
quelques points de poser. On a donc choisit au JPL (Jet Propulsion
Laboratory, un laboratoire de recherche de la NASA spécialisé dans la
construction de sonde planétaires) les endroits les plus plats et les moins
exposés aux tempêtes. Avec l'arrivée en orbite Martienne l'orbiteur
a analysé la météorologie et on a décidé au dernier moment quel
était le point de posé idéal ; les landers ont été largués et se sont
posés sans encombre. Sur les images renvoyées directement sur
terre par Viking 1 on distingue à quelques mètres de la sonde un
gros rocher qui aurait sans doute anéanti la mission de cette
dernière si par hasard elle s'était posée dessus.
Aucun doute ce rocher photographié par Viking
sur le sol martien aurait pu faire capoter le
lander s'il s'était posé dessus en mai 1976.
(Photo NASA 1976)
La chance aussi est un argument dans l'exploration de l'espace.
Par contre la moisson Russe Vénusienne est meilleure.
Survol de la belle et mystérieuse planète, largage de ballon
dérivant dans son atmosphère (mission Franco Soviétique).
Largage et atterrissage de landers qui renvoyèrent pendant
quelques instants des images et des données du sol Vénusien
avec des conditions atmosphériques épouvantable pour notre
technologie, gaz CO2, pression atmosphérique comparable à
celle des grands fonds marins terrestres, température de plus
de 450° C, luminosité très faible à cause d'épais nuages qui
cachent en permanence le sol. Malgré cet environnement les
sondes Vénéra 9 et 10 larguèrent chacune une capsule qui
se posèrent en douceur dans cet enfer et renvoyèrent quelques
images du panorama Vénusien, elles furent lancées d'URSS
respectivement le 8 juin 1975 et le 14 juin 1975.
Une vision de l'enfer : température au sol + 480 deg C, pression
équivalente à celle que l'on rencontre à 500 mètres sous la mer.
(Photo sonde Venera-9, URSS, BSI, Novosti, 1977)
Les Américains envoyèrent la sonde Pioneer Venus 1 le 20 mai
1978 et Pioneer Venus 2 le 8 août 1978 pour analyser l'atmosphère
de la belle, les Soviétiques lanceront avec succès Vénéra 14 pour
parfaire l'analyse du sol de la mystérieuse planète le 4 novembre
1981. Mais c'est avec les lancements des sondes Vénéra 15 et 16
(construites par M.Borissov) les 2 et 7 juin 1983 que commencera une
cartographie du sol. Elles sont équipées de radar à balayage
latéral qui ont une résolution de 1 à 2 Km. Cette cartographie du
sol de la planète se terminera de façon remarquable et encore plus
précise grâce à la sonde radar américaine Magellan (le choix de la
mission, du type d'orbite, du radar, et du traitement d'image seront un modèle
pour la communauté scientifique et aérospatiale). C'est ainsi que l' élan se
terminera pour le 20ème siècle en ce qui concerne l'exploration de
la seconde planète de notre Soleil.
Pour la planète Mars on allait encore connaître des hauts
des bas. Après le très spectaculaire succès des deux sondes
Viking de 1976, Russes et Américains lancent un assaut concerté
à l'aide de Mars Observer, et des sondes Mars Phobos
(en coopération Franco Soviétique). Le lancement des deux sondes
d'URSS, les 7 et 12 juillet 1988 se passe bien jusqu'à ce qu'en
plein milieu du trajet, une erreur de programmation télécommandée
de la terre fasse perdre le pointage solaire de la sonde Mars
Phobos 1 avec interdiction de répondre aux ordres suivants
(cela restera un cas d'école en matière de sécurité pour les informaticiens du
monde entier), perdue Phobos 1, et mise en orbite réussie de
Phobos 2 qui cartographiera en visible et infrarouge à très haute
résolution une partie de la planète, mais surtout elle poursuivra le
satellite de Mars, Phobos où elle devra larguer un petit lander
sur le sol du satellite Martien. A quelques centaines de mètres
du satellite la sonde perdra le contact avec la Terre.
La sonde soviétique Phobos-1 lancée vers Mars le
7 juillet 1988, elle sera bêtement perdue en route.
(Photo BSI Tass 1989)
Dernière image avant l'accident survenu à la sonde
martienne soviétique Mars-Phobos-2, lors de son
approche pour le largage d'un atterrisseur sur le
satellite de la planète rouge. (Photo BSI Tass)
Peut être est-elle entrée en collision avec Phobos ou une
panne de communication mettra un terme à l'expérience.
Quand au Mars Observer Américain lancé le 25 septembre
1992, il tombera en panne de communication lui aussi sans
autre explication.
Echec et Mars ; il y a aussi des malchances en série...
Heureusement en 1998 les USA réussissent une magnifique
mission, Mars Path Finder (mais en utilisant un vol direct). Un lander
se pose à l'endroit prévus et débarque un petit véhicule de
quelques décimètres cubes qui va transmettre d'excellentes
image du sol tout au tour du lander pendant plusieurs jours.
La nouveauté viendra de ce que tous les moyens de
communications seront mis a contribution pour diffuser les
images en direct. Même le nouveau réseau Internet (réseau
de réseaux numériques, maillé sur le monde entier) sera utilisé avec
un grand succès dans le monde. En 1999 seule la sonde
américaine Mars Express Surveyor est en route pour la
planète rouge. Les Soviétiques ne sont plus là pour lui
donner la réplique et le nouveau régime Russes qui les
remplace n'a plus les moyens de sa compétence pour
continuer l'exploration de l'espace cosmique. On ne peut
pas avoir le beurre et l'argent du beurre (le régime dictatorial
Soviétique fonctionnait en économie de guerre, et le régime Russe a
opté pour une économie de marché libérale qui a ruiné le pays en
quelques années). En octobre 1999 la sonde américaine Mars
Climate Orbiter nous vaudra aussi une belle gaffe, comme
Mars Phobos 1, une erreur de standard de mesures (mètres
et Yard) précipitera la sonde au sol au lieu de la mise en
orbite Martienne. Quant a la sonde Mars Polar Lander
lancée en 1999 des USA, ce sera l'écrasement au sol pur
et simple sans explication le 3 décembre 1999 au pôle
Sud de Mars.
Les USA renoueront avec le succés lors du posé de
deux 'lander' mobiles en 2004 et qui seront encore
actifs fin 2006, il s'agit des 'rover' Opportunity et Spirit.
MER-1 posé sur le sol de la planète rouge le 3 janvier 2004.
Dessin originaire du JPL/NASA 2003
Le grand tour.
Les Soviétiques vont rester somme toute assez classiques et
même très conservateurs dans leur exploration du cosmos.
Aussi ils resteront sourds aux sirènes du grand tour que les
Américains ne rateront pas. En étudiant les éphémérides des
planètes du système solaire ils remarquèrent quelques
exceptionnels alignements virtuels qu'une sonde pourrait utiliser
pour bondir vers les confins de notre système planétaire. A ces
dates une sonde envoyée vers Jupiter bénéficierait de sa
gravitation pour accélérer vers Saturne qui à son tour grâce à
son attraction gravitationnelle relancerait la sonde vers Neptune
puis Uranus. Rapidement le JPL de la NASA réalise les sondes
Pioneer 10 et 11 et met en chantier les célèbres sondes
spatiales Voyager 1 et 2. Pioneer 10 est lancé le 3 mars 1972
et Pioneer 11 sera lancée le 6 avril 1973 un an plus tard pour
bénéficier d'un autre alignement. Les deux sondes sont dotées
d'un générateur nucléaire qui les met pour plusieurs centaines
d'années à l'abri d'une panne de courant électrique. Les
sondes sont équipées d'un imageur avec plusieurs objectifs à
haute résolution (téléobjectif et grand champ). Les deux sondes
vont voyager sans encombre jusqu'au près de la grande
planète Jupiter qu'elles photographieront ainsi que ses satellites,
puis elles prendront deux routes différentes par la volonté des
contrôleurs du JPL sur terre. Ces sondes sont désormais
extrêmement loin de nous, cela se compte en dizaines de
milliards de kilomètres, et pour l'une qui sera encore active
en 2003 ce sera même le grand saut puisqu'elle a franchi la
grande frontière ayant atteint pratiquement la troisième vitesse
cosmique (42 km/s) qui lui fera quitter le système solaire en 1982.
Elle voyage désormais à plus de 120000 km/h vers l'étoile
Proxima du Centaure qu'elle atteindra dans 3.000.000 ans. Sa
balise radio est en marche et elle est régulièrement captée par
le JPL via les antennes du DSN des USA. Cette balise sera
encore active pour 400 ans grâce au générateur nucléaire qui
l'alimente en énergie électrique. Vous rendez vous compte que
lorsque les terriens recevront ses derniers signaux, l'aventure
de Spoutnik (l'aventure du 20ème siècle) sera aussi loin d'eux que
l'est pour nous la bataille de Marignan (qui est-ce qui l'a gagné au
fait cette bataille de 1515 ? ... François 1er) ! Pour le moment les sondes
Pioneer 10 et 11 foncent dans notre galaxie dans un ciel étoilé
de toute part, et pour elles notre Soleil n'est plus qu'une étoile
parmi les milliards d'autres qu'elles perçoivent...
Malheureusement en 2003 le contact sera définitivement perdu
avec Pioneer 11 à cause de la faiblesse de ses signaux et des
moyens mis en oeuvre sur Terre pour les capter.
La sonde Voyager I, on notera sa grande antenne parabolique
et son bras porte instruments dont les caméras et le radiomètre
sont ici visibles en haut à gauche de la photo. (Doc JPL / NASA)
Mais c'est avec les deux sondes Voyager que les USA vont
réussir cette grande mission de prospection des planètes du
système solaire. Elles nous renverront des séquences
photographiques en mode numérique extraordinaire de Jupiter,
Saturn, Uranus et Neptune et comme leurs prédécesseurs elles
vont maintenant quitter petit à petit le système solaire, pour aller
chanter aux étoiles notre présence. En 2006 on toujours le contact
avec les sondes US Voyager 1 et 2.
La route est longue...
Les navettes.
Dans les années soixante dix, les USA nous avaient fait découvrir
en test aérien, ce qu'étaient ces fameux corps portant ; d'une part
avec l'avion fusée North American X15 (1960), et d'autre part avec
les Lifting Body de 1963 (les ailes sont remplacées par un large fuselage
à la limite de l'aile volante dont ils sont inspirés). Pour nous, le mot avion
était d'abord synonyme d'ailes, quelles soient droites comme celle
du T33, en flèche comme celle du Republic F105 Thunderchief,
courtes comme celles du Lockheed Starfighter F104, longues
comme celles du B36 Stratoforteress, hautes, basses, en V inversé,
en Delta comme le Convair F106 Delta Dart, etc, mais ne pas avoir
d'aile, pour un avion, c'était contre nature, et voila comment se
présentaient pourtant à nous ces avions testés à la fin des années
soixante dix. Certes le X15 disposait de petites ailes droites
comme celles du tristement célèbre F104 StarFighter (pour l'Armée
de l'Air Allemande en tous cas) mais en fait on voyait que le fuselage
très élargi participait aussi à la portance du vaisseau spatial.
Quant aux Lifting Body il n'y avait même plus d'aile, c'était tout
le fuselage élargi qui participait à sa portance, et c'est comme
cela que l'Amérique envisageait la future navette spatiale.
Trois prototypes d'avion à corps portant qui auraient pu
déboucher sur un projet de navette aérospatiale.
(Doc USAF 1973)
Thor Douglas et navette ASSET pour vol balistique
(Doc USAF 2000)
Les Russes qui en matière technologique ne faisaient pas
toujours dans la nuance, avaient déjà mis en chantier une
mini navette de recherche technologique qui, sous le nom de
Cosmos Bor-4, leur avait permis de tester différentes formes
de profils de corps portant en orbite dès 1976. Plusieurs
récupérations de navettes dans l'océan Indien avaient permis
aux Australiens de filmer, depuis leurs avions espions Orion,
les différents modèles testés en vol spatial dès 1977.
Cosmos 1445 Bor-4 la petite navette soviétique Une autre récupération de Bor-4
sans pilote qui est ici photographiée lors de sa (Photo même origine)
récupération en mer après un vol orbital (1977)
(Photo Ministère des Armées Australien 1988)
Tous ces tests aériens et pilotés pour les Américains et spatiaux
sans pilote pour les Soviétiques aboutirent à une prudente
décision, les navettes seraient construites sur un modèle
d'avion bien classique avec ailes delta à profil évolutif, un peu
comme celui essayé sur l'avion Anglais British Aircraft
Corporation BAC 221 en 1960, et bien entendu, avec du
corps portant en plus.
Plan de la navette aérospatiale américaine du
programme STS (1978). (Doc NASA)
A la suite d'un imposant programme les Américains testent
en vol aérien piloté, d'abord, puis en vol spatial avec mise en
orbite de la navette Colombia le 12 avril 1981, elle est pilotée
par le Commandant John Young un vétéran (Gemini et Apollo)
et le copilote Robert Crippen un bleu. Le décollage de la navette
américaine sera un grand moment télévisuel car la puissance
des boosters à la mise à feu sera impressionnante.
Tests aérien piloté de la navette Colombia en 1980 sur la base
US d'Edward ; elle est ici accompagnée d'un Nortrop T-38 Talon.
(Photo NASA 1980)
On attendra pas de réponse des Soviétiques, car les Américains
arrivent à nous convaincre que le niveau technologique de la
navette ne peut être maîtrisé que par la plus grande puissance
du monde, à savoir, eux. Dont acte et 'exit' les Soviétiques du
programme de navette; qu'ils restent donc avec leurs primaires
Soyouz (notons que l'on sera bien content de les avoir encore en 2006).
La propagande sur la guerre des étoiles va enfin pouvoir donner
sa pleine mesure.
Si les Soviétiques n'ont pas trouvé utile de participer au programme
homme sur la Lune, même en seconde place, les Luna et les Zond
ayant à leurs yeux valeur de savoir faire potentiel, il n'en va pas de
même pour les navettes. Cet engin au début des années quatre
vingt est considéré comme la cheville ouvrière pour déployer les
éléments de la future guerre des étoiles que souhaitent les USA.
Tout en continuant à travailler très durement sur le programme de
station orbitale, les Soviétiques vont aussi développer la navette
comme véhicule de la stratégie de dissuasion adaptative moderne.
La navette américaine est un véritable chef d'oeuvre de technologie.
Cinq exemplaires seront fabriqués par les USApour être crédibles ;
car en plus de son utilité dans la guerre des étoiles, et pour des
raisons d'économie (cela sonne bien aux oreilles du contribuable Américain)
ils ont persuadé le Congrès que ce véhicule, bien entendu réutilisable,
va faire tomber les prix des lancements de fusées au point de stopper
le développement des ambitions Européennes et Soviétiques.
Les yeux plus gros que le ventre...
L'industrie américaine produit donc les navettes : Columbia,
Discovery, Challenger, Atlantis, et Enterprise. La Société
Rockwell North Américan Aviation and Space Division en sera
le maître d'oeuvre avec la NASA. Le 12 avril 1981 la mission
STS 1 (STS=Space Transport System) est lancée avec le brio déjà
évoqué plus haut. J.Young et R.Crippen après quelques
manoeuvres en orbite LEO inclinée à 28 degrés sur l'équateur,
commanderont le retour qui se fera de façon parfaite avec un
atterrissage sur la base du centre d'essais en vol d'Edward
près de Los Angeles. Pour la première fois un équipage
revient de l'espace et se pose de la même manière qu'un
avion sur une piste. L'Amérique se sent très fière d'être la seule
à pouvoir concevoir enfin un véhicule spatial qui va permettre
de neutraliser les Soviétiques et de mettre l'espace à la porté
de tout le monde. Les missions vont se succéder aux missions
et au fil du temps les désillusions vont s'accumuler. D'une part
les Russes vont développer et même mettre en service un
système anti-missile qui va se révéler peu crédible certes
mais inquiétant. Pour boucler les accords SALT 1, il faudra
même négocier avec eux pour qu'ils neutralisent ce système
d'arme afin de garder une parité de dissuasion équitable avec
les USA. Mais ils ne trouveront pas d'accord sur les ABM.
(l'affaire du radar de Krasnoïarsk en sera un exemple surréaliste par la suite),
mais en jouant, avec une parfaite mauvaise fois, sur les accords
et règlements les Soviétiques donnent le coup de grâce au projet
de guerre des étoiles en testant en orbite un dispositif anti-satellite
(lisons bien entre les lignes : anti-navettes) basé sur un orbiteur tueur qui
est assez convaincant en novembre 1967.
Un document rare, l'interception de Cosmos 188 par
l'anti satellite Cosmos 186 (En fait on distingue sur
ce document ce qui sera la pièce d'amarrage et le
dispositif d'approche du Soyouz soviétique par la suite.
(Photo BSI 1988)
Vous souvenez vous de l'expérience de Cosmos 169 du
17 juillet 1967 et celle avec les Cosmos 188 et 186 du
27 novembre 1967 dont nous avons déjà évoqué l'originalité ?
C'est sur ce principe très amélioré que les Soviétiques réalisent
un satellite manoeuvrant rapidement et automatiquement et qui,
grâce à un radar de bord très puissant, repère sa cible, s'en
approche et se saborde juste à côté criblant d'éclats le véhicule
spatial adverse (Cosmos 188) ou tire une rafale de projectiles
inertes en direction de la cible (Cosmos 169). Au milieu des
années quatre-vingt ce système pourra être opérationnel et il
sera comptabilisé dans les négociations SALT de limitation des
armes stratégiques entre l'URSS et les USA.
Qui a dit: Lorsqu'on a pas d'ordinateur il faut avoir des idées ?
Les vols de navettes US vont faire apparaître un défaut majeur.
C'est que non content de ne pas être remises en état aussi vite
qu'espéré entre deux vols, le prix de cette remise en état va se
révéler prohibitif au point que l'Amérique elle même va renoncer
à lancer des satellites civils et surtout militaires par ce moyen
(d'autant que les échecs de mise en orbite GEO depuis la navette vont
être nombreux). Les militaires Américains avaient déjà sonné le
glas de la navette en enterrant le projet de guerre des étoiles tels
que venté dans la presse pour des raisons de de propagande,
ils abandonneront même le site de lancement pour les orbites
polaires de navettes sur la base de Vandenberg près de Seattle,
qu'ils venaient de construire et qui restera inutilisé. En catastrophe
les USA devront même réanimer des programmes de fusées
classiques (Titan, Atlas), ce laps de temps n'échappera pas aux
Européens qui feront leur entrée sur le marché du lanceur pour
satellite GEO de façon remarquée et remarquable (flière Ariane).
Lancement en 1979 de la première fusée Ariane
depuis la base de Kourou (KSC). Elle va ouvrir la
filière satellitaire européenne commerciale 1986.
(Photo CNES 1979)
Le comble sera atteint lorsque les Soviétiques (à l'agonie pourtant)
lanceront la navette Bourane qui se présentera comme une réplique
astucieuse des navettes US. Le 15 novembre 1988 propulsée par le
complexe Energia, la navette qui ne dispose pas de moteur de
puissance, sera mise en orbite en vol entièrement automatique,
sans équipage à bord. Après une rentrée atmosphérique sans doute
satisfaisante la navette se posera automatiquement sur une piste
de la base de Baïkonour sous les caméras de la télévision.
Avec une aérodynamique très proche de celle adoptée par les
américains, les soviétique mettent en oeuvre la navette Bourane
en novembre 1988. De dimension comparable à la navette US,
elle en est pouratant un net progrès dans son principe technique.
(Doc X)
Après ses trois tours de terre , sans cosmonaute, la navette
soviétique Bourane se repose à Baïkonour en vol entièrement
automatique, accompagnée d'un Mig-25. (Photo BSI 1988)
Cet exploit technologique exceptionnel, mais bien dans la tradition
Russee clôturera avec panache la période Soviétique de l'exploration
du proche cosmos. les Occidentaux minimiseront au mieux l'évènement,
mais on n'entendra plus parler de la guerre des étoiles (pour un moment)
qui aura coûté, pour rien, une fortune aux deux adversaires.
Et la perestroïka passera sur nos espoirs cosmiques (n'oublions tout de
même pas que ce changement de régime libèrera des peuples de trés mauvaises
dictatures)
La station orbitale et l'homme.
Autant l'Amérique nous aura ému avec son exploration du
satellite naturel de la terre (à juste titre), autant l'URSS va nous
habituer à la vie permanente de l'homme dans l'espace.
Nous vous rappelons que si l'URSS est bien la première à
avoir mis en service une station orbitale (Saliout 1 en 1971),
il ne faudrait pas oublier que l'Amérique a participé, au début
tout du moins, à cette aventure en plaçant en orbite terrestre
le troisième étage de la fusée Saturn 5 (la grande fusée lunaire)
habillé en station orbitale surnommée Skylab en 1973. Cet
énorme structure va permettre de confirmer les problèmes
de l'organisation de la vie à plusieurs dans un espace confiné,
comme déjà entre aperçu sur Saliout 1 et Soyouz en Russie
dès 1971.
Vous souvenez-vous que nous avions évoqué les malaises
de G.Titov pendant sa première journée passée dans Vostok 2
(le 6 août 1961) alors que son collègue Youri Gagarine était sorti
de son vol spatial sans problème. De plus, John Glenn sur
le vaisseau Mercury ne rencontra pas de problème majeur
pendant ses 3 tours de terre, pas plus que ses successeurs !
Comment analyser ce premier problème ?
Intérieur du petit vaisseau spatial Mercury
(Photo NASA 1965)
Nous comprendrons bien plus tard que les premiers Américains
dans les très étroites cabines Mercury n'auront pas assez de
repères et d'espace pour déclencher les malaises du 'mal de
l'espace'. Pour Youri Gagarine il faudra compter sur son court
vol spatial pour lui éviter les malaises. Mais avec Titov il en ira
autrement. La cabine Vostok est grande et Titov va se détacher
pour la première fois de son siège et flotter dans l'habitacle en
l'absence de pesanteur. Les éléments du mal de l'espace seront
réunit, mouvements de l'astronaute indécodables pour son
oreille interne, où se trouve notre centre de l'équilibre (notre
détecteur de verticale), son cerveau ne saura pas interpréter sa
position et les nausées se manifesteront en réaction.
Cabine du Vostok, on appercoit le casque blanc du
Cosmonaute, ce qui laisse apprécier l'habitabilité
du vaisseau spatial. (Doc BSI, d'un musée, 1985)
C'est le banal mal au coeur que nous ressentons en voiture ou en
bateau (par mer agitée) si nous n'avons pas de vision vers l'horizon
réel. Le mal de l'espace va affecter plus ou moins fortement tous
les astronautes, cosmonautes, et spationautes qui se déplaceront
dans l'espace dans une cabine fermée sans pesanteur. Cet état,
nié par tous les astronautes pour leur compte, mais trop heureux
de désigner leurs collègues comme étant les victimes de ce mal,
va affecter les premiers jours d'activité dans les stations orbitales
(en général le cerveau s'adapte au bout de quelques jours). Déjà constaté
de façon ennuyeuse par l'équipage Komarov, Feoktistov et Yegorov
sur Voskhod 1, le problème sera aigu pour l'équipage qui occupera
la station Saliout 1.
Ceci n'aura rien à voir avec l'accident qui leur coûtera la vie pendant
la rentrée dans l'atmosphère de leur navette Soyouz.
Avec l'expérience de Skylab les Américains vont découvrir ce grave
problème déjà constaté dans les cabines Apollo lors des voyages
lunaires. Ils se borneront à l'identifier et à essayer, en vain, de
sélectionner des candidats plus résistants au mal de l'espace.
Le complexe spatial Skylab avec son module taxi
Apollo. L'habitabilité de cette station était très
grande, mais les problèmes de promiscuité non
résolus à cette époque en limitaient le temps
d'utilisation à trois mois. (Doc NASA 1973)
Ce malaise n'est pas exactement comparable à celui ressenti
lors d'une séance de voltige aérienne, ou d'un tour de siège
tournoyant sur trois axes. En fait les Soviétiques (en partie) et
surtout les Américains se contenteront de pharmacopée pour
atténuer les malaises et jouer sur le temps. Il faut tout de même
noter que sous l'effet de ces calmants chimiques le cerveau ne
fonctionne pas au mieux de ses performances (somnolences),
ce n'est pas la meilleure solution. Pour certains équipages
finalement la proximité du 'sac pour mal de l'air' sera préférable.
Pour le moment le champion toute catégorie de la consommation
de ces sacs restera le journaliste Japonais invité (payant)
T.Akiyama sur la station orbitale Mir en décembre 1990, il en aura
même étonné l'équipage Russe pendant son séjour d'une semaine !
La vie à bord.
Si nous n'avons pas développé dans le détail les missions
Apollo dont on connaît les grandes lignes depuis longtemps,
nous allons insister sur les problèmes rencontrés dans la vie
sur les stations orbitales et restés confidentiels non pas à
cause des secrets d'Etat mais plutôt par l'indifférence que le
grand public accorde à cet aspect de l'aventure cosmique
pour les hommes. Les Américains qui faisaient dans le grand
spectacle spatial l'avaient bien compris en choisissant le
voyage lunaire comme exutoire face aux succès Soviétiques.
Certes les Soviétiques seront les premiers a percevoir les
problèmes de la vie en apesanteur soit sur les Vostok et
Voskhod soit sur Soyouz et Saliout. Mais l'ampleur du
problème apparaît avec les premières longues missions
sur la station orbitale américaine Skylab. En trois missions
les Américains vont réussir à faire vivre des équipages de
trois astronautes près de trois mois (de mission en mission).
Les malaises dus à l'accoutumance à l'apesanteur sont
bien cernés, et comme déjà expliqué précédemment il n'y
a pas de test au sol pour sélectionner les bons candidats ;
seule la pharmacopée sera un pis-aller. Mais le gros
problème va se révéler être l'organisation de la vie dans
un milieu très confiné et extrêmement inconfortable, même
si l'habitabilité de Skylab n'est pas le plus mauvais exemple.
(Attention les plongueurs en eau profonde connaîtront aussi des problèmes
dus à l'accoutumance, au confinement et à la promiscuité, sans compter
l'isolement ; n'oublions pas qu'ils sont plus loin de la surface de l'eau et de
l'air libre que les cosmonautes ne le sont du sol et du même air libre ! )
Nous trouverons les conflits avec les contrôleurs au sol, rejet
des planifications excessives, irritabilité entre les membres
d'équipage entre eux, dépression nerveuse, vont émailler les
missions aux longs cours à venir. Passée les tous premiers
symptômes, les Soviétiques vont prospecter toutes les
solutions possibles pour arriver à faire vivre des humains
assez longtemps dans cet espace et pour envisager peu-être
un jour l'acheminement d'un équipage sur Mars. Le voyage
martien se fait en vol libre (vol balistique sans propulsion) en neuf
mois aller. On peu penser que le temps de retrouver une
fenêtre de lancement pour le retour sur terre puisse prendre
trois à six mois aux quels il faudra rajouter neuf mois de trajet
retour, bilan: vingt quatre mois, soit deux années de mission !
Pour le moment si l'on prend en compte la mission Vostok 2
comme étant le début de cet apprentissage du temps passé
en orbite terrestre, jusqu'à la fin de la mission du complexe
orbital Mir en 1999, nous aurons expérimenté pendant près
de 38 ans des procédures pour passer de 24 heures à un an
et deux mois de séjour continu dans l'espace cosmique proche
de la terre.
Les voyages aux longs cours sont très ennuyeux...
Mais que se passe-t-il dans ces stations orbitales ?
Il nous faut décrire ce qu'est une station orbitale au début de
années soixante dix. La filière Soviétique passe par l'obtention
d'une navette, le fameux Soyouz, constitué d'un CM (Command
Module) de trois petites places, associé à un module orbital qui
lui n'est pas destiné à revenir sur terre. Bien entendu un SM
(Service Module) qui porte les réserves de carburant, les circuits
électriques (batteries et régulateurs) les moteurs d'ajustement
d'orbite, et les panneaux solaires. Ce véhicule servira de
station orbitale (à juste titre) puisque le module orbital,habitable,
ne revient pas sur terre. Accolés l'un à l'autres deux Soyouz
forment bien une toute petite station orbitale une fois arrimés
et pressurisés de façon égale (grace à une pièce d'amarrage type
femelle-femelle). Les cosmonautes peuvent passer d'un module
orbital à l'autre, soit par l'extérieur (EVA), soit par l'intérieur. Le
volume habitable est toutefois très réduit (cela représente le volume
de deux voitures de tourisme) et les cosmonautes vont commencer
à éprouver le stress du confinement et de la promiscuité
aggravé par les malaises du début du vol en apesanteur.
Comme on peut le constater le poste de pilotage du vaisseau
Soyouz est très exigu et le module d'habitation guère mieux.
C'est pourtant à partir de ce matériel que les soviétiques
commencent à défricher le problème de la survie au long cours
dans l'espace proche terrestre. (Photo BSI Novosti 1988).
La durée du vol ne pourra guère dépasser les quinze jours dans
ces conditions (autonomie du vaisseau comprise). Les conditions
hygiéniques sont un problème à résoudre au plus vite. Mais le
faible volume des deux Soyouz ne permet pas d'espérer de gros
progrès, aussi les Soviétiques lancent leur programme de station
orbitale Saliout en 1969 dans le plus grand secret. La mise en orbite
de Saliout 1 surviendra dans l'indifférence générale le 19 avril 1971
en plein déroulement du brillant programme Apollo.
Sur ce document d'A.Zak modifié JC Aveni on peut juger de l'habitabilité
du vaisseau Soyouz (module de commande et habitation module)
Attention en fait le programme Saliout en cache un autre bien miltaire
celui là qui porte le nom d'Almaz et qui doit permettre aux Russes de
déployer des flottes de vaisseaux habités dotés d'une longue autonomie
de vol saptial.
Coupe d'un module Almaz. (Dessin X, modifié JC Aveni 2003)
C'est à partir de ce premier instrument de travail que la conquête
du temps passé en orbite va enfin commencer sérieusement.
Avec de pénibles séjours de trois semaines, limités par le fait
que ces stations sont sans grandes réserves de carburant pour
garder leur orbite, et aussi à cause des réserves en fluides de
la station, et en systèmes d'évacuation des déchets, les Soviétiques
ne manqueront plus d'améliorer le confort des stations et leur sécurité.
Avec les missions américaines sur la station orbitale Skylab, plus
grande et déjà plus confortables que les Saliouts Soviétiques
(Skylab est construit dans le troisième étage vide de la fusée Saturn V), des
séjours de trois mois seront au programme, mais là, des problèmes
de vie à trois pendant un long séjour provoqueront des "frictions"
entre membre d'équipage, de même qu' entre les contrôleurs au sol.
Même un peu diminuée suite à la perte d'un panneau solaire
la station orbitale US Skylab va faire surgir toute une série de
problèmes pour faire vivre de façon acceptable 3 astronautes
tout un trimestre. (Photo NASA 1974)
Par exemple la charge de travail demandée à l'équipage
aboutira à des activité de plus de 14 heures par jour sans
repos dominical. Il a fallut un refus de travail d'un équipage
pour voir accorder aux astronautes le sacro-saint "week-end"
ce sera à cette occasion que les astronautes déclencheront
la première grève spatiale. A la fin du programme Skylab des
données précieuses sur l'organisation du travail dans la station
et hors de la station en EVA vont permettre aux soviétiques de
profiter de l'expérience américaine et de mettre en place de
nouveaux protocoles de gestion du temps à bord. Mais c'est
avec le ravitaillement en orbite par des cargos automatiques
que leprogrès sera le plus manifeste.
Vue écorchée du cargo de ravitaillement
automatique soviétique Progress (1978).
(Auteur du dessin inconnu, SEP-Colin)
Le 20 janvier 1978 le satellite Progress 1 part en vol automatique
pour s'arrimer à la station Saliout 6. Cela va permettre d'augmenter
la durée de vie en orbite de façon spectaculaires, grâce a ce
ravitaillement l'apport en nourriture, eau, carburant, courrier, pièces
détachées (destinées à la maintenance) et enfin l'évacuation des
déchets dans le cargo vide destiné à une destruction dans les
couches denses de l'atmosphère terrestre (les véhicules Progress
ne sont pas équipés de protection thermique dans ces premiers modèles).
Pendant que les Américains abandonnent l'activité humaine,
pour un temps, dans l'espace, à la fin des missions Skylab
(retombé sur terre en 1981) pour se consacrer aux missions
scientifiques et au développement du programme navette, les
Soviétiques vont rallonger, mission après mission, la durée
de vie de leurs cosmonautes dans l'espace. Jusqu'à des
séjours de trois à cinq mois, et en prenant sur eux les
cosmonautes arriveront à s'activer de façon opérationnelle,
moyennant une solide rééducation de quelques semaines
au sol pour qu'ils recouvrent tous leurs sens.
Poste de pilotage et de navigation du module Almaz/Saliout
(Photo Anatoly Zak 2003)
Avec la station Saliout 6 d'une part et surtout la station
Saliout 7 des progrès encore plus spectaculaires vont se
produire (présence de deux pièces d'arrimage). Des durées de
neuf mois seront même enregistrées pour certains
cosmonautes, mais encadrés par des équipages plus "frais"
venus en visiteurs car l'état nerveux de ces hommes les
disqualifierait pour assurer des manoeuvres délicates en
cas d'urgence. Sur Saliout 7 l'arrimage d'un module
supplémentaire va même permettre d'augmenter de façon
significative l'espace habitable et cet apport de confort
expliquera en partie les progrès sur la durée du séjour.
Sur ce document de gauche à droite on trouve le
Modulny qui double la surface habitable, il est doté
à son extrémité d'une capsule de retour sur terre.
Au centre on trouve la station orbitale Saliout-7,
et à droite le vaisseau taxi Soyouz pour le transport
des cosmonautes soviétiques et visiteurs.
(Doc URSS ? 1986)
Une nourriture un peu plus soignée et surtout plus
présentable sera également un facteur décisif sur ces
progrès. Des conditions d'hygiène plus normales feront le
reste. Il est à noter également que la visite d'équipage,
régulièrement, en plus de celui qui est de permanence
contribuera aussi à garder un état psychologique des
cosmonautes plus équilibré. Ce sera avec le lancement
de la station orbitale Mir le 20 février 1986 que les
Soviétiques marqueront un pas décisif dans les opérations
de survie d'équipages de cosmonautes dans l'espace
proche de la Terre.
La vie sur Mir.
Avant d'envisager la vie sur Mars il faut envisager la vie sur Mir
(Mir veut dire paix). Avec l'expérience acquise grâce aux missions
Saliout (on verra même un spationaute français invité pour un séjour d'une
semaine sur Saliout 7, c'est le Colonel Jean-Loup Chrétien, pilote d'essai)
les Soviétiques vont concevoir Mir comme une station modulaire
extensible à cinq modules en plus du corps central, complétés,
pour achever le complexe spatial, d'une navette Soyouz et d'un
cargo de ravitaillement Progress (dont une version sera même dotée
d'une capsule récupérable sur terre).
Image de composition montrant la station
orbitale Russe Mir dotée de tous ces modules
d'habitation et de travail. Le module à l'extrème
droite est la pièce d'arrimage des navettes américaines.
(Montage digital NASA 1998)
Avec cet ensemble, qui ne sera totalement assemblé que dix
ans plus tard par les Russes et les Américains, des progrès
étonnants vont se dérouler jusqu'au 27 août 1999, date de
l'abandon de cette station. Pour le plus long séjour c'est avec
le cosmonaute Dr Valeri Poliakov que l'année plus deux mois
sera franchie en vol non stop. Pour ce faire un entraînement
extrêmement rigoureux et un environnement psychologique très
soigné, dans lequel par exemple la présence de la cosmonaute
Héléna Kondakova, pour les six derniers mois de ce vol
marathon, va sans doute jouer un rôle non négligeable dans
cette expérience. Il est à noter que Poliakov paraîtra plus en
forme au retour sur terre, à la sortie de la navette Souyouz,
que sa consoeur Kondakova !
Supporter un vol spatial pendant 3 mois avec cette
promiscuité donne tout son sens au problème des
missions spatiales aux longs cours.
(Doc BSI /Saliout-6,1988)
Il n'y a pas que la durée qui oblige à des organisations
particulières, il y a aussi la maintenance de la station qui va
vers la fin de vie du complexe orbital prendre le pas sur le
temps consacré aux expériences scientifiques. Les EVA
vont faire des progrès extraordinaires en durée et en
efficacité.
L'astronaute US Mc Candless teste au
large de la navette le fauteuil MMU.
(Photo NASA)
Les expérimentations en mécanique (déploiement
de structures métalliques comme par exemple l'antenne d'un petit
radio télescope) vont faire ressortir des difficultés insoupçonnées
qu'il y a à manipuler, lier, souder, déployer, et rigidifier des
éléments, pourtant si simple à monter en gravité terrestre.
Le Droit va progresser aussi car cette station va s'ouvrir aux
vols internationaux, dans lesquels les Américains vont prendre
une part très active ; il va falloir définir des règles claires pour
vivre en société. Par exemple quelle sera l'heure adoptée sur
Mir, comment s'organisera la durée du travail, qui sera
responsable de quoi, quelle langue sera parlée a bord, quel
droit des télécommunications sera la règle, etc.
Sur Mir les Russes et Américains subiront d'instructifs drames
comme l'incendie, les pollutions de l'atmosphère, les quasi
collision et collision, la dépressurisation, les conflits entre
équipages mixtes (russes et étrangers), et même les surprises
politiques comme le départ du cosmonaute Krikalev sous
régime Soviétique et son retour sur terre sous le nouveau
régime plus libéral à économie de marché !
Pour financer la continuité du vol de Mir les Russes vont même
quasiment vendre leur station aux Américains, qui sous
juridiction Russe, vont expérimenter avec leurs navettes (les
navettes vont enfin jouer le rôle pour lequel elles ont été conçues en 1981)
les procédures indispensables pour organiser leur future station
orbitale Alpha (il s'agit du programme dit de Station Spatiale Internationale,
ISS). Ce seront les Américains qui paieront la mise en place des
deux derniers modules : Priroda et Spectre pour achever le
complexe Mir en 1996 !
Le complexe orbital Russe Mir et la navette US
arrimée pour un échange d'équipage en 1998.
(Photo NASA via Internet)
Le bilan Mir.
Le voyage Terre Mars dure neuf mois pour l'aller et autant pour
le retour, en empruntant les routes directes des Mars x russes
et des Mariner x américains des années soixante et dix. Un
séjour de trois à six mois sur le sol de la planète rouge suivit
d'un retour nous donnent une mission d'une durée de près de
deux ans.
Lorsque le module d'habitation principal de Mir est rangé !
(Photo RKA 1999)
A la fin du 20ème siècle nous maîtrisons tout au plus un séjour
de un an et deux mois en continu sans pesanteur et encore
avec des conditions de vie incompatibles avec la sécurité d'un
équipage livré à lui même sur une orbite Martienne. On imagine
mal, après une mission de six mois, un équipage épuisé
nerveusement comme celui de Tsibliyev et Lazoutkine de Mir 23
se posant sur Mars pour explorer pendant trois ou six mois le
sol de la 4ème planète et ré-endurer un vol de retour de neuf
mois. Impensable! Il ne faut pas oublier que naviguer seul loin
de la terre n'est pas pareil que survoler la terre tour après tour
avec des communications rapides avec le centre de contrôle
Tsup (centre de contrôle des missions Mir, près de Moscou), ou avec les
radio amateurs qui ont des stations partout dans le vaste monde.
N'oublions pas non plus les équipages des courtes missions qui
viennent régulièrement habiter la station et amènent nouvelles et
gâteries. Pour finir l'équipage sait qu'en cas de drame la station
peut être rapidement évacuée et le retour sur terre se fait en
moins de trente minutes. C'est rassurant, et pourtant voyez l'état
des cosmonautes a la descente du vaisseau Soyouz, après une
mission de six mois, presque tous sur des "brancards" incapables
de marcher.
Mars, cela épuisera.
Le progrès et les limites.
Avec la première mission de durée conséquente Gemini 5 de
G.Cooper et M.Conrad en 1965 on va inaugurer les problèmes
liés à la promiscuité. Partis pour un vol de 8 jours (durée d'une
mission Lunaire Apollo) la pile à combustible va tomber en panne
et en économie majeure d'électricité l'équipage va mettre en
sommeil l'équipement de communication avec la terre. Gemini
est un vaisseau spatial tout petit les astronautes restent assis
sans bouger sur leur siège, épaule contre épaule.
En vol orbital la cabine Gemini va permettre de faire ressortir
tous les problèmes d'habitabilité et de promiscuité qui vont
rendre ses missions très inconfortables. (Dessin de l'auteur).
Pour des raisons d'économie de carburant le vaisseau reste
en vol libre en rotation pour assurer passivement le contrôle
thermique, ce qui fait que les astronautes ont sous leurs yeux
un horizon terrestre qui tournoie sans arrêt à rendre malade le
plus endurci des vieux loup de mer. Comme les astronautes ne
bougent pas, ils ne se fatiguent pas, ils n'ont donc pas besoin
de beaucoup dormir. Sans dormir, sans bouger, avec un véhicule
roulant en permanence, sans communication avec la terre, le
décor est planté. Les odeurs corporelles naturelles vont
s'accumuler au nez des astronautes, l'apesanteur va même
aggraver les choses en laissant les odeurs à leur place, puisqu'il
n'y a pas de circulation d'air. On aurait pu espérer pour eux qu'au
moins les repas seraient une fête gastronomique, mais non, ce
sont des sachets "repoussants au goût à l'odeur et à l'aspect",
d'ailleurs il vaut mieux qu'il en soit ainsi car après la digestion
d'un bon repas il faut penser au bilan de matière fécale à gérer.
Les couches, pour les bébés c'est peut être bien, mais pour
deux astronautes côte à côte le changement de linge est une
épreuve autant malodorante que pénible à la vue. Au fait sur
Gemini il n'y a pas de poubelle ; les couches usagées restent à
bord dans des sachets. Alors les bons repas...
Sur cette photo on réalise très bien ce qu'à du être
la mission de 8 jours du vaisseau Gemini-5 avec
les astronautes Cooper Conrad en août 1965.
(Photo NASA 1965)
Vous avez compris le tableau ? Bien, continuons en augmentant
la durée du séjour. Avec les navettes Souyouz arrimées deux à
deux on commence à améliorer l'habitat; ici nous pouvons faire
bouger les cosmonautes, ajouter la mobilité permet de durer un
peu plus longtemps. On va passer de huit à quinze jours, mais
pour les mêmes motifs que précédemment on ira pas beaucoup
plus loin.
La mission Gemini-9 du 17 mai 1969 conduite par
Cernan et Stafford confirmera la difficulté des EVA.
(Photo NASA 1969)
Avec la mise en route de la première vraie station
orbitale Saliout 1 lancée par les Soviétiques en 1971 et surtout
avec la grande station orbitale Américaine Skylab 1 de 1973
nous allons découvrir un autre problème. Dans ce complexe
il y a une douche, des toilettes, des coins repos pour dormir,
tout semble aller mieux. Pourtant après un mois de travail à
bord vont apparaître des problèmes d'ordre relationnel entre
membre d'équipage, puis entre équipage et contrôleurs au
sol. La tension va monter sous n'importe quel prétexte, par
exemple on rend public un grave conflit entre l'équipage
Skylab 3 et le sol pour un emploi du temps qu'ils jugent à
bord trop important et contraignant. Une grève sera même
déclenchée et en réponse le responsable du vol au sol, Alan
Shepard (le premier astronaute Américain) qui est leur Cap-Com
va leur envoyer un blâme public sur les ondes radio.
Les Soviétiques vont connaître les mêmes problèmes ;
eux aussi améliorent les emplois du temps, offrent même
des jours de repos comme le "sacro saint week-end", ils
agrandissent l'habitabilité des modules Saliout successifs
sans pourtant constater un très gros bénéfice de durée de
vol efficace, avant que ne se posent les problèmes déjà
évoqués plus haut.
Ce sera avec le Saliout 7 que des progrès significatifs vont
être faits. Tout d'abord avec la mise au point du ravitaillement
automatique de la station par des cargos de type Progress,
une sorte de Soyouz allégé qui transporte des fluides
comme l'eau, l'oxygène, les gaz des climatiseurs, le
carburant pour les moteurs d'attitude de la station, la nourriture
fraîche pour l'équipage, les pièces détachées pour la
maintenance, et enfin le courrier et autres gâteries familiales.
Il faut aussi rappeler que ce cargo de ravitaillement sert
également de remorqueur (ou pousseur) pour ajuster l'orbite
de la station.
Avec l'arrimage du Modulny (Almaz) la station Saliout-7 voit
son habitabilité doubler. Cela va contribuer à allonger
la durée de vol orbitaux de façon importante.
(Dessin par l'auteur)
Mais c'est avec l'arrimage d'un autre module de dimension
comparable au Saliout 7 que l'espace "linéaire" va être doublé
et que les hommes vont pouvoir s'éloigner les uns des autres
pour s'assurer un peu plus d'intimité. La durée des vols va
encore doubler, on passe à six mois et un peu plus même.
Mais un nouveau problème se présente, passé quatre à cinq
mois en orbite les cosmonautes vont se trouver prostrés sous
prétexte qu'ils leur semblent que la terre les oublie. Ils vont
même se désintéresser des messages familiaux que leur
retransmet le centre de contrôle Soviétique Tsup près de
Moscou. Certaine mission devront être même abandonnées
en cours de route pour ce motif, et ordre sera donné aux
équipages de revenir sur terre (le cosmonaute Laveikine du
Soyouz TM-2, qui à la suite d'une dure EVA sera rapatrié d'urgence
sur terre en août 1987) !
Oublié les quelques problèmes d'ordre vestibulaire donnant
un état nauséeux en début de mission. Oublié aussi le visage
bouffi avec le nez bouché par l'afflu de sang à la tête du début
du vol en apesanteur. Mais les phénomènes de décalcification
osseuse, les atrophies musculaires, vont engendrer des
inadaptations au retour sur terre qui vont obliger les Soviétiques
à faire suivre à leurs cosmonautes un constant entraînement
physique à bord de Saliout 7, équipé en conséquence.
Pour Gagarine à gauche et Glenn à droite
le mal de l'espace les aura épargné, soit
à cause de la courte durée de la mission
pour le premier, soit pour l'exiguité du
vaisseau spatial pour le second.
(Photo Novosti,USIS)
Comment faire mieux ? En février 1986 le lancement de la
station orbitale Mir va ouvrir un nouveau domaine de progrès.
Avec cette station spatiale équipée de douche, de toilette plus
efficace, de lavabo, d'un coin repas, de chambre avec hublot
et rideau, tout cela associé à un progrès alimentaire va
permettre de qualifier, à quelques exceptions près, les vols de
six mois. Pour ce faire on va ajouter à la liste des progrès déjà
cités celui de la visite d'équipages pour de courtes missions
avec relève de certain membre d'équipage. Cela va animer
les longues et fastueuses missions et redonner un peu de tonus
aux cosmonautes. Avec l'arrimage des cinq modules la station
va s'agrandir de façon importante, et pour la première fois des
cosmonautes vont se trouver dans des modules à partir desquels
ils ne verront pas le reste de l'équipage même avec les écoutilles
ouvertes.
Le module soviétique Kristal (19 tonnes) sera ajouté au
complexe Mir pour ouvrir un espace destiné aux
expériences de physique et augmenter la zone habitable.
Cela va grandement contribuer à l'allongement des
séjours humains dans l'espace proche terrestre.
(Photo BSI Tass 1989)
Cela sera très bénéfique pour diminuer la promiscuité
et l'on va envisager le vol d'une année. Le premier essai sera
une demi-réussite (durée de 365 jours, 22 heures, 40 mn) par
les cosmonautes Vladimir Titov et Moussa Manarov de la
mission Mir EO-3 (Soyouz TM-4) lancés le 21 décembre 1987
et qui reviendront sur terre extrêmement fatigués avec à la
clé une rééducation au sol assez dure. Mais par la suite
avec le Dr Valeri Poliakov (lancé le 8 janvier 1994) ce sera enfin
le succès il séjournera sur Mir pendant un an et deux mois,
et il reviendra sur terre en mars 1995 en aussi bonne forme
qu'un cosmonaute qui n'aurait passé que six mois à bord.
La physiologie féminine sera également étudiée sur Mir
mais les candidates sélectionnées seront beaucoup moins
nombreuses que les hommes car la station spatiale a été
principalement adapté à l'hygiène masculine (misogynie
toujours). Le plus long séjour d'une femme à bord de Mir
sera le fait d'une astronaute Américaine Lucid Shanon
"Mamie Shannon" en 1997 pour un vol de sept mois,
juste devant le record de la Russe Kondakova (lancée le
3 novembre 1994) pendant le vol "marathon" du Dr Poliakov
en 1995.
Qui se chargera de débaquer les cosmonautes arrivés sur Mars aprés
neuf mois de voyage, et qui se chargera de leur ré-éducation la bas ?
(Doc RKA 1997)
On a donc du mal à imaginer une mission Martienne en
l'état de l'art de la physiologie d'un équipage au long
cours. Sans doute Américains et Russes espèrent-ils des
progrès décisifs sur la toute nouvelle station orbitale ISS
(International Space Station), les mauvaises langues parlent
de la station "Ralpha" avec un 'R' comme Russia et Alpha
le nom du projet Américain. Au début de ce siècle c'est
plutôt le contraire qui se joue. Les Américains portent à
bout de bras cet ambitieux projet, et les Russes traînent
derrière, tristement, humiliés malgré quelques attentions
bien naturelles, concédées par l'Amérique.
Un détail qui n'aura pas échappé aux spécialistes et aux
observateurs attentifs, c'est l'énorme besoin de
ravitaillement d'une station permanente. Entre les
ravitaillements de l'équipage, les ravitaillements en
diverses ressources, la noria des cargos Progress sera
incessante. Le temps passé par les cosmonautes à la
maintenance de la station deviendra supérieur au temps
libre pour les expériences, et le maintien en bonne
condition sanitaire. La leçon vaudra bien entendu pour l'ISS.
Epilogue sur Mir.
Lancée en 1986 par les Soviétiques, cette station modulaire
était destinée à étudier l'utilisation pré industrielle de l'espace.
Ce "bobard" aura la vie dure aussi bien à l'Ouest qu'à l'Est.
En fait cette station va permettre d'effacer nos illusions quant
à un prochain vrai voyage cosmique dans le système solaire.
En l'état actuel l'homme ne peu pas vivre plus de six mois dans
un environnement aussi pénible qu'un vaisseau seul sur une
orbite solaire, sans communication, sans sauvetage possible,
sans repère visuel par les hublots, et enfin sans ravitaillement.
Cette station avait une durée de vie estimée à dix ans pour les
plus optimistes; elle restera en mission habitée en continu
pendant près de 15 ans. L'ordre d'abandon par la Russie,
incapable d'en assurer la maintenance par manque de moyen
et de compétence, sera donné le 27 août 1999, un dernier
équipage sera désigné pour donner le coup de grâce à la
station en avril 2000, et la chute sur terre se fera en mars
2001, dans le Pacifique Sud.
La fin de Mir lors de sa rentrée atmosphérique en 2002
(Photo NASA)
Pour l'Histoire on retiendra que Mir était encore en orbite au
début de ce millénaire !
Pour la petite histoire bien des observateurs se souviendront
avec émotion des apparitions de Mir au coucher du soleil ou
à son lever, le plus spectaculaire étant les rendez-vous visibles,
parfois, entre les navettes Américaines et la station orbitale.
Elles apparaîtront avec des magnitudes de -1 ou -2, l'une
derrière l'autre à quelques instants de l'arrimage (ce sera
spectaculaire pour les astronomes amateurs). Enfin n'oublions pas
que les radio amateurs du monde entier pourront dialoguer
avec les équipages en mission, car les astronautes seront
presque tous en possession d'une licence pour activer la
station radio amateur de bord SAFEX / MAREX (Mir
Amateur Radio Experiments).
Photo de l'auteur TK5GH en communication avec JP Haigneré
en mission sur Mir en Juin 2001 via la station radio de
F Becherini F1OKN. (Photo Radio Club F6KRD Marseille)
Ce lien sera d'une grande utilité pour les cosmonautes qui
l'utiliseront très fréquemment pour communiquer avec leurs
familles, ou pour contourner les déficiences du réseau de
communication radio officiel, parfois interrompu. Les
équipages des navettes US feront également appel aux
radio amateurs pour les mêmes motifs avec l'équipement
de bord SAREX (Shuttle Amateur Radio Experiments).
En conclusion sur Mir.
Auront séjourné à bord de Mir: 41 Russes, 44 Américains, 6
Français, 3 Allemands, un Afghan, un Autrichien, une Britannique,
un Bulgare, un Canadien, un Japonais, un Kazakh, un Slovaque,
un Syrien. Le nombre de passagers différents atteint 103, et le
cumul de temps de toutes ces communautés atteint 20 ans.
Attention, certains représentants de pays amis ne sont pas cités
car ces cosmonautes ont fait des séjours sur les stations orbitales
Saliout-6 et 7. Mir a permis de faire 79 EVA, le plus long vol
d'un cosmonaute est de 437 jours (V.Poliakov) pour ce XX siècle.
Fin d'une enrichissante aventure qui coûtait trop cher...
L'ISS de 2000.
Les USA avaient un projet, "récurrent" de grande station orbitale
dès le début des année quatre-vingt dix. Mais régulièrement le
Congrés "sabrait" dans le budget de la NASA pour le faire
capoter, il le jugeait d'autant plus inutile qu'avec la fin de la guerre
froide (1991) il pensait pouvoir temporiser cette course spatiale.
En plus de cet argument la réussite de la station orbitale Mir
n'engageait pas à faire un doublon.
Mais avec le vieillissement de Mir d'une part et l'effondrement
économique de la Russie d'autre part, la NASA réussit à faire
participer quelques pays alliés et anciens adversaires à un
projet de nouvelle station orbitale plus raisonnable et exploitée
sur une base juridique Internationale. La Russie qui était encore
prête à envisager la relève de Mir 1 par un module Mir 2, que
les Soviétiques avaient laissé sur les "étagères" avant de
disparaître, ne se fit pas trop prier pour participer au projet
Américain. La caution que représentait leur nom sur le contrat
était un gage de sérieux pour ce projet. Accompagnés mollement
par une Europe non convaincue, et un Japon plus enthousiaste,
soutenue par l'allié de toujours le Canada, plus quelques petits
pays (ils sont plus la pour allonger la liste que pour faire avancer le projet
technique), la NASA emporta enfin la signature du Congrés de
Washington. L'ISS était sur les rails à la fin de la décennie.
Honneur aux Russes avec le lancement par une fusée Proton
le 20 novembre 1998 du premier module (il s'appelait Zaria) de
cette station, suivit du module Américain Unity, lancé par une
navette (mission STS-88 de décembre 1998), pour se poursuivre
module après module jusqu'en 2006, date probable de la fin
de la structuration de la station Alpha . Il ne faudrait pas que
l'accident de la navette Colombia (2003) où que les nouveaux
engagements politiques du Président US G.W.Bush (2004) sur
les objectifs spatiaux (Lunaire et Martien) ne modifient ce plan.
Photo prise depuis la navette US Atlantis (STS-106)
le 9 septembre 2000. Sont visibles de gauche à droite :
Le taxi Soyouz, module Zaria, module Zvezda, module
PAM. (Photo NASA JSC 2000)
Les grands acteurs de ce projet sont par ordre d'importance :
les Américains maître d'oeuvre du projet, suivit des Russes qui
construiront et contrôleront des pans importants de la station,
des Japonais qui doivent apporter un grand module et sa
plate-forme de travail, de l'Europe qui offre un module et un
cargo de ravitaillement ATV avec enfin des accessoires aussi
bien affectés aux éléments Russes qu'Americains, le Canada
avec un important système de manipulation de charge, robotisé,
l'Italie qui en dehors du budget Européen offre deux modules
d'évacuation des déchêts) des systèmes d'antennes pour les
télécommunications et autres petits modules utilitaires, enfin
plusieurs pays offrent des services soit embarqués soit en
segment sol.
Photo montage d'image virtuelle de la station Alpha
ISS une fois terminée en 2005-2006. (Photo NASA)
Ce sont les Russes qui devront envoyer le premier équipage
pour une occupation permanente de l'ISS. Le départ en 2000
se fera sous commandement Russe dans un Soyouz, pour
passer, après arrimage la responsabilité à l'Amérique une fois
installé sur l'ISS (ce sera la mission Expedition-1). Des relèves
régulières d'équipage permettrons aux Américains et aux
Russes d'assurer le commandement de la station alternativement.
En fonction de leur investissement, les Etats qui auront participé
à la réalisation de l'ISS pourront obtenir du temps d'étude sur
la station dans différents secteurs du complexe Alpha.
L'installation des modules et le ravitaillement de la station sera
assurés par les navettes US. Les Soyouz russes achemineront
des équipages, et serviront de véhicule de secours grâce à
leur autonomie de six mois (arrimés à l'ISS). Le ravitaillement
complémentaire et urgent ainsi que les ajustements d'orbite
seront assurés par des cargos de type Progress russes. Par
la suite s'ajoutera à cette flotte une mini-navette US (projet
X33). de leur côté les européens fourniront une capsule qualifiée
vol humain (ARV ?) qui servira de chaloupe de secours. Enfin
pour la compléter un remorqueurs ravitailleur européen lui aussi
assurera la relève des cargos Progress russes (ATV). Pour les
déplacements de matériel autour de la station avec divers bras
télé-manipulateurs attachés à la station, le canada fournira le
robot qui sera indispensable.
Le taxi Soyouz -TM à droite et le ravitailleur Progress
à gauche, les navettes fidèles de la première heure.
(Doc NASA, 2002)
Pour terminer, les gros modules pourraient être lancés par les
fusées russes Proton, en attendant plus tard la grande fusée
Européenne Ariane V. Près de cinquante vols sont prévus pour
assembler la station dans sa phase initiale, elle aurait dut être
achevée en 2005. L'accident de la navette US Colombia
qui ne volait pas pour le compte de l'ISS en février 2003 risque
de retarder la finition du complexe Alpha et d'en changer le plan.
Qui plus est la NASA a abandonné le projet de mini-navette X-33.
Un module doit attirer notre attention dans cette station
orbitale. C'est un des derniers modules, le UF-7 : Centrifuge
Accommodation Module (CAM) qui doit être lancé par une
navette US vers août 2005 (?). Ce module permettra de tester
en orbite la création d'une pesanteur artificielle grâce à la force
centrifuge d'un cylindre en rotation. Destiné essentiellement à
l'étude de la croissance des plantes ou le développement de
petits animaux ; il sera peut être la clé des voyages au long
cours vers Mars ou plus loin si le principe se révèle efficace.
Mais pour aller plus loin il faudra aussi toujours s'en remettre
aux "grands sorciers" motoristes (suite aux défaillances des navettes
US, certains modules sortent discrètement du programme, ce dernier
module UF-7 par exemple.)
Suite aux déboires des navettes Américaines qui, au début
2006 sont encore stoppées à cause de la mission STS-114
peu encourageante du 1er juillet 2005, seuls les complexes
Soyouz, Progress et leur lanceur Soyouz-Fregat assurent
fidelement la desserte de l'ISS Alpha avec régularité.
Bill McArthur d'Expedition-12 travaille dans le module Destiny
de l'ISS en mars 2006. (Doc NASA 2006)
Il est difficile de ne pas nous faire l'écho de l'extrême
opposition à cette aventure technologique de la part de
chercheurs et techniciens de la recherche scientifique,
(aussi bien au niveau international que national). Ils ne supportent
pas l'énorme ponction financière que nécessite la
construction et l'entretien d'un tel complexe spatial. Cette
ponction réduit d'autant les crédits des autres programmes
de recherche spatiaux. Cet antagonisme, même pas voilé,
jette une ombre sur le succès et l'utilité de ce programme
pourtant technologiquement très ambitieux.
A partir du nouveau millénaire.
Passée la dissolution de l'Union Soviétique au début des années
quatre vingt dix, la Russie va s'effondrer économiquement, et son
corollaire sera la fuite de ses cerveaux les plus brillants que
l'Occident récupérera d'ailleurs à bras ouverts. L'exploration de
l'espace va sembler marquer le pas, tout d'abord à cause des
restrictions de budgets militaires dans les quels l'astronautique
civile de recherche avait trouvé le "sponsor" idéal, puis, en
suite, par manque de compétition idéologique. La nouvelle
économie libérale, hautement capitaliste et spéculative avait
pour conséquence d'absorber tous les crédits dans des actions
financières individuelles à court terme, réduisant tout ce qui ne
nourrissait pas son économie de marché, à la portion congrue.
De façon spectaculaire l'utilisation de l'espace se résuma bien
vite à placer des "noria" de satellites utilitaires qui satisfaisaient
bien l'Europe dont l'imagination dans le domaine de l'exploration
de l'espace était fournie par des comptables aussi efficaces
que stériles (en terme d'épopée), seule l'Amérique garde encore
une petite flamme vacillante dans ce domaine en 2004.
Le seul programme spatial conséquent issu de la nouvelle
économie est la station orbitale internationale sous la très
haute maîtrise d'oeuvre de l'Amérique. La station ISS Alpha
va péniblement continuer à se structurer (2006) avec une maigre
collaboration Européenne, et une Russie traînant les pieds avec
une mauvaise foi évidente. La Russie était tiraillée entre la
volonté de garder l'avance qu'elle avait sur l'Occident en matière
d'activité spatiale aux longs cours, et d'autre part se servir de
l'antagonisme ISS Mir à des fins de basse politique internationale.
Elle avait promis aux Américains que pour avoir une bonne place
sur l'ISS (elle aura même le droit de commander des missions) elle détruise
au plus vite sa station orbitale Mir. D'autre part les USA aidant la
Russie financièrement à construire des modules vitaux pour l'ISS,
les Russes se serviront de cet engagement pour peser sur le
programme ISS. Ils avaient même, après avoir promis la fin de Mir,
se raviser et engager des recherches de "sponsor" privés pouvant
prolonger la vie de Mir en l'utilisant à des fins commerciales
(on parlait de séjours touristiques ou de studio de TV privés). La mission
de mars 2000 des cosmonautes Zaliotin et Kareli avait été en
partie dédiée à relever l'orbite de Mir pour en prolonger la durée
de vie, et remettre en état la station quelque peu vieillissante
(il y avait quelques fuites d'air à circonscrire). La Russie se résoudra
pourtant, à contre coeur, à satisfaire les USA en précipitant Mir
sur terre en 2001. Le reste de l'activité spatiale Russe consistera
à assurer le stricte minimum d'activité spatiale militaire dans le
cadre SALT-2, INF, START, comme les : missiles ICBM / IRBM,
satellites d'espionnage optique, d'écoute électronique, de
surveillance radar, de communications cryptées, et de recherche
technologique pour assurer une dissuasion en terme de guerre
et de contre mesure électronique. Pour le secteur civil elle
mènera une politique équivalente à l'Europe : vendre du vecteur
pour vendre du satellite utilitaire. Toute fois la Russie jouera
deux cartes importantes pour l'avenir en 2001 : En poussant
le premier touriste spatial (payant) Denis Tito en orbite sur l'ISS,
malgré le refus américain, elle ouvrira la route aux voyages
Denis Tito à l'entrainement en vol aérien balistique,
avant son vol sur Soyouz/ISS le 28 avril 2001.
(Photo RKA 2003)
touristiques, et elle qualifiera la spationaute française Claudie
Haigneré comme ingénieur de bord pour assurer la navigation
d'un taxi Soyouz vers l'ISS (mission Andromède).
Claudie Haigneré spationaute 21 octobre 2001
(Doc ESA 2001)
Les USA tout entièrement tournés vers le déploiement de la
station orbitale Alpha, n'oublieront pas totalement l'exploration
du vaste système planétaire solaire, mais le manque de grande
compétition va réduire le nombre des missions. La sonde Mars
PathFinder et son robot mobile Sojourner en sera un exemple
réussit seulement sur le plan technologique. Elle initiera tout
de même une opération bien réussie de prospection du sol
martien avec deux robots mobiles qui se déplaceront sur des
dizaines de kilomètres il s'agit des robots Spirit et Opportunity
qui rouleront 3 ans d'affilées 2003 2006. sur le sol martien.
On notera une belle mission Américaine et Européenne, elle
aussi réussie, mission Cassini Huygens autour de Saturne
avec le posé d'un atterrisseur sur son satellite Titan (ESA) en
2005. C'est l'atterrisseur le plus lointain envoyé depuis la Terre.
Puis sur proposition du Président Américain en 2005 une
nouvelle Vision Spatiale sera lancée pour le compte des USA
avec le retour à la Lune en vol habité pour se faire la main
avant la grande mission martienne visible pour 2030/40. On
parle du projet lunaire Constellation avec les deux CLV et
des vecteurs Ares-1 et Ares-V (2010)
L'Europe pendant ce temps attend sans grande ambition
sauf à présenter des comptes exacts aux élus en 2006.
L'activité militaire US sera calquée sur l'activité militaire russe.
Une vague tentative de bouclier antimissiles US va ressurgir
avec le programme NMD (1999), ce programme est très
mal perçu par la presse américaine, et des critiques se feront
jour ouvertement quant à sa qualité (ici on fait allusion à son
efficacité douteuse en 2003), et sur son opportunité discutable
(personne ne veut toucher à la MAD : Mutual Assured Destruction).
Lancement de Kwajalein d'un ABM Taurus dans
le cadre des tests STEP Missile Defense System
(Doc DoD USA 2005)
Mais en 2003 un regain de tension au Moyen Orient sera le
prétexte à une relance des budgets militaires US pour déployer
dans l'espace le fameux bouclier anti-missiles dont rêve
l'Amérique depuis le début de la "guerre des étoiles" avortée.
Timidement en ce début de millénaire le Japon, la Chine vont
accentuer leurs ambitions spatiales en faisant référence à la
grande épopée passée. La navette Chinoise (Shenzhou),
dérivée du Soyouz soviétique sera lancée en vol spatial avec
succès de novembre 1999 à janvier 2003. Le départ d'un
"Taïkonaute" se fera avec succès ainsi le 15 octobre 2003.
Yang Liwei le premier taïkonaute lancé
de Chine le 15 octobre 2003 sur Shenzou-V.
(Photo du journal Standard Busness
Newspaper Greater China 2003)
La Chine grâce à Yang Liwei sera la troisième puissance
spatiale au monde à lancer des vaisseaux habités en orbite.
Le Japon se distinguera avec ses sondes planétaires et
lunaires sans trop parler du projet d'avion spatial automatique
Hope, assez confidentiel, mais qui justifie des tests de rentrée
atmosphérique technologiques.
La parité homme femme qui se développe dans les pays riches,
va changer la physionomie des équipes de recherches en matière
d'exploration de l'espace, elle va avoir pour conséquence de
ralentir (dans un premier temps seulement) encore plus l'élan initial au
sens de l'organisation de l'épopée.
Image du sol de Titan (lune de Saturne) prise par
la sonde Européenne Huygens le 16 janvier 2005.
(Photo ESA / NASA 2005)
Début 2004 dans une atmosphère économique occidentale
morose, le Président américain GW.Bush relance les grands
projets spatiaux en demandant aux USA de repartir à la
conquête du système solaire. Il demande à la NASA de
déployer sur la Lune une station permanente habitée vers 2010
2015, et de là, repartir vers Mars en vol habité pour 2030.
Bien entendu l'ISS Alpha devrait survivre à ce maelstrom
même s'il ne s'agit pas d'un simple effet d'annonce. De son côté
l'Europe spatiale de 2004, frémit, et se dôte d'un programme
d'exploration du système solaire intéressant (Mars-Express Rosetta,
Huygens par exemple). Une désaffection pour les sciences physiques
se fait sentir dans les Universités occidentales en ce début de
XXI ème siècle, cet évènement particpe à justifier l'effort politique
et économique dans le domaine spatial où les sciences dures en
sont la cheville ouvrière.
Mes Dames, dans l'espace.
Avec la surprise du départ de la première cosmonaute dans
l'espace, la robuste Valentina Teretchkova (elle était parachutiste
d'essai et non pilote de chasse ou militaire) le 15 juin 1963 il ne nous
aura pas fallut attendre beaucoup pour vivre ce joli coup de
propagande soviétique après le lancement de Youri Gagarine
(12 avril 1961). Les Américains, encore plus misogynes que les
soviétiques, n'enverront leur première astronaute dans l'espace
que sur les navettes. La première sera la charmante Sally Ride
avec la mission STS-7 le 18 juin 1983, soit trente ans après
la mouette, nom donné à Valentina pour sa mission Vostok 6
(de juin 1963) !
Le mariage de la cosmonaute Valentina Teretskova
avec le cosmonaute Nikolaeïv. (Photo BSI Tass 1964)
Comme la motivation Russe n'était que pour la propagande
le groupe de cosmonautes féminin sera dissout dès le retour
de Valentina. En fait les soviétiques ne feront pas beaucoup
mieux que les Américains qui avaient eux aussi initié un groupe
féminin dit Mercury-13 et qui pour une simple raison mysogine
se verra écarté de l'épopée.
En Russie finalement ce sera au début des années 80 qu'elle
enverra la seconde de leur cosmonaute : Svetlana Savitskaya
(elle est pilote d'essai militaire) avec Soyouz T7 pour passer une
semaine sur Saliout 7 le 19 août 1982 lors d'une relève
d'équipage.
La seconde femme à aller dans l'espace, la
cosmonaute Svetlana Savitskaya ancienne
pilote d'essais. (Photo Jane's 1974)
Puis l'histoire se débloquant on verra apparaître dans les équipages
Américains une nette féminisation, jusqu'à la tragédie de Challenger
de janvier 1986 (mission STS 51) qui stoppera l'élan pour un moment.
Première astronaute US, Sally Ride lors de la mission
STS-7 de juin 1993. C'est elle qui ouvre la voie aux
astronautes féminines américaines. (Photo NASA 1993)
Dans cette explosion en vol de la navette Challenger l'astronaute
professionnelle Judy Resnick et la passagère Christa Mc.Auliffe,
la jeune et courageuse institutrice, perdront la vie avec leurs cinq
camarades masculins ; ce coup sera rude pour l'Amérique.
Cela aura pour conséquence d'interdire l'envol de passager non
professionnel dans les navette US pour quelques années.
Christa McAuliffe photographiée au Cap Canaveral
avec dans le fond la navette Challenger. C'est la
première victime féminine dans une mission STS.
(Photo NASA 1986)
Coté URSS pour marquer l'histoire des EVA avec encore un
nom Russe, la cosmonaute Svetlana Savitskaya fera un second
vol avec une EVA, la première pour une femme (25 juillet 1984).
Puis encore pour couper l'herbe sous les pieds Yankee, les
soviétiques feront faire une mission longue durée à une femme
pour encadrer la fin de la mission du Dr V Poliakov lors de son
vol marathon d'un an et deux mois, c'est la cosmonaute Héléna
Kondakova (elle est physicienne) qui viendra passer six mois dans
Mir avec l'équipage. Elle ressortira assez éprouvée de son séjour,
le plus long pour une femme, jusqu'au vol de "Mamie"Shannon
Lucid (la plus âgée des astronautes féminines) de la NASA pour un vol
de sept mois sur Mir, qu'elle supportera un peu mieux.
Pour le compte de la France notre première spationaute sera la
distinguée Dr Claudie Andrée Dehay (médecin, biologiste) qui fera
une mission, avec succès, d'une semaine sur Mir en 1995.
Remariée au spationaute Jean-Pierre Haigneré elle sera même
nommée Ministre de la recherche et de l'enseignement supérieur
dans un gouvernement français en 2002.
La première américaine pilote d'une navette (Discovery) sera
Eileen Collins pour la mission STS-63/OV-103 du 3 février 1995
et on la retrouvera commandant de bord sur Colombia pour la
mission STS-93/OV-102 du 23 juillet 1999.
Si les Américains finissent par être convaincus du bien fondé
d'une présence féminine sur les navettes et sur l'ISS, il n'en ira
pas de même chez leurs confrères Russes qui en 2005 continueront
toujours à ignorer le sexe dit "faible"...
Héléna Kondakova fera exception, elle fera une
mission sur Mir de 6 mois (4 oct 1994), mais il
s'agit de l'épouse du chef cosmonaute Rioumine !
(Doc RKA 1997)
Elles sont parties aussi, c'est juste et naturel.
Où en est l'élan initial ?
Il faut dire que le foudroyant développement du segment génétique
(surtout en ce qui concerne le génome humain) monopolise l'attention du
public en cette période de début du XXI ème siècle, faisant passer
l'activité spatiale au second plan. Le grondement issu des pays
dit du Sud (lire en fait : Pays en voie de développement, c'est à dire très
pauvres) commence à se faire entendre violemment dans les pays
industrialisés et cela n'est pas non plus propice aux grandes
messes astronautiques fin 2005. L'engagement économique à la
rentabilité du court terme comme déjà évoqué assèche les crédits
consacrés à une conquête spatiale stoppée par le fait qu'aucun
grand voyage planétaire humain ne peut être envisagé en l'état
de l'art en 2006. Le voyage d'un équipage humain vers la planète
Mars est pour le moment irréaliste, tout au plus pouvons nous
l'espérer vers 2030. Une des conséquences immédiates en est
une désaffection des jeunes pour les activités scientifiques
(en 2001 cela commence à alarmer les universitaires des sciences dures)
issus des sciences pour l'ingénieur. Si cette désaffection se
poursuivait trop longtemps, alors l'influence sur une relance du
grand élan pour l'exploration de l'espace bloquerait tout
redémarrage, renvoyant vers la fin du XXI ème siècle un
hypothétique nouvel élan.
Les mouvements dits : écologistes, mondialistes, et
capitalistes. Les droits de l'homme, le racisme Nord Sud,
l'eugénisme, le clonage humain, les sauvageons urbains,
l'intégrisme religieux, les barbaries, sont bien plus porteurs
de notre attention pour le moment en ce début de XXI ème
siècle entrainé dans une mondialisation totalement inhumaine.
Toute fois en 2006, la NASA lance un économique programme
de retour des vols habités vers la Lune. Le Crew Launch Vehicle
(CLV) devrait emporter un équipage de 5 à 6 astronautes en
orbite lunaire. Ont été mis au concours les moteurs J2 du 2éme
étage de l'ancienne fusée lunaire Saturn-V du programme Apollo
ou le moteur SSME de l'orbiter des navettes STS. Au passage
on notera le manque d'ambition (ou de moyen financier) en réactivant
des technologies des années soixante et soixante et dix du
XX ème siècle pour propulser un module qui risque de ressembler
(en plus grand) soit au command module Apollo ou au taxi Soyouz.
Les deux CLV de la NASA pour un économique retour
en vols habités vers la Lune (Doc NASA 2006)
Seul le Cargo Launch Vehicle (CaLV), qui assurera le transport
de fret vers la Lune, sera sans doute propulsé par un moteur
récent, le RS-68 de Pratt&Withney qui assure la motorisation
de l'actuel vecteur US Delta-IV. Mais au mililieu de l'année 2006,
finalement, un modeste vent d'audace permet à la NASA de
dédier à la propulsion du Crew Launch Vehicle le même groupe
moto-propulseur de Ptrat&Withney le RS-68 !
A la mi 2006, la NASA semble finalement préférer le RS-68 sur
ses deux lanceurs.
Que d'audace !
L'avion fusée, le beau vecteur spatial.
De la bande dessinée (comme Blake et Mortimer et l'avion
spatial Espadon) aux films comme : La guerre des étoiles
(de Spielberg), des exploits des Bell xx US (1950) au projet de
navette Hermes européen (1985), l'avion reste le vecteur
fascinant par excellence. Voyons un peu cette histoire :
L'équipe de Chuck Yaeger 1950 à Muroc
(Photo USIS 1956)
De l'avion fusée au vaisseau spatial.
La conquête de la vitesse et de l'altitude passe très vite par
l'avion dès la seconde guerre mondiale. Toutefois de grands
records d'altitude seront encore le fait de ballons libres gonflés
à l'hélium. Ces ballons permettront d'atteindredes altitudes de
l'ordre de 40000 mètres et surtout d'assurer de longs moments
à ces niveaux afin de faire des mesures valant aussi bien pour
les magnétosphéristes que les météorologistes (par exemple les
expériences du Pr Picard en sont un bon exemple avec une ascension à
18000 m en 1938).
En allemagne l'avion fusée Me-163B Komet (du constructeur
W.Messerschmitt) est déjà l'ancètre de nos prototypes, mais
au service de la guerre (il entre en service en 1944). Il est utilisé
par la Luftwaffe pour intercepter les bombardiers alliés.
ME-163 premier chasseur à moteur fusée opérationnel
(Photo X)
Avec cet avion, des vitesses de l'ordre de 950 Km/h seront
atteintes avec une autonomie très réduite, et un retour au sol
en vol plané avec une finesse bien moindre que celle d'un
chasseur. Le raidissement des commandes aérodynamiques
et la modification du centrage de l'avion à l'approche du mur
du son vont commencer à se manifester.
Après la guerre les USA d'une part, mais aussi l'Europe de
l'Ouest (en France l'avion fusée SO 9000 Trident sera même un avion
mixte, fusée à 3 chambres de propulsion et deux réacteurs, préopérationnel
dès juillet 1955) et l'URSS d'autre part vont tous commencer à
s'interesser à ce vecteur pour faire des investigations au delà
du mur du son et en exploration des hautes altitudes, jusqu'au
seuil de l'espace.
L'avion fusée mixte français SO-9050 Trident
en pente de montée. (Photo SNCASO)
Aux USA les programmes NACA, USAF-Navy, vont ouvrir le
domaine de la conquête du mur du son sur des machines
volantes aux ailes en flêche comme le Skyrocket, ou droite
comme le Bell X1. L'URSS va de son côté développer toute
une panoplie d'avions fusées sans obtenir toutefois le même
L'avion fusée soviétique T-346 sous l'aile d'un TU-4 ex B29
(Photo Y.Gordon & B.Gunston)
succés que les américains. En 1947 le Cne Chuck Yeager sur
Bell X1 franchira le mur du son, avant de laisser sa place à
une nouvelle génération de pilote d'essai ingénieur comme
par exemple Scott Crossfield. Dans les années cinquante les
avions destinés à explorer le domaine à Mach 2+ vont obliger
le NACA et l'USAF à lancer programme sur programme de
tests en vol. Les bases d'Edward, Muroc, lac Rogers vont
résonner de bangs sonores, mais aussi de drames.
Un posé un peu brutal pour cet avion fusée Skyrocket sur le
lac Roger prés de la base d'Edward (Photo NACA, 1957)
A la fin des années cinquante le cap des 3200 Km/h sera franchi et
de courantes altitudes de plus de 30000 mètres aussi. A ces hauteurs
la raréfaction de l'air est telle que l'aérodynamique des ailes n'est plus
suffisante à porter l'avion, et de toute façon les commandes
deviennent, pour le même motif, inopérantes. On parle de montée
en ZOOM, c'est à dire sur l'élan de l'avion. Les retours sur terre
sont de ce fait acrobatiques, car dans ce cas le pilote ne peut plus
contrôler l'attitude de l'avion. Ce problème va être étudié aux
USA grâce au programme Haut Rayon, ou la NASA, et aussi
l'USAF-Navy s'allient pour développer le prototype d'avion
fusée ultime, produit par North Aviation, le X-15. C'est avec
cet avion fusée que seront conquises par le bas les marches
pour accéder à l'espace cosmique. Livré à la NASA pour faire
des expériences scientifiques cet avion atteindra couramment
des distances de la terre de plus de 80 Km, voire même plus
de 100 Km, à des vitesses de plus de 7000 Km/h.
L'avion fusée X-15 accompagné par un Starfighter F-104
au posé à Edward (Photo NASA 1961)
Aux USA des projets de développement du X15 iront même
jusqu'à envisager son lancement par une fusée du genre Titan II
comme celles qui activeront le programme Gemini en 1964.
Le programme militaire Dynasoar MOL sera même sur le
point d'être engagé. il s'agira de modifier la voilure du X15
pour en faire un delta avec winglet, mais le Congrés mettra
un terme à l'aventure, car le développement des missiles se
révèlera plus efficace en souplesse de strategie de dissuasion.
Il faudra attendre le début de la décénie quatre vingt pour voir
l'avion fusée reprendre du service avec la navette Américaine
d'une part et les petits avions fusées orbitaux sans pilote en
URSS (petite navette Borg-4 et 5).
A la fin du XX ème siècle l'Amérique a lancé de nouveaux
programmes d'avions fusées orbitaux avec le X33 et X34
destinés à ravitailler la station orbitale Internationale Alpha
et pour l'un comme pour l'autre à servir de démonstrateur
(hypothétique) d'un futur moyen de transport spatial en vol
sub-orbital.
Le planeur orbital à statoréacteur X-43A
Dessin de la NASA 2003
Juste à la fin de l'existence du système soviétique une navette
originale sera expérimentée avec succés avec le tout nouveau
vecteur Energia. Il s'agit de la navette Bourane qui fera un
vol remarqué et remarquable en orbite terrestre pour revenir
se poser automatiquement (sans cosmonaute à bord) sur la piste
de Baïkonour. De son côté l'Europe avait même envisagé la
réalisation d'un avion fusée orbital dont les dimensions
se trouvaient à mi chemin des petites navette expérimentales
soviétiques (Borg) et des grandes navettes US (STS).
Cosmos-1445, navette Borg-4 récupérée dans l'océan
Indien. (Photo Ministère de la Défense Australien).
Le projet portait le nom de Hermes (l'auteur avait même effectué
un vol de rentrée atmosphérique sur un simulateur Dassault /OASIS à
Istres , France en 1988).
L'ESA finalement abandonna ce projet pour orienter son activité
vol humain grace aux moyens Russe et Américain. Une société
civile privée Américano-Russe : Space Adventure, s'est
développée sur un projet de transport spatial suborbital pour
touristes (fortunés) avec un avion fusée tri-places culminant à
100 km en 2007 (dans le cadre du Ansari X Prize) !
Le projet de Space Adventure, la navette Cosmopolis XXI.
Simple effet d'annonce spéculatif ou vrai projet de voyage
spatial touristique pour le fameux X-Prize ?
(Doc Space Adventure 2002)
Comme pour le X-15 un avion de transport (Antonov 225)
larguerait à haute altitude l'avion fusée pour son bond
spatial à 100 000 € la place...
Finalement un autre concurent américain, la société
Scale Composite animée par son directeur Burt Rutan
va réussir avec un matériel entièrement privé à envoyer
le premier civil Mike Melvill dans l'espace à 100 km du
sol dans un avion fusée du nom de Spaceship One.
Spaceship One en montée vers l'exosphère le 21 juin 2004
avec Mike Melvill. (photo Scaled Composite)
Il est largué par un porteur aérien du nom de White
Knight à 13000 mètres et une fusée propulse l'avion
jusqu'à 110 km du sol avec un pilote et deux passgers.
Bien entendu cet avion comme celui de Space Adventure
concoure pour le Ansari X Prize au milieu de l'année
2004.
Plan 3 vues du scramjet Hyper-X, X-43a qui passe
Mach 10 le 16 nov 2004. (Dessin NASA, 2002)
Ce n'est pas un avion fusée, mais c'est un prototype test
de nouvelle propulsion aérobie. Le 16 novembre 2004,
largué d'un B-52 audessus de la base du Dryden à Edward
Californie, l'avion à moteur de type statoréacteur (tuyère
thermo propulsive) dite scramjet est accéléré par un
booster Pegasus qui lache le X-43A à Mach 4.
La tuyère thermopropulsive permet au X-43A d'atteindre
Mach 10, un nouveau record à 30000 mètres du sol.
Nous sommes dans le contexte dit Hyper-X de la NASA.
Pour qu'un avion soit bon il faut qu'il soit beau, disait-on !
La conquête européenne.
La somme arithmétique des savoirs européens en matière de
technologie spatiale en général est énorme, sans doute égale à
ceux des Etats-Unis ou de la Russie. Pourquoi ne sentons-nous
pas le vent de l'épopée souffler dans cette partie privilégiée du
monde au début du XXI ème siècle ?
L'Europe aérospatiale.
Nous avons déjà vu comment la France a pour sa part rejoint,
au début de l'exploration de l'espace, le "podium" des partants
sur la troisième marche. Dès le 26 avril 1965 grâce à une fusée
Française Diamant, lancée de la base Algérienne d'Hammaguir
la petite charge technologique A1 (A1 alias Astérix 1) de 40 kg
est placée en orbite basse autour de la terre (LEO).
Le premier satellite français lancé d'Hammaguir en avril 1965
par un lanceur national, la fusée Diamant. (Photo CNES 1970).
L'Europe spatiale est enfin en route de façon claire. N'oublions
tout de même pas que la fusée V2 (V2= Vergetungswaffe, arme de
représailles numéro deux) mise au point par des techniciens
Allemands en 1942 à Peenemüde, au service de la Wehrmarcht,
reste pour tout le monde le premier engin balistique spatial
de l'histoire de l'humanité. Une grande cacophonie règne
ensuite dans l'Europe de l'Ouest dès la fin de la seconde
guerre mondiale. L'Angleterre, et la France fortement affectés
par la seconde guerre mondiale se dotent de l'arme nucléaire
et grâce a une longue tradition aéronautique, imaginative, et
entreprenante, elles construisent les vecteurs aériens qui vont
aller du Vickers Valliant quadriréacteurs (1951) pour l'Angleterre
au biréacteur Vautour SO-4050 (1952) pour la France. Pour
assurer la défense de leurs espaces aériens les Britanniques
vont développer un chasseur d'interdiction (le BAC Lightning
P-1 de 1954), tandis que la France étudie l'avion fusée (le SO-9050
Trident II de 1956) et même audacieusement la propulsion par
statoréacteur (le Leduc O-21 de 1954 et le Nord 1500 Griffon ). Tout
au Nord de l'Europe pour d'autres motifs la Suède se lance
dans la construction aéronautique de défense aérienne avec
le prototype à réacteur (le SAAB-210 (1952).
Le SO 9050 Trident-II avion fusée et réacteur
aérobie, projet d'intercepteur français 1960.
(Photo Armée de l'Air Française 1960)
Restée dans l'OTAN (Organisation du Traité de l'Atlantique Nord)
l'Angleterre accède à la technologie des Etats Unis pour
le développement d'un missile IRBM le Blue Streak.
L'IRBM Britanique Bluestreak qui dispose d'un
moteur équivalent au H1 américain assure les
débuts de sa dissuasion atomique 1961
(Photo de Havilland Aircraft Company 1962)
Ce missile est doté d'un moteur Rolls-Royce RZ-2 sur une
licence US du H1 de Rocketdyne (de North American) déjà
utilisé sur les IRBM Thor, et Jupiter, de même que sur
l'ICBM Atlas. La France qui n'adhère pas à ce traité pour
des raisons d'indépendance politique et économique va
construire (grâce à la Sté d'Etudes et Réalisations d'Engins
Balistiques : SEREB) toute une série de fusées dont quelques
une ne seront qu'expérimentales et d'autres qui vont des
missiles à la Diamant de 1965, en passant par les fusées
Vesta, Topaze, Emeraude, Rubis, Saphir, Coralie, fourniront
l'arsenal français de missiles ICBM et SSBM de la force de
dissuasion stratégique thermonucléaire.
Avec la CEE (Communauté Economique Européenne) d'une part
et le dynamisme aérospatial Anglais et Français d'autre
part, l'Europe se laisse entraîner dans la course spatiale ;
certainement plus à des fins d'indépendance économique
que pour une arrière pensée de défense stratégique militaire
commune à venir.
Nous sommes en 1968 lorsque que le programme CECLES-
ELDO est lancé. Il s'agit dans la hâte d'assembler le vecteur
Europa 1 constitué du Blue Streak Anglais comme premier
étage devant emporter un second étage Français, lui même
poussant un troisième étage Allemand surmonté de la charge
marchande, tout un symbole !
La fusée européenne Europa du CECLES-ELDO.
Royaume Unis, France, Allemagne, 3 étages.
Ce projet sera abandonné au profit de la filiaire Ariane.
(Doc ELDO)
La hâte et le bricolage ne sont pas des vertus dans la quête
spatiale. Comme la grande fusée lunaire N1 Soviétique ou
la Vanguard US, et pour le même motif les échecs se
succèderont jusqu'à l'abandon des projets Europa 3 pourtant
déjà mieux élaborés. Abandon aussi de la base Saharienne
d'Hammaguir et installation de la base Guyanaises de Kourou
qui appartient à la France. La conquête de la piste équatoriale
pour gagner le bonus de vitesse donné par la rotation de la
terre et le fait d'être sur le plan de l'équateur en sont les tous
premiers intérêts. En suivant un bon fil d'ariane l'Europe se
trouve enfin un vecteur de qualité, la fusée Ariane 1 L-III-S
(lanceur de troisième génértion de substitution) lancée avec succès
pour la première fois en décembre 1979.
La fusée Ariane IV (ici dans sa version 44PL) sera
l'ultime modèle de cette efficace lignée européenne.
(Photo de l'auteur 1996)
Pendant la remise en question de l'utilité de la navette US
pour lancer des charges commerciales vers l'orbite GEO et
malheureusement aussi après le drame de la navette US
Challenger (de 1986), l'Europe va gagner ses galons de
professionnel du lancement en orbite de transfert
géostationnaire. La "pose" américaine, et l'effondrement
Soviétique l'aideront à montrer ce quelle sait faire.
Malheureusement cette Europe spatiale dirigée par les
comptables de l'ESA (European Space Agency) manquera de
souffle et sera absente de l'épopée, plus par manque
d'ambition que par manque d'argent ou de cerveaux.
Pourtant, souvenons nous, le 13 février 1961 la France
n'hésitait pas à utiliser sa petite fusée sonde Véronique
(4 tonnes de poussée pendant 45 sec) pour lancer une capsule
balistique habitée par un rat du nom d'Hector. Il sera
récupéré vivant après un éloignement de la terre de
150 Km. Il y avait de l'ambition et du rêve dans ce
lancement, et trente ans plus tard avec l'enterrement
du projet Européen Hermes (Hermes devait être une petite
navette spatiale du type corps portant, habitée et destinée au
ravitaillement des stations orbitales Russe, US, et Européenne)
l'ambition Européenne se réduira à la construction
d'un modeste module habitable destiné au complexe
Alpha ISS, ainsi que d'une vague capsule récupérable
l'ARD en 1999 renommé en ATV en 2004 et destinée
au ravitaillement automatique de la station orbitale.
L'Europe participe à quelques lancements scientifiques,
ils sont de qualités comme Mars Express en 2004 (demie
réussite), Rosetta en 2004, Huygens vers Titan un satellite
de Saturne en 2005 (réussite), Venus Express en 2006
(réussite), mais ils sont plutôt rares, et en coopération elle
est, par contre, présente dans les grands programmes
internationaux comme bien entendu l'ISS, mais sans
s'engager trop fortement. Rien de bien galvanisant pour
nos jeunes...
Le lanceur lourd Ariane V et le lanceur léger de l'ESA, Vega
seront associés au lanceur moyen Soyouz-2 pour assurer
l'activité spatiale Européenne. (Photo ESA, dessin J Huart, 2002)
Début 1999 avec la mise en service opérationnel de la
fusée Ariane V dotée d'un moteur cryogénique de 105
tonnes de poussée : le Vulcain (sous maîtrise d'oeuvre de la
SEP France) l'Europe possède enfin un vecteur puissant,
capable de mener de très grandes manoeuvres pour
l'exploration du cosmos.
En 2003 les carnets de commandes d'Ariane-Espace pour
l'orbite GEO étaient pleins alors pourquoi aller plus loin ?
(en 2010, c'est exactement la même chose)
Au-delà de la frontière, il y a un autre horizon.
Il est temps de mettre un terme a cette première tentative de
décodage de cette branche de l'histoire de l'humanité. A sa
relecture elle nous semble déjà incomplète, erronée, d'autres
et beaucoup d'autres, suivront pour nous éclairer de façon
encore bien plus pertinente. Alors pour le moment concluons
avec deux thèmes qui résumeront les très grandes premières
qui compteront dans la grandes histoire de l'Humanité.
Voici les grandes étapes de cette explorations spatiale :
Déroulement chronologique des grandes premières Historiques.
Dans ce chapitre nous nous bornerons à énumérer les événements qui
entreront sans doute dans la Grande Histoire de l'exploration du système
solaire par les "homo-sapiens".
Cette chronologie est extraite de notre base de données. Comme le reste de cette édition
elle est protégée par les lois sur le droit d'auteur et la propriété intellectuelle
(sous contrôle de l'INPI).
Voyez au prés de l'AMSAT-France le livre sur la chronologie de l'aventure
spatiale à la rubrique fournitures que vous trouverez à l'URL :
Avant Spoutik-1
Au XIX ème siècle, début du rêve de voyage dans l'espace à
travers la littérature en s'appuyant sur des thèses scientifiques.
Jules Verne en propose un bon exemple avec son ouvrage
nous comptant un voyage de la Terre à la Lune.
A la fin du XIX ème siècle le Russe Tsiolkovski publie un
ouvrage scientifique décrivant les outils pour atteindre le
domaine spatial : Le moteur fusée à carburant liquide la
fusée à étage et la station orbitale sont au programme.
Le 3 octobre 1942 en pleine seconde guerre mondiale,
Werner von Braum lance la première fusée militaire (la V2)
qui franchit le seuil du domaine spatial à plus de 80 km
du sol.
En juillet 1945, à Alamogordo aux USA premier tir d'un
explosif nucléaire à fission (opération Trinité). L'humanité
entre dans l'ère atomique.
Le 14 octobre 1947, l'avion fusée américain Bell X-1
piloté par Chuck Yeager franchit le mur du son. L'avion
fusée devient un possible candidat à pousser l'homme
vers l'espace.
Le 13 mai 1948 premier test d'une fusée à étage dans
le cadre du projet Bumper aux USA. L'attelage atteint
112 km de distance de la terre.
Le 26 août 1957, l'URSS annonce le tout premier tir
opérationnel d'une fusée intercontinentale militaire
dite : ICBM (intercontinental ballistic missile).
FIN de l'ère pré-spatiale, DEBUT de l'ère spatiale :
Spoutnik-1 et après :
4 octobre 1957, lancement par l'URSS du premier satellite
artificiel de la Terre: Spoutik-1 d'une masse de 81 kg.
C'est le premier pas contrôlé de l'homme dans l'exploration
de l'espace. Avec ce satellite, l'humanité accède à la
première vitesse cosmique et peut enfin s'évader de
l'attraction de la terre. C'est un fait majeur de l'Histoire.
Le 3 novembre 1957, mise en orbite par l'URSS du premier
être vivant sur Spoutnik-2. La chienne Laïka va confirmer
que les humains pourront vivre au moins quelques jours
dans l'espace. C'est un évènement marquant.
Le 11 octobre 1958, premier lancement d'une fusée à
destination de la Lune depuis les USA ; La sonde Pioneer-1,
poussée par une fusée Thor Able, va s'éloigner de la terre
à plus de 110000 km sans atteindre encore la seconde
vitesse cosmique.
Le 18 décembre 1958, les USA lancent un ICBM qui se
met en orbite (la fusée Atlas) il permet de tester, à l'aide
d'un répondeur de type téléphonique, les premières
communications phonie en mode simplex entre l'espace
et le sol. C'est l'expérience SCORE qui ouvre l'ère des
communications via l'espace (fait d'importance technologique).
Le 3 janvier 1959, l'URSS lance la première sonde qui
atteint la seconde vitesse cosmique. En route pour la
Lune, elle passera à 6000 km de l'astre. Elle s'inscrira
en orbite solaire comme étant (sans le vouloir) la première
planète artificielle du système solaire.
Le 28 février 1959, les USA lancent le premier satellite
de la terre en orbite polaire ayant des capacités
manoevrantes. Le satellite Discovery-1 ouvrira ce nouveau
domaine de la navigation spatiale. (fait d'importance technologique)
Le 12 septembre 1959, l'URSS lance Lunik II, sonde
Lunaire qui touchera enfin notre satellite naturel en y
déposant, deux jours après (avec brutalité) des pièces à
l'effigie de l'URSS. La Lune n'est plus vierge à compter
de ce jour. C'est un grand moment de l'histoire spatiale.
Le 5 octobre 1959 l'URSS lance le premier laboratoire
astronomique vers la Lune. Il va nous renvoyer les toutes
premières images (rudimentaires) de la face cachée de la
Lune et expérimenter l'orbite Terre Lune Terre avec succès.
Le 11 mars 1960, les USA lancent la première sonde
spatiale à destination d'une planète du système solaire,
Elle vise la planète Vénus. La sonde Pioneer-V va ouvrir
avec intérêt cette première route spatiale.
Le 12 août 1960, les USA réussissent pour la première fois
à récupérer sur terre un élément du satellite Discovery XIII
ayant affronté avec succès la rentrée spatiale dans notre
atmosphère c'est un fait d'importance technologique.
Le 19 août 1960, l'URSS lance le premier satellite orbital,
Spoutnik-5, récupérable, qui ramène vivants sur terre deux
chiens en bonne santé. On est sûr que les humains pourront
revenir sur terre sain et sauf.
Le 6 octobre 1960, les USA lancent le premier satellite de
télécommunications actives Courrier-1B en orbite basse.
C'est un fait de société important pour l'avenir.
Le 12 avril 1961, l'URSS lance le premier homme en orbite
terrestre basse. Youri Gagarine fera le tour du monde en 104
minutes à bord du vaisseau spatial Vostok-1 de 4.5 tonnes.
Il sera récupéré en bonne santé en URSS. C'est le premier
être humain de l'ère spatiale à voyager dans le cosmos.
C'est une des quelques dates majeures de la grande Histoire.
Le 6 août 1961, l'URSS lance Vostok-2 avec le cosmonaute
G.Titov qui va être le premier homme à vivre 25 heures dans
l'espace. Il sera le premier à effectuer toutes les activités de
la vie d'un humain pour une journée (par exemple dormir).
Le 17 juillet 1962, les USA lancent l'avion fusée X-15 sur une
trajectoire balistique suborbitale en vol spatial à 96 km de la
surface de la terre. L'astronaute Robert White viendra se
reposer sur une piste d'avion à Edward Californie, sain et sauf.
C'est le premier vol spatial d'un avion fusée piloté.
Le 16 juin 1963, l'URSS lance le satellite Vostok-6 qui emporte
la première femme cosmonaute en orbite terrestre (elle est
commandant de bord) Valentina Téretchkova. Son vaisseau croisera
à 5 km de distance le vaisseau Vostok-5 habité par Bikovsky un
cosmonaute russe masculin. C'est un grand fait de l'histoire spatiale.
Le 19 août 1964, les USA lancent le premier satellite de
télécommunications en orbite géosynchrone avec la terre.
Sycom-3 ouvre l'ère des satellites en orbite de 24 heures autour
de la Terre. C'est un grand fait de l'histoire des technologies.
Le 28 novembre 1964, les USA lancent une sonde spatiale:
Mariner-IV, sur une route vers les planètes extérieures du système
solaire. Elle passera près de la planète Mars en nous renvoyant
des documents photos très instructifs sur la planète rouge.
Le 18 mars 1965, l'URSS procède à la première sortie d'un
humain en vol libre dans l'espace (EVA) à partir du vaisseau
spatial Voskhod-2 en orbite terrestre. Alexi Leonov en tenue
pressurisé passera une vingtaine de minutes relié au vaisseau
par un cordon de sécurité (élastique).
Le 15 décembre 1965, les USA lancent à la poursuite de
Gemini-6 le vaisseau spatial Gemini-7. Ils vont réussir le tout
premier rendez-vous actif entre deux véhicules habités en
orbite terrestre. Le commandant de l'opération est l'astronaute
W.Schirra. C'est un fait important dans l'histoire spatiale.
Le 31 janvier 1966, l'URSS réussit enfin le posé en douceur
d'une sonde automatique sur le sol sélène. Le drapeau russe
est déployé sur la Lune grâce à Luna 9. C'est une grande
première technologique.
Le 1er mars 1966, l'URSS fait entrer pour la première fois une
sonde dans l'atmosphère d'une autre planète du système
solaire. Venera III entre dans l'atmosphère de Vénus et nous
fournit quelques informations sur son atmosphère. C'est un
grand fait de l'histoire spatiale.
Le 31 mars 1966, l'URSS place pour la première fois un
satellite en orbite autour de la Lune. Luna-10 réussit cette
nouvelle et importante manoeuvre.
Le 17 novembre 1967, lancé en vol suborbital par les USA
sur l'avion fusée X-15, l'astronaute Mike Adams meurt dans
l'explosion du vaisseau spatial au moment de la rentrée
atmosphérique à 81 km du sol. L'histoire de l'exploration
spatiale enregistre là son premier décès accidentel humain
en opération depuis l'espace.
Le 14 septembre 1968, la Russie lance le vaisseau spatial
Soyouz-Zond-5 qui contourne la Lune et revient se poser en
douceur sur la Terre.
Le 21 décembre 1968, les USA lancent le complexe Apollo-8
en orbite lunaire avec un équipage commandé par F.Borman.
C'est la première fois que des êtres humains entrent en orbite
autour d'un astre qui n'est pas la Terre. Ce sera un très grand
et important succès dans l'histoire spatiale.
Le 15 janvier 1969, l'URSS procède aux lancement de deux
vaisseaux spatiaux Soyouz le 4 et le 5, ils vont s'arrimer et leurs
modules d'habitation formeront la première esquisse d'une
station orbitale. Les cosmonautes changeront de véhicule pour
revenir sur terre.
Le 21 juillet 1969, les USA dirigent sur la Lune le premier
équipage humain commandé par N.Armstrong sur le vaisseau
Apollo-11. Le poser se fera sans incident sur le sol de la mer de
la Tranquilité. Neil Armtrong sera le premier être humain à poser
le pied sur un astre, et plus précisément sur le satellite naturel
de la Terre : la Lune. Le retour sera un très grand succès. Voilà
encore une date majeure de notre grande Histoire.
Le 10 novembre 1970, l'URSS envoie sur la Lune une voiture
télécommandée depuis la Terre, via la sonde Luna-17. Le
Lunokhod-1 survivra à plusieurs nuits lunaires et se déplacera
sur plusieurs dizaines de kilomètres du sol sélène.
Le 19 avril 1971 l'URSS envoie, en orbite basse, la première
station orbitale terrestre de l'histoire de l'humanité : Saliout-1.
Le 2 décembre 1971, l'URSS lance la sonde spatiale Mars-3
qui va pour la première fois de notre histoire se poser en
douceur sur le sol martien. Les communications seront
interrompues avec la Terre après la confirmation du poser.
C'est un événement important de notre histoire spatiale.
Le 3 mars 1972, les USA lancent dans le cadre dit du
"grand tour" la sonde spatiale Pioneer-10 qui va explorer les
planètes extérieures du système solaire et qui va devenir le
premier véhicule spatial de la Terre à quitter le système
solaire à la troisième vitesse cosmique, sans retour possible
par ses moyens. La sonde va naviguer dans notre galaxie,
et elle porte pour la première fois une carte de visite des
terriens collée sur son flanc. C'est un grand événement de
notre histoire spatiale.
Le 8 juillet 1975, l'URSS lance un véhicule spatial qui pour
la première fois va se poser sur le sol de la planète Vénus.
Les conditions météorologiques sur notre planète voisine
sont tellement terrifiantes que cette mission (Vénéra 9)
réussie se doit d'être enregistrée comme un événement
important de cette histoire de l'exploration de l'espace par
les humains.
Le 12 avril 1975, premier arrimage réussit entre deux
vaisseaux spatiaux de type et nationalité différents. C'est
le vol conjoint Apollo-Soyouz ASTP, conduit par les USA
et l'URSS. Le cosmonaute Alexi Leonov serrera la main
de l'astronaute T.Stafford, en orbite autour de la terre.
Le 12 avril 1981, les USA lancent pour la première fois
un vaisseau spatial de type navette aérospatiale. La navette
Colombia se place en orbite terrestre pour inaugurer ce
concept d'avion spatial. Elle est pilotée par J.Young et
R.Crippen. Ce vol sera un succès avec en retour sur terre
un posé sur la piste de la base d'Edward en Californie.
C'est un événement de grande technologie spatiale.
Le 25 avril 1981, l'URSS lance le premier module du nom
de Merkur, qui va s'arrimer automatiquement à la station
orbitale Saliout-6. Il va en doubler son volume habitable.
Pour la première fois le principe du montage modulaire
des stations orbitales est mis en oeuvre dans l'espace.
Le 26 février 1986, l'URSS lance la première grande
station orbitale modulaire : Mir. Elle va ouvrir l'ère de la
présence permanente d'êtres humains dans l'espace.
Elle ouvrira aussi le concept d'utilisation internationale
de l'espace. Cette station sera détruite volontairement
en 2001 pour laisser sa place à un concept de station
orbitale juridiquement internationale l'ISS Alpha.
Le 5 mars 1986, l'URSS commande à un équipage sur
Mir de se déplacer avec un taxi Soyouz vers la station
orbitale Saliout-7 pour y récupérer du matériel, et ensuite
revenir continuer sa mission sur Mir. C'est une originale
première et ce sera un succès.
Le 21 décembre 1987, les cosmonautes Mossa Manarov
et V.Titov vont commencer un vol marathon sur Mir d'un an
en continu. Titov et Manarov vont parcourir dans l'espace
toute une orbite solaire. Leur retour les laissera sur terre
sains et saufs, mais les cosmonautes auront assez souffert
de ce long voyage en orbite terrestre.
Le 27 juin 1997, première collision grave dans l'espace entre
un cargo de ravitaillement automatique Progress et la station
orbitale Mir. Cet accident occasionnera de gros dégâts sur Mir
sans perte de vie humaine.
Le 20 décembre 1998, la Russie met en orbite le premier
élément (Zaria) de la grande station orbitale internationale
ISS Alpha. L'occupation permanente de l'espace terrestre
par les humains se poursuit..
Le 12 décembre 2002, les USA entrent en contact radio
avec la sonde interplanétaire US Pioneer-10 qui navigue
hors du système solaire dans notre galaxie. Le signal radio
met plus de 22 heures pour atteindre Pioneer-10. Elle
répond à notre appel. C'est le plus lointain véhicule spatial
en navigation construit par des humains. Sa vitesse est de
100000 km/h et sa distance de plus de 12 milliards de km.
Le 13 février 2001, premier poser en douceur d'une sonde
spatiale (pas conçue pour cela) sur un astéroïde dans le
système solaire. La sonde NEAR-Schumaker se pose sur
l'astéroïde Eros. Puis elle en redécolle en bon état.
Le 28 avril 2001, la Russie lance le cosmonaute Dennis
Tito sur le taxi Soyouz TM-32 avec un équipage russe, vers
la station orbitale ISS Alpha. Tito devient le premier vrai
tourriste spatial et privé, (payant), de l'histoire. Dennis Tito
est un richissime homme d'affaire américain.
Le 15 octobre 2003, la Chine devient la troisième puissance
spatiale capable de lancer des vaisseaux habités en orbite
terrestre. Le taïkonaute Yang Liwei revient sain et sauf sur
terre après son premier vol spatial réussit.
Le 13 janvier 2004, les USA repartent à l'assaut du sol martien
avec deux atterrisseurs (on dit lander en anglais) Spirit et Opportunity.
Les européens moins chanceux échouent dans le poser du
module Beagle-2 de la sonde Mars Express. Le Président US
demande à l'Amérique d'envoyer un homme sur Mars avant 2040.
Le 21 juin 2004, nous assistons au premier vol spatial privé.
Burt Rutan qui concoit l'avion fusée Spaceship One et son porteur
envoie son premier astronaute civil et privé Mike Melvill à plus
de 100 km de distance du sol audessus du désert de Mojave
dans le cadre du Ansari X Prize.
Et plus loin encore.
Il y aura un jour le premier homme sur Mars, puis le premier
sur un satellite de Jupiter, de Saturne, sur Mercure, sur un
satellite de Neptune, d'Uranus et même sur Pluton ou même
Charon et enfin pour couronner le tout, le premier humain
qui se posera sur Venus, sans compter les comètes et
autres astéroïdes ou corps exotiques du système solaire.
Des hommes exploreront sans doute la ceinture de Kuiper.
Enfin les successeurs des HomoSapiens-Sapiens
prendront le relais pour partir explorer les systèmes
solaires proches du notre, dans notre galaxie. Ce sera
sans doute la fin de cette histoire (humaine).
Et après, les étoiles de notre cosmos ?
Elles ne seront explorées qu'avec un état de conscience
qui n'a aucun sens pour nous. Le concept de vol dans
l'Univers est hors du sens commun. La où les consciences
qui partiront explorer ces "espaces" ne pourront que se
revendiquer d'une très très lointaine parenté avec les
humains, ces espaces là ne sont pas fait pour nous, ils
ne sont pas à notre portée, ils ne sont pas à notre
disposition !
Et l'histoire de l'exploration de l'espace, jalonnée de
grandes premières, se poursuivra toujours (même s'il
doit y avoir des poses de plusieurs siècles de temps à autre) ...
Pour conclure.
Mais avant de finir cette partie publiée de notre ouvrage,
laissez nous conclure par quelques réflexions sur cette
histoire bien humaine :
Conclusion.
Il ne s'agit pas de conclure sur l'exploration de l'espace, mais
de conclure ce texte rédigé à la fin du XX ème siècle et au
début du XXI ème.
Commencée de façon pratique en 1944, mais initiée par de
brillants précurseurs théoriciens et praticiens (Tsiolkovsky,
Goddard) nous arrivons avec les moyens technologiques de
notre temps, à envoyer le premier satellite artificiel de la terre
en octobre 1957 ;
le premier animal vivant un mois après Spoutnik-1 ;
nous mettons la première planète artificielle en orbite solaire
en 1959 ;
nous atteignons la Lune la même année 1959 ;
nous récupérons notre première capsule spatiale orbitale en
1960 ;
le premier homme est mis en orbite en avril 1961 ;
les premiers sondages planétaires commencent en 1960 ;
la première femme en orbite terrestre est lancée en 1963 ;
la première EVA est réussie en 1965 ;
le premier alunissage en douceur est maîtrisé en 1966 ;
le premier satellite de notre satellite naturel est mis en orbite
Lunaire en 1966 ;
le premier retour sur terre d'un engin qui a fait le tour de la Lune
en septembre 1968 ;
les premiers hommes en orbite Lunaire sont lancés en 1968 ;
le premier homme sur la Lune est déposé en juillet 1969 ;
la première station orbitale est lancée en 1971 ;
le premier trimestre passé dans l'espace, pour un équipage
humain, sera réussit en 1974 ;
le premier posé en douceur sur une autre planète (Venus),
est réalisé en 1970 ;
le premier sondage du système solaire est commencé en
mars 1972 ;
le premier posé en douceur sur Mars est réussit le 2 décembre
1971 ;
le premier séjour d'un équipage de plus de six mois se déroule
en 1979 ;
le premier avion spatial orbital piloté est lancé en 1981;
les premières images de Neptune et Uranus nous parviennent
en janvier 1986 ;
le premier avion spatial orbital automatique est lancé en 1988 ;
le premier télescope optique spatial est lancé en avril 1990 ;
les premières orbites orthogonales au plan de l'écliptique sont
explorées en 1990 ;
le premier séjour spatial humain d'une année dans l'espace est
effectué en 1995, et par conséquent pour la première fois un
humain fait un tour complet du système solaire, dans l'espace,
sur la même orbite que la Terre ;
la première station orbitale modulaire est complète en 1996 ;
les premiers modules de la station spatiale internationale sont
mis en orbite en 1998 ;
le premier posé en douceur sur un astéroïde est réussit en 2001;
l'exploration du satellite saturnien Titan est commencé en 2004;
le premier retour, sur terre, de matériaux prélevés sur une comète
est réalisé en 2006 ;
le début d'exploration de la planète Pluton est lancée en janvier 2006 ;
premiers retours d'échantillons de poussières cométaires en 2005 ;
les premiers retours d'échantillons du sol Martiens sont programmés
pour 2015,
Bien entendu l'homme s'attaquera lui même à l'investigation du
système solaire pendant le prochain siècle. Mars semble même
être le candidat idéal. Un premier homme foulera le sol de la
planète rouge en 2030 ou 2040, en utilisant encore des moyens
de propulsion chimique, mais à des vélocités probablement
triples de celles qui sont envisageables aujourd'hui. Pour faire
le grand tour du système solaire, il faudra penser à d'autres
moyens de propulsion par réaction que ceux que nous maîtrisons
aujourd'hui.
La fusion thermonucléaire, qui sera certainement contrôlée au milieu
du prochain siècle, sera le "carburant" le plus probable que nous
puissions imaginer. Sans doute un premier homme foulera le sol
d'Europe (un des satellites de Jupiter) avant la fin de ce siècle. Un
intérêt certain pour l'utilisation des ressources planétaires du
système solaire serait même un moteur pour nous, tout aussi
attractif que l'idée naturelle de l'exploration. Sans doute aussi
vers 2015 ou 2020 les ondes gravitationnelles seront mises en
évidences. Avec cette nouvelle forme d'interaction, de nouveaux
systèmes de propulsion (ce mot sera-t-il encore exact ?) seront testés
à la fin du siècle. Il faudra peut être attendre le début du siècle
suivant pour voir quelques modestes réalisations de déplacements
procurés par la maîtrise d'ondes gravitationnelles.
Au cours du prochain siècle des sondes spatiales seront
intentionnellement lancées à destination du système Proxima du
Centaure pour commencer notre exploration cosmique de notre
Galaxie. Des robots équipés de puissants réacteurs seront peut
être même dirigés vers des systèmes solaires plus lointains que
Proxima du Centaure à des vitesses de plusieurs millions de
kilomètres par heure. L'étude des effets relativistes sera sans
doute la motivation principale de ces expériences.
Les programmes SETI nous auront peut être encouragés dans
cette voie grâce à la détections de quelques signaux pouvant
être de bons candidats à une origine d'intelligence extraterrestre.
De nouvelles théories sur la géométrie de notre univers local
vont peut être aussi concourir à nous lancer dans des voyages,
par sondes automatiques interposées, sur des routes improbables
pour nous aujourd'hui, mais qui seront toutes aussi retentissantes
que celles défrichées par Christophe Colomb et Magellan. Nous
pouvons les souhaiter, elles seront encore plus rapides, si ce mot
n'est pas inapproprié lui aussi.
Dans une expérience célèbre le chercheur Français A.Aspect
du Laboratoire d'Optique d'Orsay avait en son temps (1975)
réussit une expérience qui lui avait permis son entrée à
l'Académie des Sciences à Paris en 1990. Il avait réalisé une
expérience portant sur l'inséparabilité, en terme de physique de
l'élémentaire. En propulsant à la vélocité deux particules siamoises
(en fait elles n'étaient que jumelles) sur des routes opposées et en
modifiant la polarité d'une des particules pendant son trajet il avait
constaté que sa soeur subissait le même sort de l'autre côté !
A quelle vitesse se propageait l'information entre les deux ?
A la fin du XX ème siècle nous n'avons pas la réponse. A. Aspect
confirmait simplement (simple est ici un euphémisme) un problème qui
faisait les beaux jours du conseil Solvay de 1927 (Solvay, hotel bruxellois
où se réunissaient parfois les grands physiciens de 1925 pour confronter entre
eux les nouvelles théories sur la physique de l'élémentaire. Il a été remplacé par
Cargèse en Corse entre autres lieux) . Si cette transmission d'information
se faisait à des vitesses très supérieures à la vélocité (vitesse de la
lumière) alors une nouvelle physique commencerait à être explorée
et qui sait si une des retombées ne permettrait pas le déplacement
de l'homme dans l'espace dans une tout autre dimension, et qui n'a,
ici, aucun sens pour nous ?
Les réalisations technologiques qui ont permis le départ de
l'exploration du cosmos au XX ème siècle sont toutes issues
des nouvelles ouvertures d'esprit provoquées par les progrès
sur les connaissances de la physique de l'élémentaire de la fin
du XIX ème et début du XX ème siècle. De l'astrophysique
comme le "Big Bang" à la biologie moléculaire et à la génétique,
de l'énergie nucléaire, au pompage optique, de nouveaux outils
d'investigation vont nous permettre de concevoir aussi bien la
fusée Saturn V du célèbre programme Apollo, que le réseau
numérique Internet, en passant par la chimiothérapie et autres
produits génétiquement modifiés (nous ne parlons même pas des
clones humains).
Désormais nous attendons de nouveaux rebondissements
de cette physique, qui semble un peu "piétiner" au début de ce
XXI ème siècle, et ceci pour nous pousser intellectuellement à
aller de l'avant dans l'exploration du cosmos. Peut être que la
génétique de ce nouveau siècle va nous donner le coup de
pouce nécessaire pour être plus clairvoyant, plus disponible
afin d'étudier de façon encore plus profonde de l'utilité à aller
plus en avant dans notre Univers.
Nous ne sommes pas seul à avoir rédigé.
Pour étoffer cette histoire de l'astronautique, j'ai relu mes notes
personnelles depuis 1956, mais aussi des ouvrages de référence
(livres, mémoires, articles, conférences, films) ainsi que les bases de
données d'autres collègues. C'est avec cette très importante
collection d'information que j'ai rédigé cette histoire.
Qu'ils en soient tous remerciés ici.
Voici une liste non exhaustive des ouvrages que nous avons lu
et qui nous ont aidé dans la rédaction de cet ouvrage. Vous les
{Remerciements au premier bébé lune de 1957.}
© Astronautiquement notes. Jean-Claude Aveni (1957 2016).
Document protégé par l' INPI [Institut National de la Protection Intellectuelle, France].
Des extraits de ce texte sont aussi sous pli "enveloppe Soleau" pour prendre date.
FIN de cette première partie du texte